Un an après avoir été acquitté, un policier grenoblois est rejugé à partir de lundi aux assises de Paris pour avoir tué d'une balle dans le dos un braqueur en cavale. Un procès qui s'ouvre en pleine controverse sur les violences policières après l'"affaire Théo".
Damien Saboundjian, 38 ans, doit répondre de "violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner", des faits passibles de 20 ans de réclusion criminelle. Après la mort d'Amine Bentounsi, Damien Saboundjian avait été muté d'office dans sa ville d'origine, Grenoble.
Contrairement à l'accusation qui avait requis cinq ans avec sursis et une interdiction professionnelle d'exercer de la même durée, la cour d'assises de Seine-Saint-Denis avait estimé que le fonctionnaire avait agi en état de légitime défense, et n'était donc pas pénalement responsable de la mort d'Amine Bentounsi, tué lors d'une course-poursuite dans les rues de Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis) en 2012.
Son acquittement, le 15 janvier 2016, avait été accueilli aux cris de "déni de justice" par les nombreux militants présents à Bobigny pour soutenir la famille d'Amine Bentounsi et en particulier sa soeur Amal, devenue une figure de proue de la lutte contre les "violences policières".
Fait rare, le procureur général avait fait appel du verdict, estimant que "les conditions légales de la légitime défense" n'étaient pas "démontrées".
Le rappel des faits
Le 21 avril 2012, une patrouille est avisée qu'Amine Bentounsi, incarcéré pour des vols à main armé, est recherché pour n'être pas rentré de permission et a été vu dans le centre de Noisy-le-Sec. Trois policiers se lancent à ses trousses tandis que Damien Saboundjian fait le tour d'un pâté de maison pour tenter de le prendre à revers.
Au détour d'une rue, il tombe sur le fugitif qui, selon sa version des faits, braque à deux reprises son arme sur lui. Le policier fait feu. Amine Bentounsi s'effondre, atteint d'une balle dans le dos.
La légitime défense en question
Damien Saboundjian était-il en état de légitime défense ou a-t-il tué un homme qui courait, de dos? La version de l'accusé selon laquelle "Bentounsi l'attendait campé sur ses jambes n'a été corroborée par aucun témoin", tranche Michel Konitz, qui représente huit membres de la famille de la victime.
La question de la légitime défense devrait de nouveau être au coeur de ce procès qui se déroulera sur cinq jours et verra défiler à la barre 23 témoins et neuf experts.
Hasard du calendrier, il se tient quelques jours après l'entrée en vigueur de la loi de sécurité publique, qui assouplit les règles de légitime défense pour les policiers.