"Nous n'étions pas au courant", une lettre dénonçant des agressions sexuelles par l'abbé Pierre découverte par le diocèse de Grenoble

Plus d'un mois après les révélations incriminant l'abbé Pierre de plusieurs violences sexuelles, le diocèse de Grenoble a annoncé avoir découvert dans ses archives une lettre dénonçant des faits d'agressions sexuelles, remontant à plusieurs dizaines d'années.

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En juillet dernier, le rapport révélé par l'association Emmaüs et fondation Abbé-Pierre avait déjà fait trembler la communauté catholique et bien au-delà. À cela s'ajoute une lettre retrouvée par le diocèse de Grenoble-Vienne dans laquelle des faits d'agressions sexuelles sont relatés.

Dans son rapport d'enquête, le cabinet d'experts du groupe Egaé, mandaté par Emmaüs à la suite d'un signalement en 2023, mentionne "sept personnes faisant état de violences subies par des femmes de la part de l'abbé Pierre".

Une victime belge restée sans réponse

Cinq autres personnes ont également été "identifiées comme ayant pu subir des faits de violences" de sa part. Et la parole continue de se libérer. Des révélations chocs qui ciblent cette figure iconique de la lutte contre la pauvreté et l'exclusion.

"On était un peu abasourdi de voir que ce personnage immense, en quelque sorte, avait ce côté obscur. On était vraiment étonné parce que cette idée qu’il aurait pu commettre des actes répréhensibles à ce point-là, était sortie de notre conscience", confie Monseigneur Jean-Marc Eychenne, évêque de Grenoble.

À la suite de cette découverte, les membres du diocèse isérois se sont replongés dans les archives pour savoir s'ils détenaient quelque trace ou témoignage allant dans ce sens. Finalement, l'évêque de Grenoble a mis la main sur une lettre datant de plusieurs dizaines d'années en provenance du provincial des Capucins, une communauté à laquelle a appartenu l'abbé Pierre, comme le révélait nos confrères du Dauphiné Libéré.

"En 1980, à la suite d'une signature d'un livre que l'abbé Pierre offrait après une conférence, une personne belge s'est retrouvée parmi les dernières à être accueilli pour cette signature. Cette lettre dit que l'abbé Pierre aurait eu des gestes déplacés à son égard", révèle Monseigneur Jean-Marc Eychenne.

À la lecture de cette lettre, le provincial des Capucins avait ainsi redirigé la victime présumée vers le diocèse de Grenoble. Mais ce témoignage est finalement resté sans réponse. "La personne ne nous a pas contactés donc on n'a pas prêté plus d'attention à ce témoignage à l'époque", explique l'évêque de Grenoble.

L'association Mouv'enfants demande justice

Ce vendredi 23 août, plusieurs membres de l'association Mouv'enfants, engagée dans la lutte contre les violences faites aux enfants et aux adolescents, s'étaient mobilisés devant le siège du diocèse de Grenoble. Pancartes à la main, ils ont dénoncé les agissements de l'abbé Pierre et le silence de l'institution iséroise à cet égard.

"Il est décédé. Mais il y a des personnes qui n’ont pas dénoncé, qui savaient. Pourquoi est-ce qu’on ne pourrait pas faire la lumière sur ce qui s’est réellement passé, quelle était la responsabilité des uns et des autres. Peut-être une responsabilité, aussi, systémique ? Peut-être une responsabilité d’une personne morale ?", s'interroge Arnaud Gallais, président de Mouv’enfants.

"On peut avoir une responsabilité particulière"

Henri Grouès, de son nom, a exercé plusieurs fonctions au diocèse de Grenoble. Ordonné prêtre le 24 août 1938 chez les Capucins, il a ensuite rejoint l'Isère le 2 mai 1939. L'abbé Pierre a ensuite été nommé vicaire de la cathédrale de Grenoble avant de démissionner et de quitter la capitale des Alpes au 1er janvier 1944.

"Nous n’étions pas au courant. Les gens du diocèse étaient vraiment étonnés, se défend Monseigneur Jean-Marc Eychenne, à la tête du diocèse isérois depuis deux ans, qui salue le travail de ces associations. En consultant les anciens, ils étaient vraiment étonnés de ces révélations." 

L'évêque indique également qu'aucun suivi particulier n'a été fait vis-à-vis du fondateur d'Emmaüs. "Peut-être aurions-nous dû dans la mesure où en étant incardination, c’est-à-dire qu’il était prêtre pour la première fois en activité au diocèse de Grenoble. À ce titre-là, on peut avoir une responsabilité particulière, en tout cas un droit de demander des informations. On n’a jamais usé de ce droit. On se rend compte qu’aujourd’hui, il faut que l’on ait un suivi plus précis des personnes quand même."

"Parfois on a besoin d’idole, de personnage qui sont pour nous des modèles. Mais on ne connaît pas tout de la vie d’un homme et il faut rester vigilant."

Monseigneur Jean-Marc Eychenne, évêque de Grenoble

Pour prévenir les violences sexuelles au sein de l'Eglise, le diocèse de Grenoble-Vienne assure travailler en étroite collaboration avec le procureur de la République concerné en transmettant tout signalement et en suivant ses conseils.

"L’Église n’est plus aussi sûre qu’elle ne l’était mais on a encore des choses à mettre en œuvre pour qu’elle devienne plus résolument une maison sûre", conclut Monseigneur Jean-Marc Eychenne, évêque de Grenoble.

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