Les Arvernes n’ont pas révélé tous leurs secrets. Frédéric Trément, professeur d’archéologie à l’université Clermont Auvergne était l'invité de France 3 Auvergne. Il propose une approche pluridisciplinaire de l’archéologie qui s’attache au territoire.
Frédéric Trément est professeur à l'université Clermont-Auvergne, titulaire de la chaire d'Antiquités Nationales. il dirige le laboratoire d'archéologie de la Maison des Sciences de l'Homme à Clermont-Ferrand. Avant l'Auvergne, il a travaillé en Provence, en Italie, au Portugal et en Algérie. Il était l'invité de "l'Interview du jeudi" sur France 3 Auvergne.
Qu’est-ce que l’archéologie du développement des territoires ?
C’est une archéologie qui ne s’intéresse pas seulement au site archéologique que l’on fouille. Il s’agit de le lier aux espaces, aux territoires, aux paysages, à l’environnement plus généralement. L’idée c’est de découvrir, recenser, dater le plus grand nombre de sites présents dans un espace donné.
Grâce à quelles méthodes ?
On utilise des méthodes non-destructives d’archéologie spatiale notamment de la prospection au sol ou aérienne, de la géophysique, le Lidar qui permet d’utiliser un laser pour détecter des anomalies topographiques dans la forêt… A partir de là on reconstitue l’environnement, les paysages, les interactions entre société et milieux sur de longues durées… avec toute une batterie de méthodes dites paléo-environnementales comme l’étude des pollens ou des charbons.
Qu’est-ce que cela apporte à des fouilles classiques ?
L’intérêt c’est de replacer les grands sites archéologiques comme Gergovie, Corent, Gondole ou encore Augustonemetum (Clermont-Ferrand), dans leur territoire, dans un système de peuplement. On tente de comprendre ainsi l’économie et toutes les raisons qui ont motivées leur développement.
Appliquée aux Arvernes, que nous a révélé l’archéologie du développement des territoires ?
Pour l’époque romaine, l’un des apports majeur de cette archéologie au cours des deux dernières décennies, a été la mise en évidence de toute une série d’agglomérations secondaires, de petites ou moyennes villes sur l’ensemble du territoire. On en compte aujourd’hui quelques dizaines. On a également mis en évidence toute une série de fermes et surtout de villas, de grands domaines aristocratiques qui jalonnaient les campagnes. La prospection porte essentiellement sur la grande Limagne, le bassin de Clermont-Ferrand et toutes ces terres noires qui ont été drainées et intensivement cultivées à l’âge du fer et à l’époque romaine. Mais nous avons également ouvert des recherches dans les zones de moyenne montagne pour essayer de rééquilibrer l’image qu’on a de développement du territoire arverne.
Ces Arvernes, quelles étaient leur influence et leur importance parmi les peuples gaulois ?
A l’âge du fer, les Arvernes occupent un rôle de premier plan à l’échelle des territoires gaulois notamment en contrôlant toute une série de relations diplomatiques avec de grands peuples voisins comme les Allobroges (vallée du Rhône) et les Séquanes (vallée de la Seine). Ce sont de puissants alliés qui vont jouer un rôle durant le déroulement de la conquête césarienne.
Dans quelle mesure les Arvernes ont-ils structurés notre territoire actuel ?
Ils ont choisi pour capitale Clermont-Ferrand qui s’appelle alors Augustonemetum, dès l’époque romaine, à la fin du 1er siècle avant JC. La création de cette capitale est à l’origine de notre ville actuelle et d’un foyer de centralité du territoire. Le choix de cet emplacement est la conséquence du fait que toute une série d’oppida se regroupe dans ce secteur à l’âge du fer.
Quels secrets les Arvernes ne nous ont-ils pas révélés ?
Une des questions que nous nous posons est de savoir quel degré de maîtrise, d’occupation, ils avaient développé dans les moyennes montagnes qui constituent les trois quarts de leur territoire.
Frédéric Trément est l'auteur de – Les Arvernes et leurs voisins du Massif Central à l’époque romaine. Une archéologie du développement des territoires. Edition Revue d'Auvergne