Affaire Vincenzo Vecchi : sera-t-il extradé vers l'Italie? Un 3e procès en appel s'ouvre à Lyon

Ce vendredi 24 février, la cour d'appel de Lyon doit se prononcer sur le cas Vincenzo Vecchi. Après Rennes et Angers, le dossier revient pour la 3e fois devant une cour d'appel française. Réclamé par l'Italie, Vecchi a été condamné en Italie après les événements du G8 de 2001 à Gênes. Il a écopé d'une lourde peine de prison sur la base d'une loi, promulguée sous Mussolini. Ses soutiens crient à l'injustice. Explications.

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

"Nous étions les amis de Vincenzo, nous sommes devenus des lanceurs d'alerte", explique l'un des membres de son comité de soutien. 

L'activiste italien Vincenzo Vecchi, condamné dans son pays à plus de douze ans de prison après les violentes manifestations contre le G8 de 2001, va-t-il être extradé ? La cour d'appel de Lyon en décidera ce vendredi 24 février 2023. C'est la troisième cour d'appel en moins de quatre ans qui doit se prononcer sur le sort de l'Italien qui vit dans l'hexagone depuis plusieurs années.

"Une injustice", "une situation absurde"

Basé à Rochefort-en-Terre, les amis bretons de Vecchi n'ont pas hésité a faire le déplacement à Lyon, à la veille de son procès devant la cour d'appel. Un comité qui s'active. Ses membres dénoncent "une effroyable injustice" et "un acharnement judiciaire et politique".

Rendez-vous a été donné à la presse, dans une salle de la maison des avocats. Devant les journalistes et quelques élus locaux : avocats de Vincenzo Vecchi, anciens magistrats - dont la très médiatique Eva Joly - , représentant de la Ligue des Droits de l'Homme, membres du comité de soutien. A tour de rôle, ils expliquent, décryptent, martèlent. Car le dossier est très "technique", nécessite de solides bases pour réaliser sa complexité et sa densité. Les notions s'accumulent :  "double incrimination", "irrégularité des mandats d'arrêt européen", " extradition", infraction de "dévastation et pillage". L'affaire Vincenzo Vecchi a déjà fait l'objet de deux présentations devant des cours d'appel et en cour de cassation. Une affaire pesante et bien encombrante.

"Quelqu'un qui n'a blessé, ni agressé personne, on veut réclamer qu'il effectue 12 ans de détention !" s'indigne Pascale Jaouen, ancienne magistrate. 

Pour Eva Joly, "c'est une situation absurde" que les deux procureurs généraux auraient pu régler de manière "élégante", en ne faisant pas appel. "C'était réglé !". 

"Dévastation et saccage"

La peine de 12 ans et demi de prison initialement prononcée a été ramenée à 10 ans par le parquet italien. Vincenzo Vecchi a définitivement condamné en 2012 en Italie notamment pour complicité de dévastation et pillage.

Introduit dans la loi italienne sous Mussolini, la qualification de «dévastation et saccage» permet de sanctionner la simple présence à une manifestation considérée comme insurrectionnelle, au nom de la notion de «concours moral». Le texte permet de réprimer de huit à quinze ans de réclusion, pour complicité, la participation à un trouble majeur à l'ordre public par un simple "concours moral". "Le droit français est fondé sur la responsabilité du fait personnel", rappelle aussi Pascale Jaouen. Cette dernière alerte sur "le danger constitué par cette affaire pour tous les citoyens européens".

La qualification concentre depuis le début les critiques de ses soutiens, parlementaires, écrivains, cinéastes et autres citoyens. Certains ont multiplié tribunes et actions pour alerter sur la dimension "politique" de l'affaire Vecchi. 

"Tout le monde a le droit à un procès équitable et à des peines proportionnelles", a rappelé Eva Joly. Le comité de soutien n'a cessé de dénoncer "une peine démesurée" appliquée à Vincenzo VecchiVa-t-il être extradé ? La cour d'appel de Lyon en décidera ce vendredi 24 février 2023. C'est la troisième cour d'appel en moins de quatre ans qui doit se prononcer sur le sort du militant réfugié en France.

