Un militant promigrants a été relaxé en appel à Grenoble ce jeudi après être venu en aide à des étrangers. Il avait été condamné à trois mois de prison avec sursis en première instance.
Un accompagnateur en montagne des Hautes-Alpes qui avait porté assistance à des migrants à l'hiver 2018 a été relaxé jeudi par la cour d'appel de Grenoble jeudi 21 novembre. Il avait été interpellé lors d'une maraude près de la frontière italienne. Le ministère public avait requis trois mois de prison avec sursis à son encontre, le jugement avait été placé en délibéré.
Pierre Mumber, 55 ans, avait été condamné en première instance à Gap à 3 mois de prison avec sursis pour "aide à l'entrée irrégulière" d'étrangers et pour les avoir "aidés à se soustraire" à un contrôle de police, ce qu'il avait toujours nié. Le Briançonnais comparaissait fin octobre pour avoir également aidé des étrangers à "se soustraire" à un contrôle de police en les aidant à s'enfuir de la voiture où ils avaient été placés. Il avait nié les deux motifs de poursuite.
A l'audience en appel, les magistrats avaient accepté de visionner des images d'une équipe italienne de télévision qui avait accompagné la maraude au col de Montgenèvre, contredisant la version policière. Ce que la cour d'appel a mis notamment en exergue dans sa décision. "Les mentions des procès-verbaux apparaissent au vu des images visionnées particulièrement dénuées de véracité", a estimé la cour d'appel, allant à l'encontre de l'interprétation de l'avocat général.
De plus, ajoute-t-elle, "aucun élément ne permet de forger la conviction que Pierre Mumber est intervenu directement pour empêcher les policiers d'appréhender les étrangers en situation irrégulière, ces difficultés d'interpellation tenant manifestement plus aux moyens en présence qu'à l'obstruction alléguée".
Pierre Mumber "soulagé"
Enfin, sur les éléments de téléphonie, sur lesquels l'avocat général s'était appuyé pour prouver le passage de la frontière du maraudeur même s'il a été expliqué que les portables bornent aussi bien en Italie qu'en France dans cette zone frontière, la cour a tranché : "rien ne permet de démontrer que Pierre Mumber a accompagné (les migrants) lorsqu'ils ont franchi la frontière".
Joint par l'AFP, Pierre Mumber a fait part de son "soulagement". "C'était tellement incohérent ! C'est difficile de se sentir incriminé sur des faits faux", a ajouté ce militant aux multiples engagements que ce soit auprès de SDF, de personnes handicapées ou d'exilés, depuis qu'ils ont commencé à franchir massivement les Alpes par le col de Montgenèvre.
"Je garde une sorte d'incompréhension et un peu de dégoût par rapport au fait que des policiers se permettent de provoquer ce genre de situation (...) alors que les maraudeurs apportent juste une aide humanitaire qui n'a rien d'illégal", a poursuivi Pierre Mumber. "On fabrique de l'illégalité mais elle n'est pas de notre côté", a-t-il souligné. Porte-parole de Tous Migrants, Michel Rousseau a salué "une victoire pour nous et pour la justice qui redore son blason".
Selon lui, ces procès à répétition amènent à "se rendre compte qu'on n'est pas les seuls à subir une répression policière et judiciaire et cela favorise des rapprochements entre mouvements sociaux confrontés à la dérive autoritaire du pouvoir", a analysé M. Rousseau.
Un autre maraudeur des Hautes-Alpes, Kevin Lucas, avait vu sa culpabilité confirmée le 23 octobre mais sa peine ramenée de 4 à 2 mois de prison avec sursis en appel. Pour ces deux procès, des manifestations de soutien avaient été organisées à l'appel de nombreuses assocations de défense des étrangers.