Sécheresse dans le Puy-de-Dôme : pourquoi les agriculteurs arrosent autant le maïs

Avec une floraison en été, le maïs demande beaucoup d’eau. Trop peut-être en période de canicule. Les agriculteurs tentent cependant d’avoir une irrigation raisonnée.
 

En cette période de canicule, où les ressources en eau sont limitées dans tout le département, des litres et des litres d’eau sont pourtant utilisés chaque jour dans les champs pour irriguer, en particulier les maïs. Une situation "qui pose problème", selon Prune Gilbert, chargée de mission eau à la FRANE (Fédération de la Région Auvergne pour la Nature et l’Environnement) : "On préférerait que l’eau soit plutôt dirigée vers les milieux naturels, ou vers l’alimentation en eau potable, explique-t-elle. Actuellement, il y a un déficit en eau sur les cours d’eau et les nappes phréatiques. Le bassin du Cher par exemple a été placé en situation de crise. Une situation de crise à laquelle contribue l’agriculture."

Malheureusement, s’ils ne veulent pas perdre leurs récoltes, les agriculteurs n’ont pas vraiment d’autre choix que d’arroser leurs parcelles, comme le souligne Baptiste Arnaud, président des Jeunes Agriculteurs 63 et du syndicat des irrigants. "On n’arrose pas pour le plaisir, on s’en passerait bien. Mais tous les maïs qui ne sont pas arrosés sont grillés, perdus."
 

Floraison en été

Problème du maïs : cette plante tropicale, originaire d’Amérique centrale, a besoin de chaleur et d’eau. Or, sa floraison a lieu en été, quand justement l’eau peut manquer. "Le cycle du maïs est très court, précise Régis Rougier, président du syndicat des producteurs de maïs semences. Ses besoins sont concentrés en été, mais il n’est pas plus consommateur d’eau que le blé. Seulement, le blé peut profiter des pluies d’hiver et du printemps."

L’irrigation sert à la fois à apporter de l’eau aux champs et à réduire la température dans les parcelles. Il faut d’autant plus d’eau que les pertes par évaporation sont importantes : entre 5 et 10% de l’apport d’eau quand il fait plus de 35°C, selon Régis Rougier. Même en période de pluie, certains continuent d’arroser : "Lors de l’orage samedi dernier, il n’est tombé qu’un millimètre, ce n’est pas suffisant", note Baptiste Arnaud. Les agriculteurs l’assurent toutefois : l’irrigation est raisonnée. "Nous avons des outils de mesure pour savoir si les plantes ont soif ou pas. Malheureusement, avec la canicule, elles ont soif en permanence cette année", déclare l’agriculteur, qui ajoute que des tours d’irrigation ont été mis en place : "Nous ne prélevons pas tous à 100% du temps, mais chacun notre tour, pour que chacun ait assez de débit." Par ailleurs, pour éviter les abus et vérifier que les agriculteurs respectent les restrictions d’eau en place, les services de l’Etat effectuent régulièrement des contrôles.
 


Eaux usées

Pour ne pas trop puiser dans les nappes phréatiques, les agriculteurs mettent aussi en place des alternatives. Autour de Clermont-Ferrand par exemple, une partie des cultures est irrigué grâce à l’eau recyclée de la station d’épuration. Un quart des surfaces est arrosée grâce aux eaux usées, selon Baptiste Arnaud. Un procédé plus écologique, mais qui n’est pas idéal non plus, relève Prune Gilbert de la FRANE : "Le rôle des stations d’épuration est de restituer l’eau au milieu naturel, donc cette eau manquera forcément quelque part." Pour la chargée de mission, revoir le système d’irrigation, en privilégiant le goutte à goutte, serait préférable pour diminuer la consommation. "Cette option est compliquée à mettre en place et onéreuse lorsqu’on parle de milliers d’hectares", répond cependant Régis Rougier. Ce dernier souhaiterait plutôt la création de réserves d’eau de pluie supplémentaires : "1% de l’eau de pluie qui tombe seulement est utilisée pour l’agriculture, regrette-t-il. Ces réserves ne serviraient pas que pour nous d’ailleurs, c’est tout le monde qui pâtit du manque d’eau."
 

L’agro-écologie est une autre solution qui se développe : elle consiste à faire un usage raisonné des ressources en eau, par exemple en plantant des arbres autour des champs. Cette technique permet en effet de limiter l’évaporation de l’eau et de faire descendre la température.
 

Arrêter le maïs ?

Pour la question du maïs, la solution serait peut-être aussi de repenser les cultures. "Est-ce que le maïs est une espèce qui doit être cultivée en Auvergne alors que nous avons des étés très secs ?", interroge Prune Gilbert. Quand les ressources en eau s’annoncent insuffisantes, d’autres plantes moins gourmandes pourraient être cultivées, comme le colza. La Chambre d’agriculture du Puy-de-Dôme fait partie de celles participant à un projet lancé par le ministère de l’Agriculture, AP3C (pour "Adaptations des Pratiques Culturales au Changement Climatique"), destiné à trouver des pratiques plus adaptées au réchauffement climatique. Remplacer le maïs par autre chose est possible, estime Baptiste Arnaud, "mais ça ne se fera pas demain matin."

 
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