Le 22 avril, La Tour d’Auvergne (Puy-de-Dôme) perd le seul médecin installé sur la commune. Le docteur Jérôme Valette, infecté par le coronavirus Sars-Cov2 est emporté par le Covid-19. Deux semaines plus tard, il faut lui trouver un remplaçant pour continuer à soigner les habitants.
Le village se niche au cœur du massif du Sancy dans le Puy-de-Dôme. Situé à 1000 m d’altitude en moyenne, La Tour d’Auvergne offre l’isolement sans être isolé. Les 700 habitants à l’année (1400 en période touristique) ne manquent de rien à en croire la maire, Marie-Madeleine Fereyrolles. « Chez nous ça bouge tout le temps. On ne peut pas s’ennuyer. J’ai fait 44 ans à la Tour d’Auvergne et je n’ai jamais déprimé » témoigne l’élue le sourire aux lèvres. On n’y manque de rien… sauf d’un médecin depuis quelques jours. Le docteur Jérôme Valette, installé depuis 2003 dans ce bout de campagne a été frappé par le coronavirus Sars-Cov2 au mois d’avril. Une victime de plus qui laisse un grand vide dans la commune.
Recherche d’une solution pérenne
Au-delà du deuil et de la peine, la disparition du docteur Jérôme Valette laisse toute une commune sans médecin généraliste. « On a paré à l’urgence, mais maintenant il faut qu’on voit plus loin », explique Yannick Tournadre, infirmier et futur maire de la commune (il a été élu au premier tour aux dernières élections municipales). « On a un médecin remplaçant qui est là le lundi. Ensuite, on aura un autre remplaçant qui va venir du 18 mai au 31 juillet qui sera là du lundi au vendredi » détaille-t-il. Les deux jeunes médecins ont malheureusement pour la commune déjà des engagements pour la suite et ne peuvent donc pas continuer à pratiquer à la Tour d’Auvergne.François Jonquères, le directeur adjoint de la communauté de communes Dômes-Sancy-Artense préfère voir le verre à moitié plein. « Au bout d’une semaine (d’annonces auprès de médecins et via les canaux habituels) on a pu trouver un remplaçant donc c’est encourageant. On est tout à fait conscient qu’on n’est pas la seule commune rurale à chercher un médecin. Mais on est un lieu touristique, on a un cadre de vie de qualité sur un territoire de moyenne montagne à proximité de Clermont-Ferrand » analyse-t-il.
Qualité de vie…
C’est une véritable carte postale que dressent Marie-Madeleine Fereyrolles et Yannick Tournadre. La montagne, le plan d’eau, la campagne verdoyante l’été et le ski l’hiver, un environnement préservé. Un lieu de vacances où il fait bon vivre à l’année. Pour preuves, les commerces qui font vivre le village : boucherie, boulangerie, épicerie, bureau de poste, tabac-presse et coiffeur, mais aussi banques, restaurants et bars. « On a une école, on a un collège, on a tout » résume la maire de La Tour. Et son successeur annoncé de renchérir sur l’emplacement idéal du cabinet à reprendre : « Il est en plein centre, entre la maison de retraite et l’école. La maison s’est toujours transmise de médecin en médecin depuis des années », décrit Yannick Tournadre.Le directeur adjoint de la communauté de communes, qui est en charge du développement économique du territoire, se transforme lui aussi en VRP pour en lister les atouts. « On a mis en place des micro-crèches. On essaie de faire en sorte que les gens qui s’installent trouvent des services équivalents à ceux qu’ils trouveraient à Clermont-Ferrand. Le transport scolaire est organisé. On propose une saison culturelle à l’année, on a des rencontres sportives, etc. Ce n’est pas parce qu’on est en territoire rural qu’on n’a pas de vie social, culturelle et sportive ». Les jeunes médecins sont clairement visés par les annonces.
… et qualité au travail
Tous savent que de nombreux jeunes médecins recherchent une certaine qualité de vie mais aussi de bonnes conditions d’exercice de leur métier. Alors ils mettent en avant la nouvelle médecine rurale. « Ce n’est pas un sacerdoce comme autrefois. On peut voir grandir ses enfants et être utile » explique Yannick Tournadre. « Ce n’est pas comme il y a 20 ans. Avec les autres médecins (des communes de Bagnols ou encore du Mont-Dore), ils partagent les tours de gardes. C’est confortable », ajoute la maire en poste. La collaboration permet d’éviter l’isolement et la surcharge de travail.D’autant plus que le médecin généraliste peut s’appuyer sur un tissu de professionnels de santé déjà en place sur la commune. « On a deux infirmiers, deux kinés, un pédicure, une pharmacie et une maison de retraite » liste Yannick Tournadre. « On évalue le bassin de clientèle entre 1500 et 2000 personnes », ajoute Marie-Madeleine Fereyrolles pour donner une idée du travail qui attend le prochain généraliste. A en croire les élus, tout serait parfait.
Des aides à l’installation
Mais il n’y aurait pas besoin de dépenser autant énergie si les candidats étaient si faciles à dénicher. « On sait que les jeunes médecins ont l’embarras du choix » reconnaît François Jonquères à la communauté de communes. Toutes les initiatives sont bonnes pour convaincre : un habitant a publié une vidéo sur Youtube pour relayer l’appel. « On sait que c’est amateur, mais l’idée c’est de diffuser la recherche au maximum » admet Yannick Tournadre.Alors pour augmenter leurs chances de réussite, village et communauté de communes se disent prêt à faire des efforts d’aides à l’installation. Un impératif aujourd’hui en zone rural. « On pense souvent à l’aide financière mais ce n’est pas toujours ce qui est demandé. Ça peut être un accompagnement pour aider à trouver un logement rapidement ou pour découvrir le territoire » explique le directeur adjoint de Dômes-Sancy-Artense.
« Le problème est souvent que le conjoint trouve sa place. A la Tour d’Auvergne, c’est possible si le conjoint veut s’investir dans le cabinet. Mais s’il veut continuer à exercer son métier (autre qu’assistant ou secrétaire du médecin), on l’aidera aussi », souligne Marie-Madeleine Fereyrolles. La porte n’est pas fermée à un soutien financier en cas de besoin. Les beaux paysages ne suffisent pas toujours.