Depuis 33 ans à Clermont-Ferrand, le festival Traces de Vies propose une semaine d’immersion dans un cinéma singulier et multiple : le film documentaire. Il nous fait parfois voyager au bout du monde mais sait aussi attirer notre regard sur ceux qui sont plus proches de nous. Dans « La disgrâce » le réalisateur Didier Cros recueille le témoignage de cinq personnes, qu’un accident ou une maladie ont défiguré, et interroge notre propre tolérance.
Au festival Traces de Vies à Clermont-Ferrand, il y a des films et des rencontres, du 26 novembre au 2 décembre. Le réalisateur du film « La disgrâce » est venu présenter les histoires de Gaëlle, Stéphane ou Jenny. Tous ont été victimes d’un accident ou d’une maladie qui a complétement transformé leur visage. L’une d’elle raconte : « Tout le temps, ma maman me tendait le miroir et elle me disait « Regarde toi ». Je prenais le miroir et je l’enlevais, parce que je n’acceptais pas. » Des lycéens ont appris à regarder autrement leurs visages abimés par un accident ou une maladie, comme Flavie Mirio élève de première : « Je ne dirais pas qu’on avait peur avant de les rencontrer mais maintenant, on sait davantage comment les aborder, comment vivre avec, tout simplement. »
"Qu’on le veuille ou non, la différence attire l’œil"
Gaëlle est venue témoigner : le 13 novembre 2015, elle a perdu son compagnon et a été gravement blessée, elle a déjà subi 47 opérations. « J’ai été blessée au Bataclan. J’ai reçu une balle dans le visage et dans le bras. On vous dit que votre bras est mort, que vous n’avez plus de visage… On vous dit que votre bras est déchiqueté et qu’a priori vous ne l’aurez plus », raconte-t-elle avec émotion.
Accepter de se montrer, de témoigner n’était pas facile. Mais elle s’est prêtée au jeu du film dans l’espoir de faire changer les mentalités : « C’est aussi pour faire réfléchir les gens qui dévisagent, pour qu’ils se posent des questions. Pourtant, je fais partie de ces gens qui regardent quand quelque chose les perturbe dans la rue par exemple. Qu’on le veuille ou non, la différence attire l’œil. »
Mettre en valeur les témoins
Demander à des gens abimés du visage de figurer dans un film, est extrême. Didier Cros a trouvé un dispositif original : chacun est pris en photo au studio Harcourt, comme une star. « Je souhaitais éviter une approche naturaliste dans le film, même si, spontanément, c’est ce qu’on aurait pensé être le moins voyeuriste. Suivre les témoins dans leur recherche d’emploi ou de l’amour, dans la lumière crue du quotidien, cela aurait été plus dévalorisant. » Le cinéma documentaire pose un regard subjectif sur le réel. Et jusqu’au 2 décembre, le festival Traces de Vies déroule ces histoires d’autres vies que la vôtre.
Les projections auront lieu dans les salles Boris Vian et Jean Cocteau de la Maison De La Culture (Rue Abbé de l’épée, 63000 Clermont-Ferrand), salle Georges Conchon (rue Léo Lagrange, 63000 Clermont-Ferrand) et au Moulin de l’Etang (Avenue de la République, 63160 Billom). La séance, en tarif plein, coûte 7 euros, mais le festival propose également des abonnements et des pass. Les tarifs sont détaillés ici. Le programme du festival est disponible sur le site internet.