Les élections européennes auront lieu dimanche 9 juin, un test pour la liste socialiste. Historiquement plébiscitée dans le Puy-de-Dôme, les divisions internes et la concurrence de Renaissance l’ont fortement affaiblie.
Les élections européennes approchent et la liste de Raphaël Glucksmann semble tirer son épingle du jeu. Malgré une déroute du parti socialiste depuis une douzaine d’années, des querelles internes et la concurrence de la majorité présidentielle, la liste PS monte dans les sondages. L’Auvergne et plus spécifiquement le Puy-de-Dôme est une terre de gauche modérée, devenant ainsi un bon mètre étalon des tendances de vote socialiste, avec quelques nuances selon les départements, explique le politologue Mathias Bernard : “En Auvergne, il y a 3 configurations. Il y a le Puy-de-Dôme qui est une terre historiquement socialiste et de gauche modérée. D'ailleurs, le département et le Conseil départemental n’ont été que de façon très courte tenus par la droite. Il l’est également depuis 2021 cela dit, c'est déjà un indice sur l'évolution, mais c'est quand même territorialement de gauche. On connaît la place du socialisme à Clermont-Ferrand, c’est une sorte de bastion de gauche modérée socialiste.”
Des disparités départementales
Dans l'Allier, le vote socialiste a longtemps été concurrencé par le vote communiste et les socialistes sont restés dans la moyenne nationale. “Il y a un vote à la gauche de la gauche qui est traditionnellement plus fort avec une concurrence, dans l'électorat populaire, du Rassemblement National depuis quelques années. L'installation dans l'Allier est plus inconfortable”, indique Mathias Bernard. Traditionnellement, la Haute-Loire et le Cantal sont des zones où les socialistes et la gauche en général sont dans une situation défavorable. “Quand on agrège les résultats à l'échelle de Auvergne, vu que les départements Haute-Loire et Cantal sont moins peuplés, ça n'apparaît pas forcément, nuance Mathias Bernard. Mais les résultats de la gauche socialiste y sont quand même plus faibles, en dehors de quelques poches comme par exemple la ville d'Aurillac dans le Cantal.”
Une double concurrence verte et centriste
Le Puy-de-Dôme est donc le département auvergnat où l'évolution récente a été la plus intéressante selon le politologue : “Le socialisme et l'influence socialiste y ont été, depuis 10 ans, doublement concurrencés, d'abord par le Macronisme dans l'agglomération clermontoise. Il y a eu au début, en 2017 et 2019, une porosité de l'électorat de centre gauche vers l'électorat d'Emmanuel Macron, d’En Marche et Renaissance. Il y a également une concurrence du vote écologiste. Dans le Puy-de-Dôme, en 2019, lors des Européennes, la liste Glucksmann avait fait 7,7%, ce qui était quand même un résultat extrêmement faible, pour ce qu'on considère comme un département d'influence socialiste.” En effet, les écologistes avaient fait 12,5% avec Yannick Jadot.
Des circonscriptions perdues
Il précise qu’en 2019 : “Renaissance s'était bien maintenue. C'est sans doute dans le Puy-de-Dôme que la crise, constatée à l'échelle nationale depuis la présidence Hollande, a été la plus spectaculaire. Ça s'est traduit aussi au niveau des élections législatives en 2017 comme en 2022, par le fait que désormais les socialistes n'ont pu sauvegarder qu'une circonscription sur 5, celle de Christine Pirès-Beaune. Jusqu'en 2017, ils en avaient 4 sur 5, et la 5e c'était André Chassaigne qui est également de gauche. Il y a quand même une difficulté du courant socialiste à se positionner par rapport à une crise nationale. L'un des intérêts du scrutin de dimanche prochain, c'est de voir si ce déclin qu'on voit très nettement depuis le milieu des années 2010 va être enrayé ou bien va se confirmer.”
