L'église Saint-Luc est profondément meurtrie par les révélations d'agressions sexuelles commises par l'ancien prêtre, Bernard Preynat. Son procès devant le tribunal correctionnel de Lyon du 13 au 17 janvier risque de réveiller des traumatismes. La paroisse de Sainte-Foy-lès-Lyon a pris les devants.
"Bernard Preynat ? On lui aurait donné le bon Dieu sans confession. Et malheureusement, il a détruit nos familles." Jocelyne G. est la mère de deux victimes d'agressions sexuelles commises par l'ancien prêtre de Saint-Luc, et elle tenait à être présente pour cette réunion, ce "temps d'échange" organisé par la paroisse de Sainte-Foy-lès-Lyon dans la soirée du 9 janvier.
"C’était intense, très riche avec des témoignages. Ça m’a bouleversée. Parce que nous sommes tous concernés. Et je crois que c'est important que cette soirée d'échanges fasse effet boule de neige", confirme Elisabeth.
"Un temps d'échanges dans un esprit de vérité"
Cette réunion, c'est l'équipe paroissiale de Saint-Luc qui en a eu l'idée, et qui a tenu à l'organiser juste avant l'ouverture du procès de Bernard Preynat. "Nous avons souhaité cette rencontre pour que chacun puisse être entendu, puisse parler. Pour que les victimes puissent avoir de nouveau la parole. Pour que les souffrances ne soient plus jamais étouffées par le silence. Cette démarche s’inscrit dans un esprit de vérité. Cela suppose d’avoir le courage de regarder en face l’horreur des crimes qui ont eu lieu, leur gravité", peut-on entendre en introduction de la soirée.
Dans l'assistance, une centaine de personnes. Des parents de victimes, des paroissiens de Sainte-Foy-lès-Lyon ayant ou non connu Bernard Preynat. Tous sont là pour tenter de comprendre pourquoi et comment réagir face aux abus sexuels. L'évêque-auxiliaire du diosèce de Lyon, Mgr Emmanuel Gobilliard, est venu avec une sorte de "kit pédagogique", composé de vidéos témoignages de victime, de policier, et juge, tous confrontés à des affaires de pédophilie.
Un psychiatre participe également à la soirée. Gérard Ribes veut expliquer ce que sont les pédophiles. Et puis aussi, "interroger l’Institution qui, pense-t-il, a une responsabilité, parce qu’elle n’a pas su mettre en place ce qu'il fallait pour protéger ses membres".
"C'était un tabou avant. Maintenant il faut parler, c'est cela qui libère et permet d'avancer", renchérit le Père Dominique Ndjoko qui officie à Saint-Luc.
L'église Saint-Luc transformée pour jouer la transparence
Trois ans que l’église Saint-Luc de la paroisse de Sainte-Foy-lès-Lyon essaye de tourner la page. Et en trois ans, les locaux ont bien changé, ont été transformés. La salle où se réunissaient les scouts est devenu un espace d’accueil et de convivialité. Le labo photo, là où l’ancien prêtre Preynat est accusé d’avoir commis des abus sexuels, a été muré.
Avant, c'était beaucoup de béton et des double-portes en bois. L'église est désormais vitrée, ouverte, joue la transparence. Cette transformation, c'était une évidence précise Jacques, de l'équipe paroissiale. "Sans vouloir parler du passé, ici, c’était moche, on était mal" nous confie-t-il. Et Marie d'enchainer : "après tout ce qui s’était passé ici, le cahier des charges de la transformation, c’était ouverture et transparence. On veut tourner la page, aller de l'avant, mais sans oublier les parents, les victimes qui sont à Sainte-Foy. L’équipe paroissiale reste à leur écoute."
Quatre informations essentielles sur le procès
- Dates : du 13 au 17 janvier 2020
- Où ? Au tribunal correctionnel de Lyon
- Qui sera jugé ? Bernard Preynat, ancien prêtre et responsable des scouts de la paroisse Saint-Luc à Sainte-Foy-lès-Lyon, accusé d'agressions sexuelles sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité. Il encourt jusqu'à 10 ans d'emprisonnement et 150 000 € d'amende
- Parties civiles : 10 victimes d'agressions sexuelles et 5 associations de protection de l'enfance
