Après 3 renvois, le procès de Jason Lopez a débuté dans une ambiance particulière jeudi 16 janvier au tribunal de Clermont-Ferrand. Alors qu'il est poursuivi, notamment, pour l’enlèvement de son fils en 2017, son conseil étant gréviste, 26 avocats en "grève du zèle" ont assuré sa défense.
Etrange début d’audience au tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand, jeudi 16 janvier où comparaît Jason Lopez, poursuivi pour "arrestation, enlèvement, séquestration
ou détention arbitraire", "évasion d'un détenu bénéficiaire d'une permission de sortir en récidive" et "violence par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire de la victime". Ce sont pas moins de 26 avocats qui ont assuré au pied levé sa défense, en l'absence de son avocat attitré, en grève.
Alors que Jason Lopez est sous bonne garde dans le box des prévenus, une vingtaine d’avocats sont présents dans la salle, arborant tous des autocollants « avocats en grève » sur leurs robes. Imperturbable la Présidente, Marie de Naurois, examine les demandes de renvois des affaires qui doivent être jugées dans l’après-midi. Arrive celle qui concerne Jason Lopez. Le bâtonnier de Clermont-Ferrand Maitre Philippe Gatignol, présent dans la salle d’audience au côté des avocats grévistes, signale qu’en raison de la grève des avocats, le Bâtonnier de Moulins Dominique-Jean Lardans, ne pourra pas être présent pour assurer la défense de Jason Lopez ce jeudi.
Bras de fer pour ou contre la tenue du procès
Laure Lehugeur procureur de la République adjointe, numéro deux du parquet prend alors la parole : « Je m’oppose avec force à toute demande de renvoi. Le dossier fait l’objet d’une situation particulière. Il a déjà été renvoyé trois fois. Le 10 octobre 2019 la dernière fois. Un nouveau renvoi pourrait reporter le jugement à maximum novembre 2020. Un délai qui n’est pas raisonnable ». La Présidente demande à Jason Lopez son avis. Très sérieusement, le prévenu dit qu’il est d’accord pour un renvoi, car il soutient la grève des avocats…. Le bâtonnier de Clermont-Ferrand prend la parole pour ce qui ressemble à un plaidoyer pour le renvoi des affaires. Il invoque plusieurs raisons. Tout d’abord la défense du régime de retraite des avocats, mais aussi le droit à une justice équitable car en l’absence de son avocat, Jason Lopez aura un avocat commis d’office.
Après délibération, la Présidente annonce qu’il ni aura pas de renvoi car Jason Lopez vient de Mont-de-Marsan, où il est actuellement incarcéré pour une autre affaire. Sa comparution devant le Tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand demande trois jours de travail. Une autre affaire commence à être jugée avant que le défenseur de Jason Lopez vienne de Moulins ou qu’un avocat commis d’office soit désigné par le bâtonnier. Les avocats grévistes sortent de la salle pour préparer leur riposte…
Une "grève du zèle"
"Monsieur Lopez a demandé à être défendu. J'ai donc désigné 19 confrères en grève", explique à l'AFP Me Philippe Gatignol, le bâtonnier de Clermont-Ferrand. "Nous intervenons pour faire une défense digne et de qualité. Ce n'est en aucun cas du cirque", insiste-t-il. "Je déplore que ça tourne au rapport de force dans la juridiction", ajoute le
bâtonnier.
"On a préparé les conclusions et nous allons plaider chacun notre tour, les 19 avocats", raconte Me Sabrina Oulmi qui reconnaît qu'il s'agit là d'une "grève du
zèle". Finallement, ils seront beaucoup plus.
A 18 heures, alors que la première affaire est sur le point d’être jugée, à l’extérieur de la salle d’audience, une trentaine d’avocats du barreau de Clermont-Ferrand s’apprêtent à être commis d’office pour défendre Jason Lopez.
Après une suspension, l’audience reprend pour donner le jugement de la première affaire. Il est 19 heures, l’audience dure depuis déjà 5 heures. Dans la salle sont aussi présents une trentaine d’avocats arborant un rabat rouge en signe de colère. Des syndicalistes qui se battent contre le projet de réforme des retraites sont aussi présents. L’heure de l’affrontement a sonné entre les avocats grévistes et la Présidente du Tribunal Correctionnel.
De vifs échanges
Le bâtonnier clermontois prend la parole à la barre et égrène les 26 noms des avocats qu’il a décidé pour être commis d’office pour défendre Jason Lopez. La Présidente reste droite dans ses bottes et rappelle qu’une décision a déjà été prise et que l’affaire est retenue. De vifs échanges ont lieu entre les ténors du barreau clermontois d’un côté, de l’autre la Présidente et la Procureur de la République adjointe. L’ambiance est surréaliste. A 19 heures 35, le procès commence dans une salle où la tension est palpable… Les avocats plaident à tour de rôle, s’invectivent avec la Présidente et la Procureur, les gens hurlent, c’est la cacophonie, on se croirait dans une pièce ce théâtre….
Comme on pouvait s'y attendre, l'audience a été suspendue peu après. Elle reprendra vendredi dès 9 heures.