Une "dynamique Glucksmann"
Sur les autres départements, les évolutions sont moins sensibles. “Lorsqu'on regarde les scores obtenus par les listes d'union de la gauche, dans l'Allier, on est sur des scores relativement faibles. En 2019, la liste France Insoumise était passée devant la liste Glucksmann, avec 6,7% contre 5,7% seulement. L’une des interrogations pour ce scrutin-là, c'est de voir si la dynamique Glucksmann qui apparaît dans les sondages va redonner à la gauche gouvernementale l'avantage. Il y a cet enjeu de compétition entre la gauche modérée gouvernementale et la gauche radicale. L’évolution récente avait donné l'avantage à la gauche radicale. Le seul député de gauche de l'Allier est un député communiste. Sur le Cantal et la Haute-Loire, les scores sont généralement beaucoup plus faibles pour la gauche gouvernementale que la gauche radicale. Dans ces 2 départements, les 4 députés appartiennent tous à la droite. Il n’y a aucun député de gauche sur ces 2 départements, qui sont également détenus, quasiment depuis la libération, par la droite modérée au niveau du Conseil Départemental. Le vote socialiste reste assez marginal, il n’y a pas eu d'évolution notable au cours des 10 dernières années à l'exception du bassin d'Aurillac”, précise Mathias Bernard.
Des divisions internes
Le déclin du vote PS est sensible, comme on le voit sur ce graphique présentant les résultats des élections présidentielles depuis 2002.
Pour Mathias Bernard, ce déclin est plurifactoriel : “Déjà, la crise d'identité à l'échelle nationale du socialisme au moment de la présidence Hollande, y compris au sein de la majorité et le clivage entre les modérés et les frondeurs. Ça a beaucoup affaibli le socialisme. Ce clivage pouvait alimenter des courants politiques qui étaient en dehors du PS, avec notamment une aile gauche un peu frondeuse qui a rejoint le parti Génération.s, fondé par Benoît Hamon, en particulier à Clermont, et avec une aile modérée qui a suivi Emmanuel Macron en 2017.” Le retour ou l’abandon du vote PS sera un des enjeux de ce scrutin. “Il est possible que les électeurs sociaux-démocrates modérés, qui avaient rejoint Macron et Renaissance, reviennent au vote PS face à la droitisation de Renaissance”, indique le politologue.
Un scrutin aux nombreux enjeux
Le vote PS dépendra aussi, selon lui, de l’appétence des électeurs pour le vote écologiste : “Le 2e élément qui est important, qu'on retrouve notamment dans la métropole clermontoise comme dans d'autres métropoles de la région telles que Lyon, Annecy ou Grenoble, c'est la montée des problématiques environnementales qu'a mieux su capter Europe Ecologie les Verts que le Parti Socialiste, englué dans des querelles internes. Une partie de cet électorat de gauche a alimenté la progression du vote écologiste. Ce qui serait intéressant en 2024, c'est de voir si cette progression du vote écologiste qu'on constate dans les métropoles depuis le milieu des années 2010 se confirme ou si au contraire elle se tasse.” Les électeurs auront le choix entre 38 listes, dimanche 9 juin, jusqu’à la fermeture des bureaux de vote.
Voici les 38 listes en lice pour ces élections :
1. Pour une humanité souveraine
2. Pour une démocratie réelle : décidons nous-mêmes !
3. La France fière, menée par Marion Maréchal et soutenue par Eric Zemmour
4. La France insoumise - union populaire
5. La France revient ! Avec Jordan Bardella et Marine Le Pen
6. Europe écologie
7. Free Palestine
8. Parti animaliste - les animaux comptent, votre voix aussi
9. Parti révolutionnaire communistes
10. Parti pirate
11. Besoin d’Europe
12. Pace - parti des citoyens européens, pour l'armée européenne, pour l’Europe sociale, pour la planète !
13. Équinoxe : écologie pratique et renouveau démocratique
14. Ecologie positive et territoires
15. Liste Asselineau-Frexit, pour le pouvoir d'achat et pour la paix
16. Paix et décroissance
17. Pour une autre Europe
18. La droite pour faire entendre la voix de la France en Europe
19. Lutte ouvrière le camp des travailleurs
20. Changer l’Europe
21. Nous le peuple
22. Pour un monde sans frontières ni patrons, urgence révolution !
23. « Pour le pain, la paix, la liberté ! » présentée par le parti des travailleurs
24. L’Europe ça suffit !
25. Non ! Prenons-nous en mains
26. Forteresse Europe - liste d'unité nationaliste
27. Réveiller l’Europe
28. Non à l‘UE et à l'OTAN, communistes pour la paix et le progrès social
29. Alliance rurale
30. France libre
31. Europe territoires écologie
32. La ruche citoyenne
33. Gauche unie pour le monde du travail soutenue par Fabien Roussel
34. Défendre les enfants
35. Écologie au centre
36. Démocratie représentative
37. Esperanto langue commune
38. Liberté démocratique
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