Laurent Wauquiez appliquera finalement le dispositif “zéro artificialisation nette”. Le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes explique ce rétropédalage par un “infléchissement du gouvernement”. Mais dans les faits, l’élu n’aurait pas eu d’autres choix que de respecter la loi.
L’annonce avait fait l’effet d’un coup de tonnerre. En septembre dernier, le président de la région Auvergne Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez, avait annoncé son retrait du dispositif “zéro artificialisation nette” (ZAN) de la loi “climat et résilience” votée en 2021. Il invoquait notamment une loi “ruralicide” menaçant le développement industriel de sa région.
Laurent Wauquiez a finalement fait marche arrière le 19 février dernier dans un courrier adressé aux maires de la région, qu’a pu consulter Le Monde. Il explique ce volte-face par la crainte d’une multiplication des contentieux et des contraintes administratives.
Impossibilité de contourner la loi
Mais sa prise de position initiale relevait surtout d’un effet d’annonce. L’élu n’aurait pas pu contourner le dispositif. Tout d’abord parce que la politique régionale se heurte à la hiérarchie des normes en droit français : une loi nationale ne peut être remise en cause à l’échelon de la Région. Mais aussi parce que la Région n’a pas de compétence en matière d’urbanisme. “
Le seul levier que la Région pourrait avoir, c'est le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADET), mais il n’est pas suffisant. Son application repose sur des documents d’urbanisme locaux qui doivent prendre en compte la loi
Pierre-Etienne Moullé, avocat au barreau de Lyon et chargé d’enseignement en droit de l’environnement à l’UCLY
"Cette déclaration n’avait aucun fondement juridique"
Le dispositif ZAN a pour objectif la mise en œuvre de la lutte contre l’artificialisation des sols. Il cible la division par deux de l’étalement urbain à l’horizon 2031, avant un arrêt total d’ici 2050. La loi vise à préserver les terrains agricoles et forestiers, mais aussi à réduire les effets du réchauffement climatique car ces sols artificialisés n’ont plus de capacité d’absorption du CO2. Son pilotage est orchestré par les collectivités locales, puisque chaque Région est censée fixer ses objectifs de réductions d’artificialisation. “
Le rôle du préfet est d’assurer que la Région reste dans le cadre de ses compétences, sinon il peut y avoir un déféré préfectoral. Aucune mesure concrète contraire à la ZAN n’aurait pu être prise, car elles auraient encouru une annulation par le tribunal administratif
Pierre-Etienne Moullé
Tout plan d’urbanisme ne respectant pas la disposition ZAN aurait également pu être attaqué en justice par les riverains, les associations, ou encore des élus de l’opposition. Il aurait donc été impossible que la loi ne soit pas appliquée en Auvergne Rhône-Alpes. “Cette déclaration n’avait aucun fondement juridique. Il s’agissait pour Laurent Wauquiez de lancer une polémique politique cela a échoué. Au moins, cela a eu le mérite de rappeler que cette loi de préservation de l’environnement existe, alors qu’elle était méconnue du grand public” conclut Pierre-Etienne Moullé.