"On n'en peut plus" : les pharmaciens submergés par les demandes de tests antigéniques

Depuis l’entrée en vigueur du pass sanitaire le 21 juillet, l’accès aux lieux de culture et de loisirs est restreinte aux personnes vaccinées ou disposant d’un test négatif. L’ordre des pharmaciens alerte sur la demande exponentielle des tests rapides et sur l’épuisement des personnels.

Blouse, masque, gants, écouvillon : voilà à quoi ressemble le quotidien de Lucas Ferrieux depuis plusieurs mois. Avec ses collègues, ce pharmacien de Saint-Marcellin peut réaliser jusqu’à 30 tests antigéniques par jour.

La demande s’est intensifiée depuis l’application du pass sanitaire aux lieux de loisirs et de culture. Pour voyager, se rendre au cinéma, en discothèque ou dans un parc de loisirs, chaque Français doit présenter un certificat de vaccination ou un test de moins de 48 heures.

Question praticité, ce sont les tests antigéniques réalisés dans les pharmacies qui sont les plus demandés. Les résultats, communiqués en moins de trente minutes, assurent un laissez-passer en bonne et due forme. Mais les officines, comme celle où travaille Lucas, ont du mal à tenir la cadence.

"Ça fait partie de notre job, on a toujours été sous pression. Mais là, c’est des journées très épuisantes, reconnaît le jeune pharmacien. D’un point de vue purement pratique, le pass sanitaire ne nous arrange pas dans le sens où c’est déjà tendu, ça rajoute beaucoup d’appels et on a du mal à gérer. Avant, on testait les gens avec des symptômes. Aujourd’hui, ce ne sont que des demandes de confort pour partir en vacances".

 

"Les pharmaciens sont épuisés"

Lucas est loin d’être le seul à ressentir ce sentiment d’épuisement. Dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, environ 60% des 2 530 pharmacies proposaient encore des tests antigéniques il y a quelques mois. "Désormais, il n’y en a plus que 40 ou 50%, assure Hugues Videlier, président de l’ordre régional des pharmaciens. Olivier Véran nous a réunis la semaine dernière pour nous demander d’augmenter le nombre de vaccinations et de tests, quitte à embaucher et à faire des heures supplémentaires. Mais il ne se rend pas compte qu’on n’en peut plus. Les pharmaciens sont épuisés".

Comme d’autres officines, Hugues Videlier a cessé de proposer des tests rapides dans sa pharmacie située à Tullins, en Isère : "Les demandes étaient incessantes ! Donc on ne fait plus de tests parce que, humainement parlant, on ne peut plus. On n’a plus le personnel nécessaire car on est en plein été. Et on ne peut pas laisser tomber les autres patients qui ont besoin de nous tous les jours".

 

Les pharmacies de garde prises d’assaut par les fêtards

En plus des patients habituels à gérer, des tests et des vaccins, les pharmacies doivent aussi assurer des gardes de nuit régulièrement. En soirée, les officines situées à proximité des discothèques sont prises d’assaut par les fêtards. "Certaines demandent à ne plus faire de tests, se désole Hugues Videlier. Parfois, elles sont appelées jusqu’à 1 heure du matin pour des tests rapides, et peuvent en réaliser jusqu’à 80 par jour en comptant les fêtards qui veulent un pass de dernière minute pour entrer en boîte de nuit".

Sous pression depuis le début de la pandémie, les pharmaciens craquent. L’association ADOP (Aide et dispositif d'orientation des pharmaciens) créée en 2015 recevait environ cinq appels par mois sur la plateforme d’écoute dédiée aux professionnels en difficulté. "Mais depuis le début de la crise, on est monté à 50 appels mensuels de pharmaciens épuisés" regrette le président de l’Ordre régional.

A la pression du gouvernement s’ajoute celle des clients. Sous tension, la patientèle est plus difficile à gérer en pleine crise sanitaire. Selon l’Ordre régional des pharmaciens, le nombre d’agressions exploserait dans les pharmacies. "On ne peut pas nous en mettre plus sur le dos" alerte Hugues Videlier.

Si, comme lui, de plus en plus de pharmaciens décident d’arrêter les tests rapides, d’autres professionnels font le choix de limiter la vaccination. C’est le cas de la pharmacie de Saint-Marcellin qui emploie Lucas Ferrieux : "On n’a pas assez de temps ni d’effectifs donc on a décidé de ne vacciner que les personnes qui ont un rappel, et d’arrêter les injections de première dose. La logistique pour les tests et les vaccins est énorme avec la gestion des stocks et les déclarations administratives, donc c’était soit l’un, soit l’autre".

Malheureusement, la pression sur les pharmacies risque de s’intensifier à nouveau d’ici quelques jours avec l’extension du pass sanitaire aux bars et aux restaurants. "Ça ne sera pas gérable", prévient Hugues Videlier, qui demande au gouvernement d'inciter à la vaccination en rendant les tests de confort payants dès que possible. 

 

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