Le maire de Péage-de-Roussillon, victime avec sa famille d'une agression raciste à la sortie d'un bar d'Avignon, a relaté "cette douloureuse expérience" mardi soir au cours de ses vœux devant ses administrés. André Mondange a dénoncé "la montée de l'extrême droite" et appelé à la tolérance.
Une accolade et quelques mots. C'est avec le sourire mais des bleus encore légèrement visibles qu'André Mondange, le maire de Péage-de-Roussillon (Isère), a accueilli mardi 2 janvier les vœux de ses administrés. Des habitants et beaucoup d'élus du territoire ont fait le déplacement pour témoigner de leur soutien à l'édile, encore traumatisé par l'agression dont lui et sa famille ont été victimes dans la nuit du 21 au 22 décembre à Avignon.
"Ça va mieux. Le physique va bien, le reste prendra un peu plus de temps, mais on va s'en occuper. En tout cas, j'ai du courage, de la détermination et je suis motivé pour continuer dans mes fonctions. (...) Une fois le choc passé, c'est la volonté de lutter pour plus de tolérance, contre le racisme, qui l'a emportée", assurait André Mondange (PCF) avant de monter sur l'estrade pour prononcer ses vœux.
Un discours contre le "fascisme"
Une prise de parole empreinte d'émotion au cours de laquelle l'élu a relaté l'agression que lui et sa famille ont subie. "Cette douloureuse expérience démontre encore une fois la dangerosité de l'extrême droite. Il n'y a pas d'extrême droite respectable. L'extrême droite est raciste, antisémite et anti-républicaine. Plus personne ne pourra dire 'je ne savais pas.' On le sait", a-t-il déclaré devant une salle comble.
Un jeune Français d'une vingtaine d'années déclare en public à une jeune Française de 21 ans, métisse, qu'elle n'est pas légitime sur le sol français de par sa couleur de peau. On ne le sait pas ? Si, on le sait. Le même individu clame dans la rue, en France, son dégoût pour un homme blanc qui a fait un enfant avec une femme noire. On ne le sait pas ? Si, on le sait.
André Mondange, maire de Péage-de-Roussillon
Deux individus qui se sont revendiqués de la mouvance nationaliste et identitaire ont tabassé André Mondange à la sortie d'un bar alors qu'il arborait sa cocarde d'élu tricolore, insulté sa fille métisse et asséné un coup de bouteille à la cousine de celle-ci. L'élu, qui souffre notamment d'un hématome au visage, a déposé plainte contre X et indique ne pas avoir connaissance d'éventuelles avancées dans l'enquête.
"Pour parler de la montée de l'extrême droite, de la violence, de l'intolérance, du racisme, de l'intégrisme, des attentats, de l'antisémitisme, un mot suffit : fascisme, a-t-il poursuivi au cours de ses vœux. Pour lutter contre cela, il nous faut semer tous les jours afin d'avoir une bonne récolte. La semence que je propose, c'est faire République ensemble, avec la laïcité, de la tolérance, du respect, de l'intégration, de la culture, de l'éducation. La récolte s'appelle liberté, égalité, fraternité."
"Il ne faut pas que la haine nous submerge"
Cette agression à caractère raciste a provoqué une vague d'indignation de personnalités politiques, notamment du président d'Auvergne-Rhône-Alpes Laurent Wauquiez (LR), du président de l'association des maires de France, David Lisnard (LR), ou encore du maire (EELV) de Grenoble, Eric Piolle.
"La communauté des élus et la population apportent tout leur soutien à André Mondange, leur maire, parce qu'il a été victime d'une agression inadmissible. Du fait de ses fonctions de maire, il a été 'repéré' et le caractère raciste de cette agression la rend inacceptable", a réagi Yannick Neuder, député (LR) de l'Isère, venu assister à la cérémonie des vœux du maire de Péage-de-Roussillon.
"En tant qu'élus, on voit qu'on doit être discrets pour notre sécurité. C'est triste, mais on doit se protéger, protéger nos familles et on a cette peur constante. (...) Les gens ne sont pas dupes. Il ne faut pas que la haine nous submerge. On peut très bien vivre ensemble sans conflit, sans haine", a assuré Aïda Chouchane, adjointe au maire de Saint-Maurice-l'Exil (Isère), elle aussi venue soutenir André Mondange.
Aux côtés des élus, une foule d'habitants, eux aussi meurtris par cette agression, ont témoigné de leur indignation. "Ce n'est pas normal que les élus soient attaqués comme cela. Ça ne devrait pas exister et j'espère que la justice va faire son travail", s'est émue Florence. "Ceux qui font ça n'ont pas de cœur. Ce sont des barbares", a ajouté Henri, un autre habitant.
Les élus locaux ont été les cibles de nombreuses violences au cours de l'année passée, avec en point d'orgue l'incendie criminel en mars au domicile du maire de Saint-Brévin et l'attaque à la voiture-bélier visant celui de l'édile de L'Haÿ-les-Roses, lors des émeutes début juillet. Selon le ministère de l'Intérieur, les faits de violences envers les élus ont augmenté de 32% en 2022 avec 2265 plaintes et signalements enregistrés. Et 2023 devrait battre des records avec une hausse de 15%.