Depuis le 9 mars, c'est la septième journée nationale d'actions contre la loi Travail. A Clermont-Ferrand, entre 1600 personnes et 3000 personnes ont battu le pavé jeudi matin, dans le calme. Une mobilisation similaire, voire légèrement supérieure à celle du mardi 17 mai.
Bis repetita ! Quarante-huit heures après la dernière manifestation, les slogans retentissent et les drapeaux s'agitent de nouveau dans les rues clermontoises avec la volonté affichée par les manifestants de ne rien lâcher face à la loi Travail.
Parti de la Place du 1er mai, les manifestants ont fait une brève halte devant le Rectorat pour contester la réforme du collège, puis le cortège a poursuvi sa route jusqu'à la préfecture. Dans les rangs, on pouvait rencontrer des représentants des secteurs privé et public ou encore du parti communiste, mais une poignée de jeunes seulement, alors qu'approchent les examens.
Après deux mois et demi de mouvement, et malgré le recours à l'article 49-3 pour faire adopter le texte, les syndicats ne s'avouent pas vaincus et veulent maintenir le bras de fer avec le gouvernement. Ils appellent même à généraliser la grève.
Le mouvement a d'ailleurs pris de nouvelles formes ces derniers jours, avec notamment le blocage des raffineries et dépôts de carburant.
En France, la pression continue
Face à la fermeté de l'exécutif, les opposants au projet de loi travail maintenaient la pression jeudi en France avec de nouveaux blocages, manifestations et grèves dans les transports routier, ferroviaire et aérien, dans un climat tendu. Après l'incendie d'une voiture de police mercredi à Paris, le Premier ministre, Manuel Valls, a appelé les syndicats à s'"interroger sur la pertinence" de certaines manifestations. Il s'est dit, jeudi, prêt à faire lever par les forces de l'ordre les blocages des ports, raffineries et aéroports.
Mais pour le numéro un de la CGT, Philippe Martinez, pas question de renoncer à cause des violences : "On ne peut pas empêcher la démocratie de s'exprimer parce qu'il y a des problèmes en marge des manifestations". Les sept organisations (CGT, FO, Solidaires, FSU, Unef, FIDL et UNL), qui appellent à manifester pour la septième fois (et la deuxième en trois jours), assurent que "la mobilisation, loin de faiblir, va se poursuivre et s'amplifier jusqu'au retrait du projet de loi travail", jugé trop favorable aux entreprises.
Force ouvrière a même appelé à renforcer le mouvement "en juin" avec un "grève interprofessionnelle" et une "manifestation nationale" à Paris. Il s'agit de "booster la mobilisation à l'occasion de l'arrivée du texte devant le Sénat", a expliqué son secrétaire général, Jean-Claude Mailly, présent dans le cortège de tête parisien. L'intersyndicale doit se réunir dans la soirée pour fixer une nouvelle date de mobilisation.
Pourtant, le chef de l'État, François Hollande, a été clair: la loi "va passer".
Des services d'ordre équipés
A Paris, le cortège devait partir vers 14H00 de la place de la Nation en direction de la place d'Italie. Alors que les précédentes manifestations ont été marquées par des violences, les services d'ordre syndicaux, eux-mêmes pris à partie, sont sur le qui-vive. Fait inédit depuis le début de la mobilisation, mardi certains étaient armés de bâtons et matraques pour répondre aux casseurs.
Le préfet de police de Paris, Michel Cadot, a mis en garde les syndicats: il n'est "pas souhaitable" que les services d'ordre aient sur eux matraques ou bâtons. Avant le départ de la manifestation parisienne, les membres des SO étaient nombreux et casqués mais sans matériel offensif visible.
Jeudi dans la matinée, 19 personnes ont été interpellées dans le métro de Rennes. A Paris, de nouvelles interdictions de manifester ont été décidées et à Nantes, le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, a interdit une manifestation non déclarée à la préfecture.
La manifestation s'est déplacée à Saint-Nazaire, où 6.000 personnes, selon la police, défilaient dans le calme en fin de matinée. La police a aussi recensé 4.500 manifestants au Havre, 2.900 à Rouen, 1.800 à Montpellier ou encore 1.600 à Clermont-Ferrand et au Mans. 3.000 personnes ont été comptabilisées à Lyon, où les forces de l'ordre ont fait usage d'un camion à eau pour calmer des tensions en fin de cortège. La mobilisation "est déjà à un niveau élevé", s'est réjoui Jean-Claude Mailly.
Les terminaux pétroliers bloqués
Parallèlement, des grèves de routiers et de cheminots, entamées en début de semaine, appuient le mouvement. Dans la région de Marseille, jeudi matin, les routiers menaient une opération de blocage près de la zone industrielle de Fos-sur-mer. Dans l'ouest, des barrages filtrants ont été mis en place à Rennes, dont un sur un axe d'accès à un dépôt pétrolier, et Nantes. Dans la région du Havre, deux raffineries étaient bloquées dans la matinée et la pénurie de carburants gagnait tandis qu'à La Rochelle, les accès aux terminaux pétroliers du Grand port étaient bloqués. Dans le sud-ouest, l'accès à l'aéroport de Blagnac à Toulouse a été fermé.
Dans le secteur ferroviaire, la circulation des trains était perturbée pour la deuxième journée consécutive, affectant fortement certaines lignes régionales et moins l'Ile-de-France. Côté TGV, deux trains sur trois étaient prévus. Un appel à la grève des contrôleurs aériens devait légèrement dérégler le trafic,
notamment à Orly, où 15% d'annulations étaient prévues.
Adopté en première lecture après un recours à l'article 49-3 de la Constitution, le projet de loi instaure la primauté des accords d'entreprises sur les accords de branche, casus belli pour ces syndicats. Il ouvre aussi la possibilité de référendums d'entreprise, d'accords "offensifs", crée le compte personnel d'activité et étend la garantie jeunes.