CASINO : "On craint un nouveau Manufrance ! " inquiets pour l’avenir du groupe, les salariés se mobilisent à Saint-Etienne

Les syndicats de Casino ont déposé un préavis de grève du 5 au 31 décembre. Ils se mobilisent pour alerter sur les risques de suppressions d’emplois. Le groupe de distribution, né au 19ᵉ siècle dans la capitale ligérienne, compte 50 000 en France fin 2022, dont 4000 dans la Loire. À Saint-Etienne, siège du groupe, une manifestation est organisée ce mardi 5 décembre au matin. Elle rassemble plus d'un millier de personnes

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Dans la Loire, où le groupe de distribution Casino est né il y a 125 ans, une intersyndicale a appelé à une mobilisation ce mardi 5 décembre. Les salariés sont inquiets pour leurs emplois et pour l'avenir du groupe, endetté. Casino, fondé par Geoffroy Guichard qui a donné son nom au stade de football de l'ASSE, emploie environ 4 000 personnes dans la Loire ce mardi 5 décembre.

Le plan de redressement sera présenté lundi 11 décembre devant le tribunal de commerce qui se prononcera le 25 février sur l'avenir du groupe

Soutien du maire de Saint-Etienne

À l'issue de la manifestation qui a rassemblé plus d'un millier de personnes, Gaël Perdriau, maire de Saint-Etienne, a reçu en fin de matinée, durant plus d’une heure, les représentants syndicaux des salariés du groupe Casino. "Je tenais absolument à recevoir les représentants syndicaux de Casino à l’Hôtel de ville ce matin, afin de leur manifester tout notre soutien et leur confirmer l’engagement de la ville de Saint-Etienne à leurs côtés", a-t-il expliqué via un communiqué.

À Saint-Etienne, nous ne l’oublions pas, chaque famille stéphanoise a un lien personnel avec Casino.

Gaël Perdriau

Maire de Saint-Etienne

"Le manque de transparence sur le projet des repreneurs crée de légitimes inquiétudes en termes d’emplois au siège social, mais également dans les magasins et les entrepôts du groupe", a déploré le maire. "Si l’engagement de garder un siège social à Saint-Etienne est fort, celui-ci n’est pas suffisant car il faut que ce siège soit animé des 2 000 emplois qui, aujourd’hui, font vivre le groupe", a-t-il ajouté.

Le maire a rappelé qu’il aurait, vendredi, un entretien avec le directeur de cabinet du ministre de l’Économie et des finances, Bruno Le Maire. Gaël Perdriau a réaffirmé l'engagement de la ville : "Nous restons mobilisés et suivons attentivement l’évolution de la situation, car même si la ville de Saint-Etienne ne dispose pas des leviers de décisions dans ce dossier, elle soutiendra les actions engagées par les salariés."

Saint-Etienne : plus d'un millier de manifestants

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Saint-Etienne : manifestation historique des salariés Casino, plus d'un millier de personnes dans les rues. ©France Télévisions

À Saint-Etienne, la journée d'action a débuté par un rassemblement ce matin devant le siège social du groupe où travaillent 2 000 personnes. Un rassemblement suivi d'une manifestation dans les rues de la ville, en direction de la préfecture, puis de l'Hôtel de ville. Ce mardi matin, près de 1100 personnes étaient présentes dans le cortège. 

11h30 : le cortège est arrivé devant l'Hôtel de ville. 

Devant l'Hôtel de ville, l'ambiance est calme et bon enfant.

Un député en tête de cortège

Ce matin, le député de la 1ʳᵉ circonscription de la Loire, Quentin Bataillon était aux côtés des manifestants. L'élu qui arborait l'écharpe tricolore était présent dans la manifestation, en première ligne et en tête de cortège, aux côtés des syndicats et des salariés. Le parlementaire entendait afficher son "soutien" et "attachement viscéral". "Saint-Etienne et Casino sont indissociables", a écrit Quentin Bataillon sur les réseaux sociaux. "Priorités : emplois, siège de Saint-Etienne et avenir du groupe (marque, logistique, proximité, fonctions support)", a ajouté le député ligérien. "Je vais continuer à agir avec l’intersyndicale auprès du ministre de l’Économie et des Finances", a-t-il conclu. 

"Comme chez Manufrance"

"On craint un nouveau Manufrance !", c'est ce qu'indique un représentant syndical CFDT du groupe Casino ce mardi matin. "La direction depuis plusieurs années est dans le déni complet, elle se veut systématiquement rassurante, mais la situation est extrêmement critique (...) On peut être amené à fermer du jour au lendemain. Comme ça s'était passé pour Manufrance où jusqu'au dernier moment, on avait fait croire qu'il y avait un espoir de reprise. Les salariés sont extrêmement inquiets", ajoute-t-il.

Plus que tout, les salariés se sont sentis "trahis" par le groupe, indique un représentant syndical CGT et porte-parole de l'intersyndicale.

