Au sommet du Puy-de-Dôme, des chasseurs de nuages

La tête dans les nuages, ils traquent les gaz à effet de serre: depuis 20 ans, les chercheurs de la station météorologique du Puy-de-Dôme collectent des données sur l'atmosphère et le changement climatique. Une mission qui leur a valu la reconnaissance des Nations Unies.

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Juché à 1.465 mètres d'altitude, l'observatoire du Puy-de-Dôme est le premier site français à recevoir le label Global GAW (Global Atmosphere Watch) décerné par l'Organisation météorologique mondiale. Il entre ainsi dans le club très fermé des trente stations de référence mondiale pour l'étude de l'atmosphère, à l'égale
d'Ushuaïa en Argentine, de Tamanrasset en Algérie ou de Jungfraujoch en Suisse.

Le plus vieil observatoire de France dont les premières mesures remontent à Blaise Pascal en 1648 (il y perça les secrets de la pression atmosphérique) a obtenu cette précieuse distinction grâce à la fiabilité et à l'unicité de ses mesures. "On réalise un suivi sur le long terme des paramètres de pollution liés au changement climatique. Les longues séries temporelles que nous avons réalisées nous ont notamment permis d'observer une tendance à l'augmentation du CO2 dans l'atmosphère", expose Karine Sellegri, directrice de recherche au CNRS.

Monoxyde et dioxyde de carbone ou d'azote, ozone, carbone-suie, gaz à effet de serre... Les équipes mesurent et analysent pas moins de 70 paramètres atmosphériques. "Quelques heures après l'éruption du volcan islandais Eyjafjallajökull, nous avons constaté la présence dans l'air de dioxyde de soufre", souligne Aurélie Colomb de l'Observatoire de Physique du Globe de Clermont-Ferrand (OPGC).

A six mois de la grande conférence sur le climat (COP21) en décembre à Paris, leurs travaux devraient nourrir les débats scientifiques sur le rôle des nuages dans le changement climatique. "On ne sait pas aujourd'hui comment ils réagissent aux émissions de particules fines. Il est difficile de déterminer avec quelle amplitude
celles-ci participent au refroidissement de la planète"
, ajoute Karine Sellegri.

Un aspirateur à nuages 

Lorsque ces particules, provenant de l'activité humaine et notamment du trafic routier, "entrent en contact avec le nuage, elles fractionnent les gouttes qui le constituent en de multiples gouttelettes. Dès lors, il ne pleuvra plus au même endroit, ni avec la même intensité", précise cette digne héritière de Pascal.

Tutoyant les cumulus et autres stratus la moitié de l'année, les chercheurs ont par ailleurs installé sur le toit de la station un "aspirateur à nuages", unique en France. Un petit moteur relié à un cylindre métallique via deux tuyaux en plastique permet de pomper la nuée située à proximité. Le contenu liquide du nuage est ensuite versé
dans une fiole puis analysé en laboratoire. Objectif: détecter la présence de micro-organismes.

"Une gouttelette, c'est un vrai réacteur chimique. On y trouve des bactéries, des pollens, des levures, des champignons, qui vont modifier la composition chimique et physique du nuage", relate Laurent Deguillaume, physicien-adjoint à l'OPGC. "Ces micro-organismes sont capables notamment de transformer les gouttes en cristaux de glace, qui vont à leur tour provoquer des précipitations."

Outre cet aspirateur, la station météorologique auvergnate est dotée d'une soufflerie de recherche, très utile pour l'industrie aéronautique. Airbus, Boeing ou encore Rolls-Royce font appel à eux pour tester leurs sondes.
"Après avoir capturé le nuage, on crée une dépression pour voir comment le givre se forme sur certaines pièces", détaille à son tour Guy Febvre, docteur en physique, tout en activant la bruyante motorisation. Autre avantage  indéniable de ces simulations: le coût "bien moins onéreux que des essais en plein vol", assure ce chercheur, les yeux indéniablement tournés vers le ciel.

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