"J'ai eu peur pour ma sécurité" : face aux violences contre les soignants, un projet de loi examiné au Sénat

Les violences verbales et physiques s'amplifient contre les soignants, toutes professions confondues. Déjà adoptée à l'Assemblée nationale, une proposition de loi va être examinée au Sénat afin de créer un "délit d'outrage" et renforcer les sanctions prévues en cas d'agression des professionnels au sein d'établissements de santé.

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"Il me disait qu'il allait se venger et que j'allais le payer", témoigne Stéphanie*, kinésithérapeute libérale, à propos de violentes menaces reçues par l'un de ses patients il y a un an. "J'ai eu peur pour ma sécurité", relate la Haute-Savoyarde.

Bien que particulièrement violents ce jour-là, ces propos ne font pas figure d'exceptions : "Il n'y a pas deux jours sans que l'on ne se fasse pas insulter". La kinésithérapeute pédiatrique est régulièrement menacée par les parents de ses patients, dès lors qu'elle n'a pas de rendez-vous à proposer dans l'immédiat.

À écouter certains patients, on devrait être là jour et nuit tous les jours de la semaine, sinon on se fait traiter d'incapable.

Stéphanie, kinésithérapeute pédiatrique en Haute-Savoie.

"On m'insulte souvent en me disant qu'ils vont porter plainte pour non-assistance à personne en danger, mais, moi, je m'occupe uniquement des enfants et n'ai pas des créneaux pour tout le monde", décrit la professionnelle de santé.

Stéphanie dénonce une "barrière du téléphone", seul moyen pour elle d'assurer la prise de rendez-vous, où certains patients se sentent en toute "impunité pour insulter". Lorsqu'il s'agit d'une première demande de soin, elle n'a aucun moyen d'identifier la personne au bout du fil, et donc potentiellement de porter plainte.

Des chiffres en hausse

En 2023, 110 kinésithérapeutes rapportent avoir subi une agression (verbale, physique, psychologique ou sexuelle) en France. Face au manque croissant de soignants, les kinésithérapeutes ne sont pas la seule profession concernée par ces agressions.

Selon l'Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS), le nombre de signalements a augmenté de 80 % entre 2015 et 2019. En 2022, 23 500 professionnels ont déclaré avoir été victimes de violences. Précision importante quant à ces chiffres : pour remédier au manque de données sur le sujet, les soignants (et agents administratifs exerçant dans le milieu du soin) sont fortement incités à déclarer les agressions dont ils sont victimes. Malgré tout, il existe encore un biais de non-déclaration important.

Reproches sur la (non) prise en charge des patients

Quoi qu'il en soit, il revient que les motifs de violence sont très largement des reproches sur la prise en charge du patient (plus de 50 %) et un refus de soins (environ 21 %). 

"Lorsqu'il s'agit d'agressions verbales, cela peut sembler moins important", analyse Brigitte Vincent, secrétaire nationale de l'Ordre des masseurs-kinésithérapeutes, "mais il ne faut pas non plus négliger l'impact psychologique. Il faut être bien soi-même pour pouvoir soigner". 

Création d'un "délit d'outrage"

Une proposition de loi visant à "renforcer la sécurité des professionnels de santé", déjà adoptée à l'Assemblée Nationale en mars dernier, doit être examinée au Sénat dans les prochaines semaines. 

La principale mesure de cette loi concerne la création d'un "délit d'outrage" sur les professionnels de santé, avec une amende maximum de 7 500 euros. Une circonstance aggravante est prévue lorsque les injures ont lieu au sein d'un établissement de santé. 

En cas d'agression physique, la loi vise aussi à aggraver les sanctions prévues en cas de violences commises au sein des cabinets médicaux, centres et maisons de santé, établissements médico-sociaux, pharmacies et laboratoires.

Lors d'un dépôt de plainte, les professionnels de santé doivent actuellement indiquer leur adresse de domicile. Une obligation juridique jugée dissuasive pour porter plainte par peur de représailles. Pour y remédier, cette loi prévoit que les victimes puissent indiquer l'adresse de leur ordre professionnel, du commissariat ou de la gendarmerie à la place de leur domicile.

*Le prénom a été modifié.

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