Les élections européennes font office de bilan à mi-parcours pour la majorité présidentielle. Si l’Auvergne a d’abord été séduite par la proposition d’Emmanuel Macron, les derniers scrutins semblent montrer un déclin de cet intérêt.
Les élections européennes sont une échéance très attendue par la majorité présidentielle. Une sorte de sondage de popularité, à mi-mandat, pour le président Emmanuel Macron. En Auvergne, l’engouement suscité au départ par son projet politique est nuancé, en fonction des départements, indique Mathias Bernard, politologue à Clermont-Ferrand : “On va avoir des situations différentes selon les départements. On va retrouver 3 groupes de départements. Au début du Macronisme, le Puy-de-Dôme a été très réceptif à la proposition politique d'Emmanuel Macron en s'appuyant sur 2 viviers, sur 2 traditions historiquement fortes dans le département du Puy-de-Dôme. D'abord, la tradition de gauche modérée. Une partie de l'électorat de gauche modérée, notamment l'électorat urbain à Clermont-Ferrand, mais aussi des petites communes, va basculer dans le vote Macron.”
Un vivier électoral de centre-droit
Le second vivier important dans le Puy-de-Dôme a été l’électorat de centre-droit, le vote démocrate-chrétien et MoDem. “Le Puy-de-Dôme était aussi une terre d'implantation de ce vote, notamment dans une partie des campagnes mais aussi dans la métropole clermontoise avec la personnalité de Michel Fanget. Quand on regarde l'élection européenne de 2014, la liste MoDem-UDI était à plus de 11%”, précise Mathias Bernard. Il explique qu’il s’agit d’un score extrêmement élevé par rapport aux autres départements auvergnats, où cette liste Modem-UDI était en dessous de 10%, comme dans la plupart des départements français. Cet engouement s'est traduit par des succès importants dans la séquence 2017-2019. En 2017, la majorité macroniste avait obtenu 3 circonscriptions sur 5 aux législatives. Lors des européennes de 2019, la liste Renaissance était en tête avec plus de 21%, ce qui n’était pas le cas dans les autres départements ou pas de façon aussi significative.
"Renaissance s'est coupée d'une partie de son aile gauche"
Selon le politologue, la “droitisation progressive” du positionnement macroniste a limité le recours au vivier électoral du centre-gauche ou de la gauche, “ce qui explique par exemple que, en 2022, la première circonscription, une circonscription traditionnellement de gauche, a été perdue par En Marche et gagnée par la France Insoumise”, rappelle-t-il. “Dans les circonscriptions plus rurales, il y a un électorat de centre-droit, ajoute Mathias Bernard. La 3e et la 4e, c'est là où, finalement, Renaissance a mieux résisté. Renaissance, comme à l’échelle nationale, s'est un petit peu coupée d'une partie de son aile gauche et s'est donc potentiellement affaiblie. Cet affaiblissement s'est aussi traduit par le fait que le mouvement n'a pas réussi à s'implanter. Que ce soit au sein du département ou lors des élections municipales, les résultats ont été quand même limités lors les scrutins intermédiaires locaux.”
Une difficile implantation dans l'Allier
Dans le département de l'Allier, Mathias Bernard constate une position plus difficile de Renaissance. “Le département n'est pas un département de tradition modérée ou centriste. On voit bien que les forces politiques dominantes sont, depuis maintenant pas mal de temps, d'abord le RN ou le FN. Dès 2014, la liste FN a été à plus de 20%. Ensuite, on a un vote de gauche plus radicale, communiste. De fait, on n'est pas sur un département de tradition modérée, donc le Macronisme a beaucoup de difficultés à s'implanter, sauf dans le bassin vichyssois où il a pu bénéficier du soutien d’élus comme Claude Malhuret. Il y avait eu en 2017 une députée élue sur la circonscription de Vichy mais c'était une implantation fragile. La députée, en 2022, a été battue par un candidat de droite plus traditionnelle.”
Une droite forte en Haute-Loire
Le Cantal et la Haute-Loire sont des terres où l'influence de la droite classique va contenir l'implantation du Macronisme. “On voit bien par exemple que dans la Haute-Loire, la droite est très forte, portée également par la personnalité de Laurent Wauquiez, qui tend à polariser la droite classique dans ce département qui avait été longtemps de droite modérée. Sous l'influence de Laurent Wauquiez, on a une droite qui s'est droitisée, si je puis dire. On est passé d'une tradition de centre-droit à une droite traditionnelle”, explique Mathias Bernard. De fait, Renaissance n'est pas du tout arrivée à s'implanter en Haute-Loire.
