C'est une immersion totale au sein du CHU de Clermont-Ferrand que propose le film de Marion Angelosanto. "La fabrique du soin" nous emmène dans les entrailles de l'hôpital, des sous-sols au dernier étage à la rencontre des personnels et de leur direction. Un film choral qui décrit un hôpital-entreprise coincé entre injonctions économiques et fabrication du soin. L'hôpital comme vous ne l'avez jamais vu, ni entendu c'est dans La France en vrai sur France 3.
Que dire de plus sur l'hôpital public que nous ne savons déjà ? Les contraintes budgétaires portées par l'économie libérale ? Le manque de personnels ? Le manque de lits ? La surchauffe des services de réanimation en plein Covid ? Les piquets de grève ?
Tout cela a été montré et raconté des centaines de fois. Mais ce qui n'a jamais été fait, c'est filmer l'hôpital comme une société au travail. Et c'est tout le propos du film de Marion Angelosanto. En pleine crise sanitaire et politique, le CHU de Clermont-Ferrand lui a ouvert ses portes, toutes ses portes. Ici l'hôpital se raconte à la première personne dans la voix de Daniel Pennac et s'incarne dans les visages de Laëtitia, cadre de santé, de Christophe délégué CGT, de Benoît chirurgien, de Mathieu pédiatre-réanimateur, de Didier directeur général et de bien d'autres encore.
Le CHU de Clermont-Ferrand, réparti sur trois sites dans la ville, accueille 2 000 patients par jour. Il emploie 7 000 personnes, des magasiniers à la direction en passant par les cuisines, la blanchisserie et le personnel soignant.
10% du personnel soignant est en arrêt maladie et seulement un personnel sur deux est remplacé.
Pour diriger un hôpital public, faut avoir la foi. Y'a des jours où c'est à pleurer.
Directeur général du CHU
" Pour diriger un hôpital public, il faut vraiment avoir la foi. Il y a des jours où c'est à pleurer. C'est vraiment très dur. C'est comme tenir un front avec un seul régiment alors qu'on a besoin de 18 divisions. Pourtant on tient le front et une fois encore on va s'épuiser à le tenir" confie le directeur général du CHU.
De l'épuisement, il y en a beaucoup. Tout comme il y a de la débrouille, du renoncement et de la souplesse. Beaucoup de souplesse même chez les soignants.
On y arrive toujours...
Une cadre de santé
Parce que le miracle est là, dans cette petite phrase de Laëtitia, cadre de santé en chirurgie digestive courant après les lits : " Prendre soin des gens, c'est une énergie folle. Nos patients ne sont pas des boites de petits pois ! Mais on y arrive toujours..."
Dans l'hôpital d'aujourd'hui, il faut produire du soin à la chaine et sur mesure. Pour opérer il "faut prendre un ticket à la régulation du bloc et attendre qu'il y ait une place" comme dit Benoît professeur en chirurgie.
Malgré toutes les tensions, les négociations, les revendications ce qui se vit au milieu de tout ça, ce sont l'humanité, la fierté, "l'amour du métier et la solidarité parce que nous sommes une équipe" dit Rose-Marie, cadre de santé, s'arrachant la tête dans ses plannings.
Rappeler que le cœur de métier de l'hôpital public est de soigner du premier au dernier souffle, de former les nouvelles générations de soignants et de trouver les moyens de les garder... Montrer de près une réalité où l'humanité tente de coexister avec les injonctions contradictoires de santé publique. "La fabrique du soin" est tout cela. Un film utile et remarquable.
"La fabrique du soin" un film de Marion Angelosanto (coproduction Crestar/La clairière ouest/ Francetv), disponible en replay sur france·tv