Jean-Marc Grangier : "Jane Birkin était une optimiste forcenée"

Directeur de la Comédie de Clermont-Ferrand de 2002 à 2021, Jean-Marc Grangier était un ami proche de Jane Birkin. Après son décès le 16 juillet 2023, il a accepté de nous parler d'elle.

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Directeur de la Comédie de Clermont-Ferrand de 2002 à 2021, Jean-Marc Grangier était un ami proche de Jane Birkin. "On avait une amitié très grande depuis plus de 20 ans, 25 ans ! On était très liés par beaucoup de choses, c’est une grande perte."

Comment s’est nouée votre amitié ?

"Je l’ai rencontrée quand elle a joué la pièce qu’elle avait écrite : “Oh ! Pardon tu dormais …” J’étais directeur de théâtre en Bourgogne, je l’avais programmée et on s’est rendus compte qu’on avait des atomes crochus ! Alors on s’est revus. 

Pour le passage de l’an 2000, je faisais chanter des personnalités sous un arbre dans la ville, je lui ai demandé et elle a accepté tout de suite ! On a pris des vacances ensemble … C’est quelqu’un dont j’ai toujours été très proche. "

"En Auvergne, elle avait un lieu de prédilection, à Saint-Floret : la chapelle du Chastel. Elle aimait beaucoup cet endroit. "

Jean-Marc Grangier

Par la suite, lorsque vous êtes devenu directeur de la Comédie de Clermont, elle est venue vous voir en Auvergne ?

"Elle aimait toujours venir en Auvergne ! Elle avait un lieu de prédilection, à Saint-Floret : la chapelle du Chastel. Elle aimait beaucoup cet endroit. On allait déjeuner à la Promenade, un restaurant qui n’existe plus aujourd’hui, on allait chez le brocanteur … Madame le Maire était très sympa : elle nous passait la clé de la chapelle qui était normalement fermée. "

Pour ses 70 ans, Jane Birkin a choisi de venir fêter son anniversaire à Clermont Ferrand avec vous. Pourquoi Clermont? 

"Je lui avais dit : "Qu’est ce que tu vas faire pour tes 70 ans ? Viens chanter à Clermont, on fera une fête surprise. Quoi de mieux que d’être sur scène pour son anniversaire ?” Elle était venue, ses filles étaient descendues, Alain Souchon, plein d’amis … c’était une belle fête. "

"Elle respectait beaucoup les gens et les gens la respectaient beaucoup en échange."

Jean-Marc Grangier

Lors de ses passages à Clermont-Ferrand, certains se souviennent qu’elle allait aux puces, place des Salins. Elle aimait cet endroit ?

"Elle aimait beaucoup les puces des Salins, elle trouvait toujours beaucoup de choses. Et puis, elle avait ce contact, pas seulement sur scène, dans la rue aussi ! Elle avait un sens très particulier de l’échange. Elle respectait beaucoup les gens et les gens la respectaient beaucoup en échange. Jamais je n’ai vu les gens intervenir de manière agressive avec elle, ils étaient toujours amicaux.

Au marché aux puces, tout le monde était un peu surpris de la voir marcher avec son chien dans les allées, les bras encombrés. Parfois, il y avait un assistant qui portait toutes les choses qu’elle achetait, ou alors elle faisait des allers-retours à l’hôtel. Ses maisons étaient très encombrées, elle ne savait pas jeter !"

Comment était-elle dans la vie ?

"Elle était comme on n’imagine pas trop qu’elle était. Oui, elle était généreuse, gentille, ouverte, douce, belle, intelligente, sympathique mais c’était une femme très pudique dans ses émotions et ses sentiments alors qu’on a l’image d’une provocatrice ! Elle était très intelligente, elle avait une analyse très fine. Aller voir un film, une pièce ou une émission de télé avec elle, c’était un régal ! Elle était très cultivée, passionnée d’histoire, elle lisait énormément, Châteaubriant, les grands textes … Elle en parlait merveilleusement bien."

"C’était une optimiste forcenée, quelqu’un qui croyait toujours que les choses vont s’arranger !"

Jean-Marc Grangier

"C’était aussi une femme très engagée politiquement. Elle se sentait française, mais en même temps elle ne se sentait pas toujours le droit de s’exprimer sur la politique française, mais sur la politique dans le monde, elle était très engagée. C’était une activiste. 

C’était aussi une force de la nature. Lorsqu’elle a été malade, pour arriver à traverser tous ses traitements, ses soins, tout ce qu’elle a subi tout au long des années, il faut une force de cheval ! 

Et puis, c’était une optimiste forcenée, quelqu’un qui croyait toujours que les choses vont s’arranger ! Ca fait partie de cette force, une grande force morale. Elle a eu des périodes très difficiles, après la mort de Gainsbourg, de sa fille, mais elle a réussi à traverser tout ça."


En tant que directeur de théâtre, vous l’avez d’abord rencontrée en tant qu’actrice. Quel regard portez-vous sur cette facette de sa personnalité ?

"Elle avait fait du théâtre très jeune, dans une comédie musicale à Londres. Après, c’est venu de manière surprenante. Avec son accent, elle ne recevait pas de proposition. C’est Patrice Chéreau qui a été gonflé et qui lui a proposé une pièce de Marivaux, et elle était géniale ! Il l’a aidée, accompagnée pour qu’elle arrive à s’exprimer.

"Comme actrice, elle était extrêmement engagée, présente, à 1000 % dans ce qu’elle faisait. "

Jean-Marc Grangier

Après elle a fait des choses très différentes : une pièce de Balasko, une pièce de Jean-Claude Carrière, une tragédie à Londres, elle est venue jouer Electre à Clermont … Elle avait beaucoup de succès avec une pièce de Pierre Dux qu’elle jouait en duo. Elle avait aussi un très beau projet de théâtre avec un texte de Duras qui ne se fera pas. 

Comme actrice, elle était extrêmement engagée, présente, à 1000 % dans ce qu’elle faisait. Dans ses choix, il n’y a pas de ligne directrice en dehors de la curiosité, de l’aventure, du fait d’aller dans des projets très contrastés, parfois comiques, parfois tragiques, parfois dramatiques. Après, quand elle était malade, les assurances ne la couvraient plus pour le cinéma et c’est dommage parce qu’elle avait de belles propositions. 

Elle aura touché à tout dans sa carrière artistique...

C’est quelqu’un qui a eu finalement une carrière dans la légèreté au départ, et ensuite, on a vu ce qu'il y avait en elle, en profondeur. Au départ, elle passait pour une fille très sexy, amusante - ce qu’elle était - mais c’était aussi une femme très intelligente et très construite.

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