L'inquiétude monte chez les éleveurs laitiers après que le géant Lactalis a imposé une baisse des prix aux producteurs. Jean-Michel Bouchard élève 200 vaches en Isère et face à cette chute du prix d’achat, il se dit préoccupé par la pérennité de son exploitation.
"On nous l’a imposé, on n’a même pas voulu entendre nos revendications", déplore Jean-Michel Bouchard. Sur son exploitation, située à Thodure, dans le nord de l’Isère, il élève 200 vaches laitières. Chaque jour, elles donnent entre 1 200 et 1 500 litres de lait, du lait bien gras, idéal pour produire notamment le fameux Saint-Marcellin local.
Mais la mauvaise surprise est tombée en tout début d'année. Le groupe Lactalis a prévu d'acheter le lait moins cher en 2024, 405 euros pour 1 000 litres, soit une perte de 45 euros pour 1 000 litres en l’espace d’un an. Un prix bien trop bas pour Jean-Michel Bouchard qui ne comprend pas cette baisse dans le contexte actuel.
"Toutes nos charges ont augmenté avec l’inflation : le gasoil, le carburant, les assurances, l’électricité... Et nous, ces augmentations-là, on ne peut pas les répercuter sur le prix du lait. Pour moi, il y a des marges trop importantes qui sont faites par la grande distribution. J’entends que l’industriel et les fromageries veulent aussi une marge, mais un moment donné, on doit partager. On ne peut pas être les seuls à supporter toutes ces charges", estime-t-il.
Son exploitation menacée
Jean-Michel est cette année tout juste à l’équilibre. Il craint pour la pérennité de son exploitation mais aussi pour l'emploi de son salarié : "Ce qui m’inquiète un peu à l’avenir, c’est que l’on a un emploi sur l’exploitation, ça représente un budget de 40 000 à 45 000 euros sur l’année. Aujourd’hui, ça va être le budget sur lequel je vais devoir mettre un coup de rabot. On est assez inquiet pour cette année 2024."
D'aussi loin que remonte sa mémoire, tout le monde dans la famille de Jean-Michel a choisi le métier d'agriculteur. Lui-même a décidé de se convertir au bio en 2018. Et s'il vend à un tarif un peu plus élevé, les normes qu'on lui demande de respecter sont à chaque fois plus pesantes.
"Il faut que l’on garde le bon sens paysan et que l’on puisse travailler avec des normes, on ne va pas le nier, mais il ne faut pas non plus que l’on rajoute des couches que l’on ne peut pas suivre et qui démoralisent les agriculteurs", regrette l'éleveur.
Respecter la loi Egalim
Les producteurs de lait déplorent que Lactalis ne respecte pas la loi Egalim, qui sanctuarise le prix de la matière première agricole et leur impose un prix du lait : "On veut se mettre autour de la table avec les industriels, que l’on discute en prenant en compte cette loi", résume Jean-Michel Bouchard.
Lactalis a accepté de rencontrer les éleveurs ce jeudi 25 janvier. Les négociations auront lieu grâce à la médiation du ministère de l'Agriculture.