Alors que le projet d’extension du site STMicroelectronics de Crolles fait l’objet d’une concertation publique, l’entreprise iséroise vient d’annoncer la mise en place d’une ligne pilote de recyclage de l’eau. Un "effet d’annonce" selon des opposants qui dénoncent "l'accaparement des ressources" par l'industriel. Ils prévoient trois jours de mobilisation ces 5, 6 et 7 avril 2024.
Ils dénoncent "l’accaparement des ressources par les industries du numérique et la vie connectée". Les membres du collectif "Stop Micro 38" prévoient trois jours de mobilisation dont une "grande manifestation" ce samedi 6 avril 2024, de Grenoble à la presqu’île scientifique, "là où se trouvent tous les laboratoires qui travaillent à créer un tas d’applications et de gadgets jugés néfastes" précise l’un des membres de l’association, contacté par France 3 Alpes.
Si ce collectif a été créé il y a près d’un an, c’est dans le but "de lutter contre l’extension" du site de STMicroelectronics à Crolles. Les opposants au projet dénoncent depuis des mois le "pillage de l’eau" effectué par l’industriel, premier employeur privé en Isère et spécialisé dans la fabrication de puces électroniques et de semi-conducteurs, qui compte près de 7 500 salariés dans le département.
Projet d’extension : la concertation publique se poursuit
Selon la direction de l’entreprise, présente depuis 50 ans en Isère, "ce projet d’extension porte sur l’unité de production de plaquettes de 300mm de diamètre" qui impliquera plusieurs technologies dont une en particulier "qui permet l’optimisation de la puissance de calcul et une très faible consommation d’énergie". Ces technologies seront notamment utilisées pour l’automatisation et la sécurité des véhicules, l’Intelligence Artificielle et les circuits spécialisés pour les systèmes de communication sans fil.
Ce projet d’agrandissement, qui engendrerait la création de 1 000 emplois supplémentaires directs dans le département ainsi que 3 000 emplois indirects, provoque la colère de certains opposants alors qu'une concertation publique a lieu jusqu’au 19 avril 2024.
C’est dans ce contexte que l’entreprise iséroise a fait une annonce, ce mercredi 3 avril : "Dans le cadre de notre projet de doublement de la capacité de production, nous visons de doubler les volumes d’eau recyclée pour les porter à 6 millions de mètres cubes par an à terme, tout en limitant les besoins en eau potable". Et ce, grâce à la mise en place d'une innovation sur le site de Crolles.
Recyclage de l’eau : STMicroelectronics annonce une innovation
Le leader mondial des semi-conducteurs annonce en effet avoir installé "une ligne pilote de recyclage de l’eau sur son site de Crolles", ce sujet étant "primordial" selon la direction de l’entreprise.
Après deux ans de recherche et d’études, cette installation "permet de recycler une partie de l’eau usée en sortie de station de traitement sur le site pour la réutiliser dans le circuit de production sous forme d’eau ultrapure", et ainsi, "limiter les besoins d’apport en eau brute externe".
Cette ligne pilote pourra contribuer, à terme, à nous rapprocher de notre objectif de 60% d’eau recyclée utilisée dans notre processus industriel.
Éric Gerondeau, Directeur du site de STMicroelectronics Crollesvia un communiqué
"L’eau est une ressource essentielle dans le processus de fabrication des semi-conducteurs, eux-mêmes nécessaires à l’ensemble des secteurs de l’économie" précise l’industriel dans un communiqué, arguant le fait de recycler "l’eau nécessaire pour les besoins de production, soit en la réutilisant en l’état, soit en la traitant pour une réutilisation dans le processus de fabrication des semi-conducteurs".
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"Un effet d'annonce" selon une association de citoyens
Pour le collectif "STop Micro 38", cette installation est un "effet d’annonce". "Ceci est une réponse à notre mobilisation, destinée à rassurer le grand public" affirme l’opposant contacté par France 3 Alpes.
Pour l’instant, rien ne prouve que ça marche et cela serait très énergivore.
R., membre du collectif "STop Micro 38"
Sur son site, le collectif a publié plusieurs études sur le sujet, dénonçant une "mascarade" et "une consommation d’eau toujours plus grande" dans un communiqué publié le 9 mai 2023, et intitulé "Eau : il n’y a pas de recyclage chez ST Microelectronics !".
"Une réutilisation de l’eau qui se voudrait écologique devrait se faire via des moyens économes en énergie et respectueux de la nature pour retraiter les eaux souillées" explique le collectif, "or, les tonnes de produits chimiques qui viennent polluer l’eau sont impossibles à retraiter par de tels procédés (…) Le traitement de l’eau entrante à ST pour la rendre ultrapure est le poste le plus énergivore de l’entreprise, il en serait donc de même pour décontaminer l’eau."
Procéder au recyclage revient donc, dans le contexte de cette entreprise, à remplacer une nuisance par une autre.
Le collectif "STop Micro 38"
Dans le cadre de sa gestion des ressources en eau sur le site de Crolles, STMicroelectronics affirme avoir réduit "de 41% l’eau utilisée par plaque produite entre 2016 et 2022" et restituer "85% de l’eau dans son milieu naturel après traitement", le reste étant "sous forme de vapeur d’eau".
L’association "STop Micro 38" explique qu’"au final, l’eau rejetée dans l’Isère après son passage dans la station de traitement est dit de "qualité rivière", c’est-à-dire conforme aux seuils de concentration établis par la préfecture", mais qu'"après traitement, l’eau se trouve toujours chargée en produits chimiques".
La direction de STMicrolectronics réagit auprès de France 3 Alpes et rappelle "que le site de Crolles est engagé dans une démarche de protection de l’environnement certifié selon les référentiels ISO 14001 et validé EMAS (Système de management environnemental et d’audit)",
Nous contrôlons de manière stricte la qualité de l’eau que nous restituons dans le milieu naturel.
La direction de STMicroelectronicsà France 3 Alpes
De son côté, le collectif "STop Micro 38", qui prévoit un grand week-end de mobilisation, conclut : "Si cet accaparement, cet extractivisme et cette pollution immense continuent, nous n’aurons bientôt même plus de quoi boire, manger et respirer sainement".
