Certains agriculteurs ont choisi de ne pas rejoindre la mobilisation sur les routes. C’est le cas d’Alain Guéringer, agriculteur dans l’est du département du Puy-de-Dôme. S’il comprend le mal-être général de la filière, pour lui, il faudrait opérer un virage à 180 degrés de la politique agricole française.
C’est dans un petit coin de paradis, à l’est du département du Puy-de-Dôme, qu’Alain Guéringer a décidé de s’installer, il y a 15 ans. Son exploitation compte une vingtaine d’hectares et une quinzaine de vaches de la race ferrandaise. « J'ai dû être vache dans une autre vie ou je serais réincarné en vache je ne sais pas, explique l’agriculteur. C’était vraiment un projet d’installation en élevage bovins et avec ce côté proche des animaux, vente directe proche des consommateurs. Une conduite conforme à l’agriculture biologique même si je n’ai jamais demandé la certification ».
Je reste libre de mes choix techniques et économiques sur l’exploitation
Alain Guéringer, exploitant agricole
Même si son métier d’agriculteur est arrivé tardivement, il a toujours baigné dedans et a même commencé en tant que salarié agricole. Il connaît donc bien le milieu. Lorsqu’il s’est installé, il a fait le choix de faire son activité à sa manière et de ne pas demander des aides européennes de la politique agricole commune. « Ces aides me feraient rentrer dans un système qui conditionnerait mes choix à ces aides-là. Aujourd'hui je reste libre de mes choix techniques et économiques sur l’exploitation. Moi, je vends ma viande plus cher que je ne la vendrais si je la vendais sur des circuits longs, avec des groupements de producteurs. Le consommateur, quant à lui, peut trouver chez moi de la viande à un prix plus intéressant que ce qu’il a au supermarché. J’ai fait un choix de partage de la valeur ajouté entre le consommateur de ma viande et moi ».
La question environnementale doit être intégrée dans les réflexions de politiques agricoles
Alain Guéringer, exploitant agricole
Il est membre du syndicat de la Confédération paysanne. Il comprend la mobilisation générale et le mal-être de la filière, mais il ne partage pas les revendications exprimées dans les blocages. « Je sais qu’il y a une grosse revendication sur les normes environnementales. Je comprends que le côté norme est très pesant avec le côté d’évaluer : vous faites ça, c’est comme ça qu’il faudrait faire. Au-delà de la question normative, la question environnementale doit être intégrée dans les réflexions de politiques agricoles. On ne peut pas faire semblant que ça n’existe pas ».
Pour Alain Guéringer, un virage politique à 180 degrés est nécessaire, il faut un retournement de la politique agricole par rapport à ce qu’elle a porté jusqu’à maintenant, pour que l’agriculture française puisse survivre dans les années à venir. Même s’il est conscient que ce virage ne pourra se faire sans un accompagnement des agriculteurs par le gouvernement.