Une lettre de Jeanne d'Arc, signée de sa main, quitte Riom, dans le Puy-de-Dôme, pour la première fois pour être exposée à la British Library à Londres. Un trésor historique. C'est l'un des deux derniers documents authentifiés de la Pucelle d'Orléans encore existants.
Et si la Pucelle d'Orléans faisait un petit tour à Londres ? C’est ce qu’ont décidé les archives municipales de Riom en prêtant à la British Library pour son exposition une lettre signée par Jeanne d'Arc elle-même. Et pas n’importe quelle lettre : un appel aux armes écrit en 1429 pendant le siège de La Charité-sur-Loire, adressé à la bonne vieille communauté riomoise. Une lettre qui, pour la première fois, quitte la ville de Riom, et qui, ironiquement, se rend dans le pays de ses ennemis jurés : l'Angleterre. “C’est un vrai pied de nez à l’Histoire”, réagit Cédric Broët, responsable du Pôle Archives et Patrimoines de la ville de Riom.
Une découverte fortuite
Ce document exceptionnel, l’un des deux derniers écrits authentiques signés par la Pucelle d'Orléans, constitue l'une des pièces maîtresses d'une grande exposition sur les femmes au Moyen Âge, ouverte depuis le 25 octobre et qui se poursuit jusqu’au 2 mars 2025, au British Library, l’équivalent de notre Bibliothèque nationale.
Cette lettre, adressée à la communauté de Riom, fait appel à leur soutien pour l'armée de Jeanne d'Arc, alors en campagne contre les troupes anglaises lors du siège de La Charité-sur-Loire, une petite commune située dans la Nièvre. Le texte de la lettre, dicté par Jeanne d'Arc mais rédigé par un scribe, exhorte les habitants de Riom à fournir des armes, des denrées et des vêtements pour soutenir l'effort militaire.
Ce document a été retrouvé en 1844, après être tombé dans l’oubli pendant des siècles, dans les archives de la ville de Riom. C’est Tailhand, président de la Cour royale de Riom, qui en fit la découverte par hasard au milieu de vieux papiers. Ce n’est qu'après sa redécouverte qu’il fut confié à Jules Quicherat, historien et spécialiste de Jeanne d’Arc, qui le décrivit comme étant accompagné d’un cachet en cire rouge, aujourd’hui disparu, mais dont l’empreinte se fait encore sentir sur le verso du document.
Une caractéristique notable de cette lettre est la signature de Jeanne d'Arc elle-même. Bien qu'illéttrée, la Pucelle d'Orléans avait dicté le contenu de la missive avant de la signer de sa propre main. Aujourd'hui, ce document rare et précieux est l'un des derniers témoignages matériels directement attribués à Jeanne d'Arc, faisant de lui un trésor national.
Un document qui a traversé les époques
Si le contenu de la lettre est précieux par son message historique, sa préservation a également été marquée par des événements surprenants. "Au début du XXe siècle, le document avait été exposé en mairie de Riom, ce qui a provoqué des dégâts notables sur son état de conservation, raconte le responsable du Pôle Archives et Patrimoines de Riom. Exposée à la lumière et à la poussière, la lettre s'est vue dégradée, avec quelques déchirures visibles aujourd'hui. Il fallut attendre la disparition du cachet pour que la municipalité décide de la placer dans un coffre-fort. Dans les années 1980, la lettre fut confiée à un coffre bancaire avant d'être définitivement placée sous la garde des archives municipales de Riom, où elle bénéficie désormais de conditions de conservation adaptées".
Aujourd'hui, la lettre est soigneusement conservée avec des matériaux de conservation de pointe pour éviter toute détérioration supplémentaire.
Un document rare et précieux
Le directeur des archives souligne également la rareté de ce document. À ce jour, seulement deux lettres authentifiées et signées par Jeanne d'Arc sont conservées en France, une à Riom et l'autre aux archives municipales de Reims. Comparativement, des documents signés par des monarques tels que Louis XIV ou Henri IV sont bien plus nombreux. "C’est un trésor national", insiste Cédric Broët. Cette rareté fait de cette lettre une pièce maîtresse de l'exposition du British Library, où elle sera exposée aux côtés d’autres artefacts liés aux femmes du Moyen Âge.
Si l'Angleterre est un premier grand pas, on peut imaginer que cette pièce précieuse pourrait bien repartir en tournée… mais en attendant, cette lettre continue de briller à Londres.