Les salariés redoutent aujourd'hui un démantèlement de l'enseigne centenaire. Les récentes annonces autour de la vente de l’ensemble des supermarchés et hypermarchés Casino n'ont fait qu'accroître l'inquiétude du personnel. À Saint-Etienne, Casino est le premier employeur privé de la ville. Cette manifestation est la première depuis un quart de siècle. À l'époque, les salariés avaient défilé contre une OPA hostile et pour soutenir l'actuel dirigeant, Jean-Charles Naouri.

Le cortège s'est élancé vers 10h30 depuis le siège de Casino en direction de l'hôtel de ville, où les représentants de l'intersyndicale doivent rencontrer le maire Gaël Perdriau.

9h-10h Le rassemblement devant le siège du groupe à Saint-Etienne

 Les cinq organisations salariales du groupe Casino ont déposé un préavis de grève qui court jusqu'au 31 décembre. 

Un groupe surendetté

Étranglé par son endettement, le groupe s'est accordé avec ses créanciers fin juillet sur une restructuration très importante de sa dette, accompagnée d'un changement d'actionnariat. Un trio devrait en prendre le contrôle : le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, le Français Marc Ladreit de Lacharrière et le fonds britannique Attestor. L'actuel PDG et premier actionnaire, Jean-Charles Naouri, arrivé à la tête du groupe au début des années 90, devrait passer la main au premier trimestre 2024.

Le groupe est étranglé par un insoutenable endettement. Une dette abyssale : on parle de 12 milliards d'euros. Le groupe a dû se résoudre à étudier des "marques d'intérêt" de concurrents pour le rachat d'hypermarchés et de supermarchés, faisant craindre aux syndicats une "vente à la découpe".

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Casino, c'est 125 ans d'histoire à Saint-Etienne et aujourd'hui une dette colossale. Casino est en procédure de sauvegarde depuis octobre 2023. ©France Télévisions

 

Ce qu'il faut savoir...

En 2023, le groupe Casino célèbre ses 125 ans d'existence. L'enseigne a été fondé à la fin du 19ᵉ. C'est même la plus ancienne chaîne de magasin français, créé à Saint-Etienne en 1898 par Geoffroy Guichard. Le groupe Casino, une petite épicerie familiale devenue en un siècle un mastodonte de la grande distribution, fait partie de l'histoire de Saint-Etienne. Le groupe est lié au légendaire club de football des Verts, l'ASSE. Le stade porte le nom de son créateur.

L'attachement des Stéphanois au groupe Casino

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Entre Casino et Saint-Etienne, c'est une longue histoire de 125 ans. Le groupe a été fondé dans le centre de la ville et de nombreux stéphanois ont travaillé ©France Télévisions

Tout commence par le rachat, pour une bouchée de pain, d'un casino lyrique, fermé pour cause de mœurs légères en 1858. L'établissement, qui est transformé en épicerie, n'en conservera que le nom : "Casino". Situé rue des Jardins à Saint-Etienne, le commerce est repris en 1892 par Geoffroy Guichard. Commence une politique d'expansion, visionnaire. Pour se protéger de la concurrence, les fondateurs ont l'idée de créer leur marque et de la déposer dès 1904. L'enseigne possède déjà 50 succursales au tournant du siècle. Très vite, en 1906, les fondateurs se lancent aussi dans la production : des usines de fabrication voient le jour et le nombre de produits estampillés "Casino" se développe très rapidement : épicerie, confiserie, charcuterie, vins, droguerie, etc. Les fondateurs éditent aussi un journal gratuit disponible en magasin, et lancent un système de fidélisation des clients par tickets. Avant la première guerre, l'entreprise stéphanoise pèse déjà très lourd avec ses 460 succursales dans la région de Saint-Etienne et de Clermont-Ferrand. Rien ne semble arrêter l'ascension du groupe : en 1939, Casino possède 1670 succursales et 839 concessions.

Si le groupe innove, il s'inspire aussi du modèle américain. Ainsi, en 1948, Casino ouvre sa première succursale en libre-service, inspirée du self-service d'outre-Atlantique. Et une décennie plus tard, ce sont 500 succursales qui ont déjà repris ce principe. En 1960, Casino crée à Grenoble le premier supermarché de France d'une surface de 700 m². En 1969, la première cafétéria Casino ouvre ses portes à Saint-Etienne et un an plus tard, le premier hypermarché naît à Marseille : 16 000 m². Casino change d'échelle.

Sous la direction de Jean-Charles Naouri, qui arrive à la tête de Casino au début des années 90, le groupe stéphanois, devenu une Société Anonyme à Directoire et Conseil de Surveillance (SADDCS) s'associe à la société Rallye, dont Jean-Charles Naouri est le principal actionnaire. En 1997, le groupe rachète ses concurrents Franprix et Leader Price, fait une entrée dans le capital de Monoprix. Le développement à l'international marque les années 2000 : le groupe est présent dans plus de 17 pays, notamment en Amérique latine. Mais Casino qui comptait encore, fin 2022, près de 200.000 salariés dont 50 000 en France, traverse de très fortes turbulences.

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