La multi-nationale franco-italienne ST Microelectronics va bientôt doubler sa capacité de production dans ses usines de Crolles, en Isère. Huit mois avant l’ouverture de son nouveau site, notre équipe a pu pénétrer dans l'une des deux salles blanches de l’entreprise, un site ultra protégé où sont fabriqués 10 millions de micro-processeurs chaque jour.
L’endroit ressemble à un laboratoire secret, peuplé de silhouettes encapuchonnées. Pour entrer dans la salle blanche de STMicroelectronics, il faut revêtir un uniforme complet : combinaison, sur-chaussures, lunettes et gants. La bouche et le nez sont masqués, les cheveux coincés sous une charlotte.
Chaque matériel qui entre doit être rigoureusement nettoyé avec une lingette, comme le smartphone que nos journalistes ont utilisé lors de leur visite.
Seuls les personnels couverts de la tête au pied sont autorisés à entrer dans la salle blanche. C’est là que la multinationale franco-italienne fabrique ses semi-conducteurs, à partir de plaques de silicium. Tout est fait pour chasser le moindre grain de poussière, qui pourrait gêner la production.
Car ici, les agents travaillent à une échelle microscopique. "Ce qu’on ne voit pas à l’œil nu, ce sont les centaines de millions, voire les milliards de transistors qu’on fabrique sur chacune des puces, explique Olivier Hinsinger, le directeur des opérations de Crolles 300. Ils sont très petits, 5 000 fois plus petits que l’épaisseur d’un cheveu. C’est pour ça que l’on peut en mettre autant sur un circuit intégré".
10 millions de puces chaque jour
À l’échelle de l’infiniment petit, toute particule peut mettre en péril la fabrication. Ainsi, chaque jour, 10 millions de puces électroniques sont produites au prix d’une logistique hyper sécurisée. L’air est constamment renouvelé, et la température maintenue à 20,5 degrés. La concentration de particules ou de germes en suspension dans l'air est très faible.
Dans les deux salles blanches, 400 personnes se relaient 24 heures sur 24 pour contrôler les machines entièrement automatisées. Pas facile de se reconnaître entre collègues avec de tels équipements. Pourtant, ils assurent y parvenir rien qu’en analysant "la silhouette et la démarche".
La fabrication des puces prend plusieurs semaines, car des centaines d'opérations sont nécessaires sur les plaques de silicium. Ces semi-conducteurs sont ensuite insérés dans divers produits électroniques, comme des voitures ou des objets connectés.
Un marché en pleine expansion
Le marché mondial des semi-conducteurs doit doubler dans les dix prochaines années. Pour répondre à cette demande, STMicroelectronics et GlobalFoundries ont annoncé en juillet dernier, aux côtés du président de la République et de plusieurs ministres, la construction d’une nouvelle usine sur le site de Crolles.
Elle devrait atteindre sa pleine capacité d’ici 2026, pour un investissement de 5,7 milliards d'euros. "Nous allons créer la plus grande unité de production de semi-conducteurs en Europe. Donc la France peut faire la course en tête, y compris dans les domaines industriels et technologiques. Il faut juste s’en donner les moyens" avait déclaré le ministre de l’Économie, Bruno Lemaire, lors de sa visite en Isère.