REPORTAGE. "C'est une question d'humanité" : le désarroi d'une famille albanaise, logée dans une école de Grenoble

Depuis deux mois, un couple de ressortissants albanais et leurs deux enfants, âgés de 8 et 13 ans, dorment dans l'école primaire La Fontaine à Grenoble. Une vie de galère comme celles de nombreuses autres familles en attente de régularisation. Les enfants sont malgré tout scolarisés, accompagnés par le Réseau éducation sans frontières.

Depuis deux mois, Jetmir et Agime ainsi que leurs deux enfants - Aorta, 8 ans et Mikail, 13 ans - se partagent une chambre d’à peine 10 m². Une pièce située dans l'ancien appartement du concierge de l'école La Fontaine à Grenoble. Par terre, deux matelas font office de lit : "C’est là où je dors avec ma fille et mon fils, nous explique Agime, et sur le petit matelas, c’est mon mari qui dort. Là, c'est une armoire dans laquelle on met un peu de nourriture."

Une situation qui dure depuis deux mois après que leur droit d’asile leur a été refusé. La famille a dû quitter son appartement et depuis, elle vit dans l’école primaire où est scolarisée leur fille Aorta. Elle peut y aller à partir de 18 heures mais doit partir impérativement le matin à 7 heures quand commence les activités périscolaires. "En journée, les enfants vont à l’école, et nous, on se balade dans les parcs, dans le tramway, on va à nos rendez-vous et on prend des cours de français aussi", explique Agime, la mère de famille.

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Une famille Albanaise hébergée dans une école de Grenoble ©Joane Mériot, Azedine Kebabti et Gilles Neyret / France Télévisions

"C'est une question d'humanité"

Cette mise à l’abri a été initiée par les parents d’élèves de l’école La Fontaine, à Grenoble, indignés par la situation de cette famille : "C’est une question d’humanité. Pour moi, c'est de la non-assistance à personne en danger quand on laisse les gens sans nourriture dans le froid. C’est de la conscience, c’est du cœur," explique Kamila Merghed, parent d'élève. 
Le jour où nous avons rencontré la famille, un goûter était organisé pour récolter des fonds et des denrées pour lui venir en aide : "Cet hébergement, ce n’est pas une solution, c’est un début de quelque chose pour les mettre à l’abri, déplore une habitante du quartier venue soutenir l’action des parents d’élèves. Pour moi, c’est de la mise en danger des enfants. Pour moi, dormir dehors, c’est dangereux, il peut arriver n’importe quoi."

250 enfants dorment dehors à Grenoble

Plusieurs associations locales étaient présentes pour soutenir le mouvement et alerter sur la situation des enfants sans-abris à Grenoble : "Ça se multiplie, toute l’organisation de l’État français fait que l’on va de plus en plus se résigner à avoir des gens à la rue, mais nous, on ne se résignera pas," explique Martine François du Réseau Éducations sans frontières. 

Car à Grenoble, des dizaines de familles sans papiers sont hébergées dans des écoles. Selon la mairie, 250 enfants dormiraient dans la rue ou dans un habitat de fortune et quelque 2 000 adultes. 
"Ce n’est pas une commune, même une grande ville comme Grenoble qui peut avoir les moyens d’héberger ces 2 000 personnes, il faut vraiment que l’État prenne en charge sa responsabilité qui est celle d’ouvrir plus d’hébergements," déplore Christine Garnier, adjointe aux écoles à la mairie de Grenoble. 

La ville de Grenoble poursuit l'État en justice 

La semaine dernière, la ville de Grenoble, avec quatre autres villes françaises (Strasbourg, Rennes, Bordeaux et Lyon) a annoncé poursuivre l’état en justice face à la hausse du nombre de sans-abris.

"Il faut que la justice dise : 'Ce n’est pas acceptable'. Que l'on envoie un signal pour dire que la fraternité n’est pas un vain mot", a déclaré le maire de Grenoble, avant d’ajouter : "Nous célébrons cette année les 70 ans de l'appel de l'Abbé Pierre, il avait généré un vrai changement de regard sur les bidonvilles à l'époque, et généré une vraie politique de résorption des bidonvilles. Aujourd'hui, ils sont de retour."

En attendant d’avoir un logement plus digne, la situation de cette famille albanaise peut durer des semaines, voire des mois. 

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