Deux cours d'appel refusent l'extradition

Réfugié en Bretagne depuis plus de dix ans, avant sa condamnation définitive par la justice de son pays, ce ressortissant italien a été interpellé le 8 août 2019 à quelques kilomètres de son domicile de Rochefort-en-Terre, en application d'un mandat d'arrêt européen émis en 2016 par l'Italie

Dans son arrêt de novembre 2022, la plus haute juridiction de l'ordre judiciaire français a cassé la décision de la cour d'appel d'Angers, qui avait refusé le 4 novembre 2020 l'extradition de l'activiste. La cour d'appel d'Angers s'est opposée, après celle de Rennes en 2019, à la remise à l'Italie de Vincenzo Vecchi.

Les juges d'Angers avaient justifié leur refus d'exécuter ce mandat d'arrêt au motif que la peine principale à laquelle le militant a été condamné pour "dévastation et pillage", n'avait pas d'équivalent en France. 

Vincenzo Vecchi se trouvait simplement "à proximité" des lieux, "une notion aux contours flous" qui ne saurait "à elle seule constituer un élément constitutif de la complicité" et sans équivalent en droit pénal français, avait-elle considéré.

Après un nouvel appel du parquet général, la Cour de cassation avait pris avis auprès de la Cour de justice de l'Union européenne. Fin novembre, la Cour de cassation a annulé la décision de refus de remettre aux autorités italiennes ce militant réfugié en France. Elle a renvoyé l'examen du dossier devant la cour d'appel de Lyon. Retour à la case départ.

"La cour d'appel de Lyon doit résister et dire que Vincenzo Vecchi ne doit pas être livré, car nous ne connaissons pas cette infraction (de dévastation et pillage)", a déclaré l'ancienne juge d'instruction Eva Joly. Pourtant fervente militante du MAE (mandat d'arrêt européen), l'ancienne députée européenne a clairement déploré le dévoiement de cet outil de lutte contre les criminalités.

Le refus d'extradition est-il fondé ?

Pour qu'une personne interpellée soit extradée, les faits qui lui sont reprochés doivent constituer une infraction dans le pays émetteur du mandat d'arrêt et dans celui qui doit l'exécuter. Or, dans son arrêt rendu le 14 juillet, la CJUE a estimé qu'il n'était pas exigé de "correspondance parfaite", et que la France ne pouvait donc pas s'opposer à l'extradition vers l'Italie de Vincenzo Vecchi. 

Qui est Vincenzo Vecchi ?

Vincenzo Vecchi faisait partie des "dix de Gênes", des activistes condamnés en Italie, souvent lourdement, après les violentes manifestations contre le sommet du G8 de 2001, à Gênes. Des manifestations qui ont rassemblé près de 300 000 personnes. Durement réprimées, ces manifestations s'étaient soldées par la mort d'un jeune homme, Carlo Giuliani, tué d'une balle dans la tête par un carabinier italien.

En 2009, il avait été condamné à douze ans et demi de prison par la cour d'appel de Gênes pour "complicité de vol avec violence, incendie volontaire, complicité de dévastation et pillage, dommage volontaire et usage d'armes prohibées dans un lieu public". 

Recherché par la police italienne, Vincenzo Vecchi avait été arrêté le 8 août 2019 à Rochefort-en-Terre, dans le Morbihan, où il travaillait comme peintre en bâtiment depuis de nombreuses années. Aujourd'hui âgé de 52 ans, "c'est quelqu'un d'inséré, qui travaille, qui a une compagne, des amis", rappelle le comité de soutien. 

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Veuillez choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité
Je veux en savoir plus sur
le sujet
Veuillez choisir une région
en region
Veuillez choisir une région
sélectionner une région ou un sujet pour confirmer
Toute l'information