La centrale hydroélectrique de Grand'Maison, dans le massif de l'Oisans, est la plus puissante d'Europe, capable d'alimenter simultanément les villes de Grenoble, Lyon et Chambéry. Et elle va encore gagner en puissance dans les prochaines années. Visite guidée avec le responsable d'exploitation.
La centrale de Grand’Maison est présentée comme la centrale hydroélectrique la plus puissante de France et même d'Europe. Capable d'alimenter les villes de Lyon, Grenoble et Chambéry simultanément. Et elle va encore gagner en puissance ces prochaines années grâce à des "travaux de surpuissance" en cours. Comment fonctionne la centrale ? Visite guidée avec Jean-Paul Giraud, responsable d'exploitation du site de Grand'Maison.
"à l'époque, le plus gros chantier de France"
La visite débute au niveau du barrage supérieur de Grand'Maison, à 1700 mètres d'altitude dans le massif de l'Oisans. Jean-Paul Giraud nous accueille dans un petit bâtiment qui surplombe le barrage, la salle de commande offre un point de vue exceptionnel sur le lac et les montagnes alentours. D'ici, l'exploitant peut notamment surveiller le niveau du lac.
Le bassin a été créé au début des années 80. Quatre années de travail ont été nécessaires. "Il faut savoir que Grand'Maison a été construit par les plus grosses sociétés de travaux publiques de l’époque explique Jean-Paul, c’était le plus gros chantier de France". 13 millions de m3 de matériaux, de terre, d’enrochement et de remblais ont été amassés pour créer ce barrage de 600 mètres de long et 600 mètres de large à la base.
Le chantier était suspendu durant l'hiver en raison de la neige, mais de mai à octobre, hommes et engins travaillaient jour et nuit, 7 jours sur 7. "Faut voir une ronde permanente d’engins de 100 tonnes, des bulozers, des chargeurs énormes… une vraie fourmilière se souvient Jean-Paul ça marque quand on vit un chantier comme ça". 35 ans après, il garde encore des liens forts avec l'équipe de la première mise en service du barrage.
"une montagne indestructible"
Le barrage peut-il lâcher un jour ? La question se pose lorsque l'on sait que par son poids, il bloque une retenue de 140 millions de m3 d’eau. Jean-Paul Giraud est catégorique "c'est une montagne, c’est indestructible quasiment mais on le surveille."
300 capteurs ont été installés sous le barrage, dès sa construction, pour vérifier ses mouvements et les infiltrations d'eau. Depuis la mise en eau du barrage il y a 35 ans, ces informations sont relevées régulièrement par l'exploitant et vérifiées par la Direction Technique Générale d'EDF, le centre d'ingénierie qui se trouve à Grenoble.
"L'ouvrage vit. Il est soumis aux lois de la nature. La neige, la chaleur, la pluie, tout ça influence la vie de l’ouvrage et les dispositifs de mesure. Et nous, on s’assure que cette influence ne vient pas perturber la sûreté de l'ouvrage" explique Stéphane Krigler, ingénieur auscultation à la DTG.
"comme une grosse batterie"
La visite se poursuit. 1.000 mètres plus bas, on arrive sur la centrale. Grand'Maison a une particularité , "c'est une STEP, une Station de Transfert d’Énergie par Pompage", précise Jean-Paul Giraud. La retenue supérieure est reliée à un bassin inférieur situé au niveau de la centrale. En période de forte consommation, la centrale turbine l’eau de la retenue supérieure. L’eau rejoint ensuite le bassin aval. En période creuse, essentiellement la nuit et le week-end, l’eau de la retenue inférieure est pompée vers la retenue supérieure. Le système permet ainsi de faire face rapidement à une pointe de consommation. "C'est comme une grosse batterie, on refait notre stock pour le coup d’après" résume Jean-Paul. "Et l’autre aspect intéressant c’est sa rapidité de connexion au réseau. On peut passer de zéro à puissance maximum en moins de trois minutes".
Chantier de maintenance et de... surpuissance
Au moment de notre visite à la centrale, un chantier se termine. Chaque année à la belle saison, EDF investit dans des travaux de rénovation. "En été, il y a moins de besoins sur le réseau, on en profite pour faire nos maintenances précise Jean-Paul, c’est comme une voiture, de temps en temps faut faire une révision et on en profite de la transformer un peu de façon à ce qu’elle produise un peu plus d’énergie."
Ce qui va apporter un surplus de puissance, ce sont les nouvelles roues Pelton qui vont remplacer les anciennes progressivement. "La nouvelle roue a un nouveau profil hydraulique qui permet un meilleur rendement, confirme Charlotte Thierrry, manager de l'équipe d'intervention mécanique avec le remplacement des injecteurs, ces organes d'amenée d'eau qui laissent passer un peu plus d'eau que les précédents (...) on gagne 10% de puissance sur chaque groupe."
Deux des quatre roues Pelton de la centrale ont déjà été changées. A terme, la centrale va gagner 50 mégawatts. "C'est beaucoup explique Charlotte avec une certaine fierté, certaines usines produisent 50 mégawatts au total, ici, on fait une surpuissance de 50 mégawatts sur ces 4 groupes."
Des visites du barrage de Grand'Maison ou de la centrale sont parfois organisées par EDF notamment lors des journées du patrimoine. Mais à côté de la centrale, le musée Hydrelec, ouvert à tous, vous permettra de trouver quand vous le souhaitez les réponses à toutes vos questions sur la construction des barrages et l'hydroélectricité.