Un Cantal disparate
Sur le Cantal, “c'est quand même un petit peu différent”, indique le politologue. Une droite forte, tempère ici aussi l’évolution de Renaissance, mais le département comporte des disparités internes : “La liste de droite avait obtenu près de 17% en 2019, ce qui était un score très important. Renaissance a quand même trouvé un électorat dans le bassin d'Aurillac avec l'influence radicale de gauche de personnalités comme Jacques Mézard ou Catherine Amalric, qui d'ailleurs est sur la liste de Valérie Hayer. Il y a effectivement, je dirais, des influences personnelles radicales de gauche qui ont permis à Renaissance d'avoir, dans un contexte peu favorable, un résultat électoral qui avait été plutôt positif en 2019. Avec le retrait de la politique active de Jacques Mézard, à voir comment les choses vont évoluer. Il a été ministre d'Emmanuel Macron, ça a compté, évidemment. Aujourd'hui il est dans un positionnement moins politique. Il sera intéressant de voir dans quelle mesure le bon score de Renaissance en 2019 était lié à la personnalité de Mézard et s’il perdure dans un contexte un peu différent.”
Un territoire globalement "peu favorable"
Selon lui, l'Auvergne n'est globalement pas un territoire favorable à ce qu’est l'équation du Macronisme. “Elle n'est pas favorable parce que d'une part, les villes de ce territoire et notamment Clermont-Ferrand ont une tradition qui est marquée à gauche. Or, c’est l'impact dans les villes qui a donné beaucoup d'électeurs au Macronisme. Sur d'autres villes dont la sociologie est quand même plus bourgeoise, le Macronisme conserve un poids important. La sociologie des villes auvergnates n'est pas tout à fait la même que la sociologie des villes qui donnent beaucoup de voix à Emmanuel Macron ou à Renaissance. Clermont-Ferrand, par rapport à la moyenne nationale, présente une sous-représentation des catégories socioprofessionnelles supérieures. D'autre part, le poids important de la ruralité. On sait bien que le monde rural n’est pas un territoire favorable à Emmanuel Macron et à Renaissance, y compris dans ce qu'on a pu appeler France périphérique qui a notamment alimenté le mouvement des gilets jaunes.”
L’importance du rural ou du semi-rural en Auvergne et la sociologie particulière des villes font que, selon Mathias Bernard, la liste Renaissance n’a “pas beaucoup à attendre” des départements auvergnats en termes de performance électorale. À l'exception d'une période déterminée particulière, de 2017 à 2019, ce territoire n'a jamais été, d’après lui, une zone de force pour ce mouvement politique.
Voici les 38 listes en lice pour ces élections :
1. Pour une humanité souveraine
2. Pour une démocratie réelle : décidons nous-mêmes !
3. La France fière, menée par Marion Maréchal et soutenue par Eric Zemmour
4. La France insoumise - union populaire
5. La France revient ! Avec Jordan Bardella et Marine Le Pen
6. Europe écologie
7. Free Palestine
8. Parti animaliste - les animaux comptent, votre voix aussi
9. Parti révolutionnaire communistes
10. Parti pirate
11. Besoin d’Europe
12. Pace - parti des citoyens européens, pour l'armée européenne, pour l’Europe sociale, pour la planète !
13. Équinoxe : écologie pratique et renouveau démocratique
14. Ecologie positive et territoires
15. Liste Asselineau-Frexit, pour le pouvoir d'achat et pour la paix
16. Paix et décroissance
17. Pour une autre Europe
18. La droite pour faire entendre la voix de la France en Europe
19. Lutte ouvrière le camp des travailleurs
20. Changer l’Europe
21. Nous le peuple
22. Pour un monde sans frontières ni patrons, urgence révolution !
23. « Pour le pain, la paix, la liberté ! » présentée par le parti des travailleurs
24. L’Europe ça suffit !
25. Non ! Prenons-nous en mains
26. Forteresse Europe - liste d'unité nationaliste
27. Réveiller l’Europe
28. Non à l‘UE et à l'OTAN, communistes pour la paix et le progrès social
29. Alliance rurale
30. France libre
31. Europe territoires écologie
32. La ruche citoyenne
33. Gauche unie pour le monde du travail soutenue par Fabien Roussel
34. Défendre les enfants
35. Écologie au centre
36. Démocratie représentative
37. Esperanto langue commune
38. Liberté démocratique
A lire aussi : Européennes 2024 : quelles sont les 38 listes en lice pour le scrutin du 9 juin ?