Cet été, sa vie a changé : Danielle, une habitante du Puy-de-Dôme, a été infectée par une piqure de tique et a contracté la maladie de Lyme. Elle subit depuis les conséquences de cette maladie. Symptômes, prévention, traitement, voici ce que vous devez savoir.
C’est habituel l’été : Danielle, habitante du Puy-de-Dôme, aime profiter du soleil dans “son terrain”. Elle est également amatrice de fleurs, qu’elle cultive avec soin dans son jardin. Il n’est donc pas rare qu’elle se fasse piquer par des insectes, mais cette année, les conséquences ont été très graves : “J'ai été piquée 3 fois cet été par des tiques. L'année dernière pareil, tous les ans, je suis piquée 2 ou 3 fois, mais là, il y a une piqure qui s'est infectée.” Elle ne le sait pas encore, mais sa vie va être bouleversée par la maladie de Lyme, pathologie infectieuse transmise par les tiques. Les contaminations humaines sont plus fréquentes à la période d’activité maximale des tiques, en France entre le début du printemps et la fin de l’automne.
La localisation de sa piqure ne lui permet pas de s’apercevoir tout de suite que cette piqure n’est pas bégnine : “Je me suis aperçue que quelque chose n’allait pas quand je suis allée en vacances en Corse avec ma fille. Je me suis changée et elle a vu la piqure dans mon dos. Elle m'a dit que c’était infecté. Elle m'a fait des cataplasmes d'argile, mais ça n'a pas guéri. Elle m’a dit que c’était très vilain. C'était très rouge et enflé, mais pas tellement douloureux. Si elle ne l’avait pas vu, je ne m'en serais pas rendu compte.” Danielle reconnaît les symptômes, elle se rend dès que possible chez son médecin. Malheureusement, elle ne recevra pas la cure d’antibiotiques nécessaire à éradiquer l’infection : “ Je suis allée voir le docteur qui m'a dit “Madame, les antibiotiques ne sont pas systématiques. Il y a très peu de tiques qui donnent la maladie de Lyme”. Alors, il ne m’a rien donné.”
Il y a des jours où je ne peux rien faire.
Danielle, atteinte de la maladie de Lyme
Rassurée, elle retourne à son quotidien. C’est suite à un accident vasculaire cérébral que des analyses révèlent qu’elle a contracté la maladie de Lyme : “Je me suis rendu compte que je l'avais attrapée parce que quand j'ai fait mon AVC, on m'a fait des prises de sang et là, on a vu que j'avais été contaminée.” Depuis, elle subit les conséquences de cette infection non traitée : “J'ai des fatigues très importantes. Il y a des jours où je ne peux rien faire. J'ai mal dans les jambes. J'ai une jambe en particulier qui a du mal à me suivre.”
Elle ignore si l’infection est complétement éradiquée. “Je dois faire une prise de sang dans un mois. Je ne sais pas si l’infection est toujours là ou pas. Mais de toute façon, je pense que oui parce qu’il y a des jours où je vais très bien, je n'ai pas de symptômes et d'autres jours où je peux à peine bouger, j'ai mal partout, j'ai la tête qui tourne, je suis fatiguée...” Pour être piqué par une tique, pas besoin de randonnée. Tous les extérieurs peuvent abriter l’insecte : “Je pense que je l’ai attrapé dans mon terrain, ou en faisant mon jardin. Je ne vois pas où j'aurais pu l'attraper à part ça. Je ne suis pas partie en balade cette année.” Trop tard, pour elle, pour prendre le traitement antibiotique. Cela fait plus de 2 mois qu'elle a été contaminée : “Les médecins m'ont conseillé de prendre des vitamines, des oligoéléments pour combattre, rejeter la maladie. C'est ce que je fais.”
"Tu n’as pas la même vie avant et après"
Danielle subira sans doute les conséquences de la maladie pendant longtemps : “Ça te bouffe, cette maladie. Il faut bien faire attention quand on se fait piquer, d'aller voir le médecin si on constate une rougeur. Tu n’as pas la même vie avant et après. Maintenant, quand je me déshabille, je me regarde de partout pour voir si je n'ai pas été piquée, je suis beaucoup plus prudente. Je conseille aux gens d'ailleurs, de bien se regarder, après être passé dans les chemins par exemple.”
