Une éleveuse du Puy-de-Dôme a lancé un appel à l'aide après que ses voisins se sont plaints des cloches de ses vaches. Eux dénoncent une vengeance, alors que ceux-ci se sont opposés à ce qu'elle abatte une haie.
Une haie et des cloches de vaches. Il n'en a pas fallu plus pour ruiner l'entente entre Marie-Laure Espinasse, éleveuse bio du village de Cunlhat, dans le Puy-de-Dôme, et ses voisins. Depuis maintenant deux ans, le conflit s'envenime, au point qu'il est impossible d'accorder les deux parties sur la même version des faits.
Tout commence à cause d'une haie, que Marie-Laure Espinasse souhaitait abattre "car elle menaçait une ligne de tension électrique". Mais ses voisins s'y opposent, rappelant son importance pour la biodiversité. Et la venue d'un géomètre n'apaise rien : sur le PV de bornage, les haies sont définies comme des "signes visibles du terrain", qui marquent la limite entre l'exploitation et la parcelle des voisins.
"Les cloches de moutons les laissent indifférents"
Depuis cet épisode, "les voisins ont commencé à se plaindre du son des cloches de vaches, alors que cela ne les avait jamais dérangés avant. Et les cloches des moutons les laissent indifférents", raille l'éleveuse.
Elle n'en démord pas : il n'est pas question de retirer les cloches. "Parfois, les vaches s'échappent de notre terrain. Les cloches sont alors indispensables pour les retrouver", explique-t-elle. Leur tintement est aussi un hommage à son défunt mari, qui s'est suicidé : "Il disait : on écoute les vaches, et on les retrouve", raconte-t-elle, la voix lourde d'émotion.
Son appel à l'aide vibrant il y a deux mois a d'ailleurs suscité un fort émoi sur les réseaux sociaux : "Agriculteurs ou amis, j'ai besoin de vous. Mes vaches ont des cloches et mes voisins veulent qu'elles les posent. Aidez-moi, pour la mémoire de mon mari Laurent". En commentaire, nombreux sont ceux qui recommandent aux voisins "de retourner vivre en ville".
Ceux-ci ont acquis leur maison en 2010, l'année où l'éleveuse s'est installée sur sa ferme - un détail qui a son importance, alors qu'une loi examinée au Sénat en mars après avoir été adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale prévoit qu'il n'y a pas de trouble du voisinage, si l'activité en cause est antérieure à l'installation du plaignant. Et le récit des voisins est tout autre.
On nous vend la fable du conflit entre une agricultrice et des néo-ruraux, alors qu'on est dans une histoire de vengeance mesquine.
maître Fauconnier, avocat
Selon ses clients, les cloches étaient beaucoup moins nombreuses auparavant : l'éleveuse en aurait acheté de plus en plus pour énerver ses voisins. Et de ressortir une Une de La Montagne datée de 2016, où l'on aperçoit les vaches - sans l'ombre d'une cloche en vue...
Une conciliation prévue en mai
"J'ai trente vaches, toutes n'apparaissent pas sur la photo", rétorque l'éleveuse, qui admet néanmoins avoir "acquis de plus en plus de cloches progressivement". Mais selon elle, c'est uniquement lié au coût des cloches : "plus de 100 euros l'unité" pour le modèle qu'elle a mis au cou de ses vaches.
La conciliation prévue au mois de mai ne s'annonce pas de tout repos : "Je suis prête à remuer ciel et terre pour garder mes cloches", lance l'éleveuse. Ses voisins, eux, "se réservent le droit de saisir le tribunal judiciaire pour faire cesser ces troubles anormaux du voisinage, si la conciliation n'aboutit pas", conclut leur avocat.