Les trois petits cochons vont devoir revisiter leurs classiques. Depuis une dizaine d’années, le nombre de constructions en bois/paille a triplé dans notre région. Et de plus en plus de collectivités font appel à cette technique moins gourmande en énergie et moins génératrice en carbone. Des constructions complètement en phase avec les impératifs de la transition climatique.
A Gleizé, au nord de Villefranche-sur-Saône, une maison de quartier utilisant la technique des murs à ossature bois avec paille est en cours de réalisation. Avec 220 m2 par étage, sur deux niveaux (450 m2 au total), la maison de quartier d’Ouilly recevra les habitants à compter de l’automne 2025.
Des matériaux nobles et peu polluants
La dalle, constituée de béton et de bois a pour but de limiter la quantité de béton : au lieu d’une épaisseur de 25 cm, ce plan n'en nécessite que la moitié, grâce au bois. Les murs du rez-de-chaussée sont en pisé mélangé à du béton. C’est à l’étage que les murs sont montés en bois (douglas produit localement) et paille sous forme de bottes. Dans le cadre de l’analyse de vie des bâtiments, ces aspects sont incontournables aujourd’hui pour les maîtres d’ouvrage et les architectes concepteurs de projets. Cela permet de moins polluer tout en assurant au bâtiment un confort de qualité en toute saison.
"Car le gros intérêt des ossatures bois / paille, ce sont les économies que l'on réalise ", indique Pauline Gaudet, architecte associée au sein du cabinet lyonnais Escale Architecte. Economies surtout pour le chauffage des locaux et le maintien d’une température agréable et largement supportable en cas de de températures élevées à l'extérieur, voire d’épisode caniculaire.
Bien que difficilement comparable pour un site recevant du public et un logement, une maison la plupart du temps, on parvient dans les habitations à un coût de revient en KWh au m2 très inférieur à ceux constatés dans les constructions traditionnelles en parpaings. Ces prix au m2 sont en deçà de ceux préconisés dans la Réglementation thermique de 2020, censée indiquer des orientations aux professionnels du bâtiment pour tout ce qui touche à la consommation énergétique.
Le secteur de la construction doit se décarbonner, et la paille est un des leviers disponibles pour y arriver. Le potentiel de croissance du secteur est très important, la grande majorité des constructions à ossature bois pouvant techniquement être isolées en paille.
Etienne Béduneau, auteur de l'étude Oïkos
Autre avantage de cette technique : la respirabilité des murs. Réalisés avec des bottes de paille, ils sont particulièrement perméables à la vapeur d’eau générée par la présence d’un grand nombre de personnes dans un local. Ces parois perspirantes constituent un paramètre important de confort par la régulation de l’hygrométrie.
10 % plus cher d’une construction classique
Pour la mairie de Gleizé, un tel projet tombait sous le sens. “L’équipe municipale avait à cœur cette préoccupation environnementale et la recherche de l’exemplarité dans la réalisation de ce nouveau bâtiment ”, explique Lionel Lafay, directeur des services techniques de la commune. Et si cette réalisation en bois/paille a un coût de revient plus élevé que de la construction traditionnelle (environ 10 % sur un total de 1,6 million d’euros), des économies sont envisageables tout au long de la vie dudit bâtiment. Un aspect à prendre en compte pour un bilan complet.
Dans une récente étude sur la structuration de la filière construction en paille en Auvergne/Rhône-Alpes, l’association Oïkos, membre du Réseau Français de Construction Paille (RFCP) souligne que cette technique est une réponse pour réduire l’impact carbone des constructions. “Ce secteur contribue à 45% de la consommation finale d’énergie et au quart des émissions de gaz à effet de serre, consomme 50% des matières premières”, précise Etienne Béduneau, l’auteur du document.
Les atouts : une matière première locale et en abondance
Pour les spécialistes d’Oïkos et de l’écoconstruction, la paille est un matériau plutôt local, qui présente l’intérêt d’être très peu transformé. Co-produit de la production céréalière, elle est aujourd’hui principalement utilisée en élevage pour les litières.
L’intérêt environnemental de la construction paille est majeur. Associé à une ossature bois, ce mode constructif constitue un stockage de carbone biogénique important et participe ainsi efficacement à la lutte contre le réchauffement climatique. L’isolation en paille permet la réalisation d’une enveloppe thermique très efficace. C’est aussi un bon isolant phonique et un matériau de choix pour assurer une bonne qualité de l’air intérieur.