Des patients hospitalisés
La maladie de Lyme, ou borréliose de Lyme, est transmise lors d’une piqûre de tique infectée par une borrelia, une bactérie de la famille des spirochètes. L’infection est souvent sans symptôme mais peut dans certains cas entraîner une maladie parfois invalidante. Le docteur Christine Jacomet, médecin infectiologue et cheffe du chef du service des maladies infectieuses et tropicales du CHU de Clermont-Ferrand, traite régulièrement des patients atteins de cette pathologie : “Il y a beaucoup de patients en infectiologie, soit qui ont une maladie de Lyme un petit peu sévère, avec une phase neurologique ou phase articulaire, soit des personnes qui ont déjà été traitées plusieurs fois et dont les symptômes continuent.”
Bien s'inspecter
Pour détecter une infection, il faut d’abord repérer la piqure. Et pour cela, il faut s’inspecter. “Quand on va dans les bois, dans les herbes hautes, à la campagne, le soir, on s'inspecte minutieusement, sans oublier le cuir chevelu. On s'inspecte le jour même et le lendemain, parce que la tique peut être minuscule, on peut ne pas la voir. Comme elle va prendre un peu de sang, elle va grossir et on va la voir un peu mieux le lendemain”, explique le docteur Jacomet. S’il y a une tique, il faut l'enlever. “On peut l'extraire grâce à des pinces à tiques ou des pinces à épiler fines. Ensuite, on désinfecte la peau et une fois que la tique est enlevée, on regarde la peau pendant un mois. Soit on y arrive tout seul parce que la tique est par exemple sur la jambe ou le bras, soit c'est dans le dos ou à l'oreille et on demande à quelqu’un d’autre.”
Surveiller la piqure
Après avoir retiré la tique, la prudence doit persister pendant les 4 semaines qui suivent. La zone de la piqure doit être inspectée à la loupe, indique Catherine Jacomet : “On recherche des signes cutanés, des rougeurs qui apparaissent, de la fièvre, des symptômes de maladie...Si, pendant les 4 semaines qui suivent, il n’y a rien, on ne s’inquiète pas. S’il n’y a pas de lésions cutanées, pas de symptômes qui apparaissent, on ne fait rien. C'est terminé, il n'y aura plus jamais de signes.” En l’absence de symptôme, il n’y a pas lieu de traiter ou de pratiquer des examens biologiques. Il n’y a pas de traitement systématique après une piqûre de tique, indique Santé Publique France.
Les symptômes qui doivent vous alerter
En revanche, si on voit apparaître des lésions cutanées, il faut aller consulter au plus vite, recommande le docteur Jacomet : “Il faut repérer ce qu'on appelle l'érythème migrant. Il s’agit d’une plaque rouge et ronde qui grossit de jour en jour avec une extension progressive. Ce qu'il faut faire, c'est aller chez le médecin généraliste qui va diagnostiquer cliniquement. Ces lésions sont vraiment typiques. Le médecin va donner des antibiotiques et tout va rentrer dans l’ordre."
Un traitement antibiotique entre 14 et 28 jours est préconisé. Si le traitement n'est pas suivi rapidement, d’autres symptômes peuvent apparaître : “S’il n'y a pas d'érythème migrant ou on ne l'a pas vu, peuvent arriver dans un second temps d'autres problèmes de santé. Ce sont des douleurs articulaires. C'est très souvent des mono-arthrites ou des oligo-arthrites, c'est à dire que ça touche une seule articulation. C'est vraiment très inflammatoire : rouge, chaud, douloureux, gonflé. Il faut consulter un rhumatologue ou un infectiologue pour faire le diagnostic. Si vous vous baladez pas mal dans les bois, habitez à la campagne ou si vous soupçonnez une piqûre, il faut alerter le médecin et on fera des examens sanguins, une sérologie. Jusqu’à 2 mois après la piqûre, on a des anticorps et les antibiotiques marchent encore.”
Mais ce n’est pas tout, selon le docteur : “Il y a une autre présentation de la maladie qui peut arriver : ce qu’on appelle des radiculites. Il s’agit d’une atteinte d'un nerf qui peut être soit crânien, soit thoracique, ou encore lombaire. Il y a souvent une douleur, comme une paralysie. Cela peut être aussi une douleur d'un membre comme une sciatique, c'est rarement des douleurs diffuses. Il faut consulter. Le réflexe de la sérologie de Lyme est de plus en plus présent au niveau du corps médical.” Elle ajoute : “Il y a des personnes qui peuvent se plaindre de fièvre, douleurs généralisées... Là encore, le traitement antibiotique marche bien.”
