De tous les massifs français, le Jura est le seul à proposer une ambiance aussi nordique. Il suffit de fermer les yeux un instant pour s’imaginer au cœur des grands espaces canadiens, l’horizon à perte de vue. Un véritable océan de montagne…
Océanique, le Jura ? Certainement pas par son climat, au contraire très continental, mais par ses formes.
Vu d’en haut, le Jura s’apparente à d’immenses vagues qui se succèdent depuis les plaines de Franche Comté, grimpant à l’assaut du ciel, tout en douceur, marche après marche, plateau après plateau, pour culminer avec la plus haute, dressée comme un immense raz de marée prêt à déferler sur la Suisse, et qu’un bon Génie aurait figé dans cette posture.
Ces vagues, ce sont les successions d’anticlinaux et de synclinaux créés par les mouvements de la terre, puis sculptés par les glaciers, jusqu’à aujourd’hui. Sur cette terre surélevée, la montagne apparait donc comme « horizontale ». Et même si les falaises sont parfois impressionnantes : le jura est un océan de pierre figé par le temps.
Un véritable océan de montagne
C’est dans cet océan que j’aime naviguer, surtout lorsque l’hiver est là. L’hiver, le vrai, celui qui glace le sang mais réchauffe le cœur, celui qui nous rappelle que la douceur, c’est bien au printemps, mais qu’en janvier elle gâche tout, sonne faux, et salit la beauté des paysages en diluant son essence même : la neige.
Alors, pour ce tournage, nous avons été heureux de bénéficier d’un vrai temps hivernal, dans ces montagnes qui semblent avoir été créées pour accueillir l’hiver. Le soleil encore bas sur l’horizon, les arbres chargés d’une neige fraîche conservée par le froid vif, permettant à chaque cristal de scintiller comme s’il voulait faire partie de l’histoire, dessinent un tableau apaisant. Le jura est inlassablement beau en hiver.
Je vous raconte cela ici parce que je ne peux pas le faire pendant l’émission. Prendre le temps d’observer chaque petit mouvement de sol, comme des risées sur la mer figée, chaque arbre, portant avec légèreté la neige qui n’a même pas été dérangée par le vent, regarder les traces laissées par les animaux et se taire pour écouter le silence cotonneux assourdi par l’épaisse couche de neige, ça prend du temps. Et le temps, on ne l’a pas toujours. Car passés ces moments de contemplation, il faut aller tourner…
Ces grands espaces sont donc faits pour la pratique des sports d’hiver. Si quelques stations de ski existent dans le Jura et proposent de beaux domaines skiables, c’est surtout vers les sports nordiques que se tournent la majorité des visiteurs. Le billet est moins cher que pour le Québec, mais l’espace y est aussi séduisant.
Alors, lâchons les chevaux, randonnons en raquettes, sautons depuis un tremplin aux dimensions olympiques, plantons la tente à l’orée d’une forêt, histoire d’être encore plus heureux de se retrouver le soir dans une cabane au bord d’un lac, les joues rosies par l’air vif, prêt à sauter sur une boite de Mont d’Or chauffée par les flammes, un bon Arbois servi sur la table, heureux d’être fatigué, de cette saine fatigue qui fait du bien et qui nous manque cruellement en ces temps de restrictions.
Dimanche, dans ce numéro consacré aux sports nordiques dans le Jura, vous aurez le temps de vous évader dans ce pays qui aime l’hiver, qui nous emmène aussi loin, sans avion ni bateau. Quoique… Un bateau, sur cet océan de neige, ne serait même pas étonnant.
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