Victimes d'une mode sur les réseaux sociaux, des servals abandonnés trouvent refuge dans la Loire

À Saint-Martin-La-Plaine dans la Loire, un refuge accueille des animaux exotiques abandonnés par leurs propriétaires. Victimes d'une mode alimentée par des influenceurs peu soucieux du bien-être animal, les servals et autres bébés félins sont récupérés par une équipe de soigneurs et vétérinaires.

Buzz, Thor ou Sherkhan ont été achetés illégalement puis abandonnés par leurs propriétaires. Ces servals, petits félins d'Afrique, ont été recueillis par un refuge de la Loire.

Une mode aux dépens des animaux

"Il y avait la mode des bébés tigres et des bébés lions. Depuis deux ans, c'est la mode du serval", regrette auprès de l'AFP Jean-Christophe Gérard.

À bord de sa voiturette électrique, ce vétérinaire emprunte quotidiennement le chemin tortueux qui mène de son lieu de travail, le zoo de Saint-Martin-la-Plaine jusqu'aux cages de l'association Tonga Terre d'Accueil.

Créé en 2008, ce site de deux hectares sert de refuge à près d'une centaine de félins et de primates délaissés par des particuliers ou des cirques, parfois par crainte des foudres de la justice.

En 2021, les Leptailurus servals étaient au nombre de cinq. Ils sont aujourd'hui une trentaine.

Le vétérinaire surveille actuellement une petite dizaine de ces petits félins, cousins lointains du chat, grandes oreilles et long cou. Les autres ont été placés dans des zoos.

Un animal inadapté pour la vie en appartement

L'association s'emploie également à renvoyer les petits félins dans leur espace naturel, en Afrique.

Cependant, "dès qu'un animal part, il y en a tout de suite un autre qui prend sa place",poursuit Jean-Christophe Gérard. Car "ce n'est pas du tout un animal qui est adapté pour vivre en appartement",mais une espèce sauvage avec "un instinct qui reste fort et ancré".

Collé à la vitre de son enclos, un jeune serval d'un an le fixe avant de "cracher" sur lui quand il s'approche. Haut sur pattes, avec sa silhouette élancée et ses taches noires sur une robe jaune fauve, ce félidé d'Afrique séduit sur les réseaux sociaux, souvent présentés dans les bras de stars qui contribuent à sa popularité. À l'image du chanteur canadien, Justin Bieber qui expose sur Instagram ses deux Savannah, issus de l'hybridation d'un serval avec une chatte.

"Les gens se mettent en valeur près d'un serval et il y a une grosse demande", peste Pierre Thivillon, fondateur en 1972 du zoo de Saint-Martin-La-Plaine.

Vendus en France de 4 000 à 10 000 euros

Issus de trafics provenant d'élevages de Russie, de Biélorussie ou de République tchèque, les servals se vendent en France de 4.000 à 10.000 euros, le plus souvent sous le manteau.

Les revendeurs les livrent petits comme des chats domestiques, le plus souvent avec une puce électronique les présentant frauduleusement comme tels. La ressemblance de leur robe mouchetée avec celles des chatons de race "Mau égyptien, Bengal ou Savannah" nourrit la confusion des autorités de contrôle qui peinent à les identifier.

En grandissant, leur poids peut atteindre 20 kilos et les choses se gâtent pour les propriétaires non initiés aux mœurs de cette espèce sauvage carnivore.

Les animaux finissent abandonnés, quand ils ne sont pas saisis directement. L'association, en partenariat avec les sociétés Labofarm et Genome-Recherche & Diagnostic, les récupère et les identifie pour savoir s'ils sont des servals "purs" ou hybrides.

Trois ans de prison et 150 000 euros d'amendes

Au-delà du commerce illégal, ce félin est "menacé en Afrique par la disparition de son habitat et le braconnage pour sa fourrure", explique à l'AFP Bérengère Monvoisin, inspectrice environnement à l'Office français de la biodiversité (OFB). "Depuis 2017, il y a six saisies de servals par an en moyenne avec un pic en 2020 pendant le Covid. Mais depuis le début de l'année, il y en a eu plus d'une dizaine", déplore-t-elle.

En France, leur détention est soumise à des autorisations administratives strictes tant pour les particuliers que pour les professionnels, qui dans le cas contraire risquent une peine maximale de trois ans de prison et 150.000 euros d'amende. Le 20 novembre, un gérant de discothèque à Valenciennes (Nord) a été condamné à 500 euros d'amende avec sursis pour la détention illégale d'un serval dans les locaux de l'établissement. En juillet 2021, la justice a condamné à 10 mois de prison et 15.000 euros d'amende un propriétaire de serval connu comme le "Roi de la jungle" sur YouTube où il vante ce "seul félin qui a le même ancêtre que le lion".

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