La bactérie n’est plus là mais il y a des séquelles, avec une convalescence qui dure, avec cette fatigue, ces courbatures, cette paralysie qui reste.
Dr. Christine Jacomet, médecin infectiologue
Malheureusement, une infection de Lyme peut avoir des conséquences à long terme : “Il y a des personnes qui, après avoir été infectées par la maladie de Lyme, gardent des séquelles. Une infection, c’est comme un cambriolage. Quand on arrive dans une maison après un cambriolage, tout est sens dessus-dessous, déchiré, les meubles sont cassés, tout est éparpillé dans tous les sens... Le voleur n'est plus là, mais il a saccagé la maison. L’infection fait la même chose au corps. Il y a des personnes qui, après un traitement efficace de la maladie de Lyme, vont se plaindre de symptômes parce que le corps a été chamboulé. La bactérie n’est plus là mais il y a des séquelles, avec une convalescence qui dure, avec cette fatigue, ces courbatures, cette paralysie qui restent. Mais si le traitement a été bien suivi entre 15 et 21 jours, avec la bonne dose, ce n'est pas la peine de refaire des cures antibiotiques.”
Des conséquences à long terme
En cas de symptômes persistants, voici les bons réflexes selon le docteur Christine Jacomet : “Il faut simplement consulter des spécialistes des symptômes dont on fait l’expérience. Il faut d’abord vérifier que c’est bien lié à la maladie de Lyme et qu’il n’y a pas d’autres pathologies. Souvent, on recommande de faire une activité sportive. Les personnes, souvent, n'osent plus bouger parce qu'elles se considèrent comme encore très malades. En fait, cela aggrave les choses. Donc on recommande une remise en forme par le sport, adapté bien sûr, un accompagnement psychologique car très souvent il y a des retombées sociales... Tout ça permet vraiment d'améliorer les choses. Il faut savoir que parmi ces personnes qui se disent “J'ai une maladie de Lyme et je n'arrive pas à m'en sortir”, dans 80% des cas, on trouve autre chose, un début de cancer par exemple ou une pathologie qui explique les signes qui ont été rapportés. Mais certaines personnes ont un système immunitaire particulier, on l'a vu avec le COVID long, et voient ce système hypermobilisé en cas d'infection et malheureusement, cela peut perturber leur homéostasie (processus par lequel le corps conserve un état d'équilibre, NDLR).”
"Ca peut vraiment handicaper une vie, c'est mortel socialement"
Les médecins généralistes font état d’environ 50 000 cas par an selon le docteur Jacomet : ”Il n’y a pas d'augmentation significative entre 2009 et 2017.” À l'hôpital, elle compte environ 900 cas par an “et, dans 50% des cas, ce sont des atteintes neurologiques, donc radiculaires et là encore, il n'y a pas d’augmentation dans le temps.”
Elle précise que l’on ne meurt pas de cette maladie : “Ce n'est pas mortel dans le sens où il n'y a pas d'atteintes cardiaques, c’est rarissime. Mais ça peut vraiment handicaper une vie. C'est mortel socialement. Les personnes sont toujours fatiguées, souffrent tout le temps. Ce n’est pas une mort physique mais sociale.” Elle le rappelle, “il faut être vigilant, on ne sait jamais comment on va réagir à une infection."
Se prémunir des piqures
Pour se protéger en amont des piqures de tiques, voici ses conseils : “Il faut mettre des vêtements couvrants, plutôt de couleur claire et porter un chapeau pour les enfants pour éviter les piqures derrière les oreilles, dans la chevelure... On peut également utiliser des répulsifs. Il faut faire attention, il y en a qui ne sont pas recommandés chez les femmes enceintes. Tout ce qui est bracelet, huiles essentielles, ça ne marche pas très bien. Ce n’est pas forcément recommandé." Il faut éviter le plus possible les piqures, d’autant que les tiques peuvent aussi transmettre d'autres maladies comme la tularémie ou l’encéphalite à tique.