La Loire et le Jura. Deux départements en France ne répondront pas à l'engagement d'Emmanuel Macron. Pas de prime Covid, pas un centime de plus ne sera versé par le département ligérien aux milliers de salariés du secteur social. Décryptage.
Le département de la Loire a choisi. Ce sera un plan de relance économique à 15 millions d'euros pour l'emploi, plutôt que le versement de la prime Covid aux aides à domicile, comme promis par Emmanuel Macron. Le choix a été acté lors de la présentation des orientations budgétaires départementales pour 2021.
L'équivalent de 3000 temps plein... sans rien
Le département de la Loire compte 5.000 salariés en tant qu'aides à domicile. L'équivalent de 3.000 temps plein, éligibles à la prime Covid, promise par le président de la République. Le dispositif avait été confirmé lors d'une visite à Montbrison, le 5 octobre 2020, par la ministre déléguée à l'Autonomie, qui évoquait alors un financement moitié/moitié entre État et Département.
Mais voilà, deux mois plus tard, Georges Ziegler, a fait son choix. Le président du département de la Loire a préféré affecter 15 millions d'euros, prévus pour le désendettement, pour un plan de relance économique... sans retenir la prime Covid. Le responsable de l'éxécutif ligérien s'explique. "Je pensais qu'il fallait élargir le spectre, aller vers d'autres professions qui sont tout aussi méritantes... Et là, on atteignait des sommes invraisemblables pour nous, de l'ordre de 5 millions d'€."
Interrogé ce lundi 21 décembre 2020, Georges Ziegler justifie sa vision sur le long terme. Le budget de fonctionnement du département de la Loire, est consacré à 67% au social, dit l'élu sous l'étiquette Les Républicains.
On ne verse pas la prime. Mais durant l'année 2020, on a continué à maintenir les structures, en payant des prestations qui n'étaient pas exécutées en raison des conditions sanitaires. On en a mis pour 1.3 millions d'euros !
L'opposition fustige
Dès l'annonce de ces orientations budgétaires, forcément, l'opposition est montée au créneau. Pierrick Courbon ne s'en prive pas. Certes, le conseiller départemental socialiste reconnaît les difficultés financières réelles de la collectivité. Mais il n'en condamne pas moins le choix politique.
Ce qu'a fait le département de la Loire en 2020, au plus fort de la crise, c'est d'acheter des canons à neige pour la station de Chalmazel, ou d'augmenter de 25% les contributions des collectivités pour financer le déficit de l'aéroport d'Andrézieux-Bouthéon qui, aujourd'hui, ne sert strictement à rien.
Ce choix politique fait grincer des dents. Y compris du côté de La République en Marche de la Loire. Sur les réseaux sociaux, la réponse de la majorité gouvernementale a fusé : "l'argument est le manque d'argent, mais bizarrement, plus de 100 départements l'ont fait !!"
Deux départements ne se sont pas engagés dans le versement de la prime Covid aux aides à domiciles.
— En Marche-Loire (@RMarche42) December 19, 2020
L’argument du président du conseil départemental est le manque d’argent, mais bizarrement plus de 1️⃣0️⃣0️⃣ départements l’ont fait !! pic.twitter.com/ceoFQTTemh
"Qui décide, paye"
Face à la critique, Georges Ziegler fait face. Argumente sur la base des promesses non-tenues par l'État, notamment en ce qui concerne le financement du RSA. En 2020, la Loire a enregistré quelque 2.000 bénéficiaires supplémentaires du Revenu de Solidarité Active. Et selon le président du département ligérien, "il y avait un accord pour être aidé à l'euro près". Emmanuel Macron a décidé d'augmenter le RSA, mais les subventions, elles, n'ont pas suivi.
L'État nous doit 36 millions d'euros. Si les promesses étaient respectées, on aurait pu faire tout ce dont on avait envie.
Prime accordée sur fonds propres
Pour ne pas décevoir ses 1120 salariés, l'association de maintien, d'aide et soins à domicile de la Loire, AIMV, a choisi d'octroyer elle-même la prime Covid. Jusqu'à 400 euros, sur fonds propres, pour ses salariés. Mais, le geste ne doit pas cacher la réflexion, que la directrice générale juge nécessaire.
C'est là que les politiques ont un rôle à jouer, selon Christine Labouré. Au lieu de penser prime, pourquoi ne pas songer à revaloriser les salaires, s'interroge la directrice générale de l'AIMV.
Pourquoi ne pas rémunérer les salaires au juste titre ? Qu'ensuite il y ait une pandémie, cela fait partie de notre métier. Et là, on ne parlerait plus de prime. Faut juste qu'on réévalue correctement une convention collective qui date d'Hérode !
À quand la réforme sur le grand âge et l'autonomie ?
Sur le site du ministère des Solidarités et de la Santé, vous pourrez lire sur le sujet cette présentation : "en 2060, le nombre de personnes en perte d’autonomie atteindra 2,45 millions, contre 1,6 million en 2030. Face à ce véritable défi démographique, Agnès Buzyn a lancé le 1er octobre 2018 une vaste concertation sur le grand âge et l’autonomie en vue d’une réforme ambitieuse en 2019 dont découlera un projet de loi".
Depuis cette annonce de 2018, le projet a été maintes et maintes fois repoussé. La réforme se chiffre en milliard d'euros. Le journal Les Echos fait état d'un calendrier législatif chargé. Et même si la ministre déléguée à l'Autonomie, Brigitte Bourguignon, espère toujours présenter un projet de loi grand âge, cet été, il n'est pas certain qu'il voit le jour en 2022.