Coronavirus. La recherche sur tous les fronts : enjeux et intérêts

Depuis le début de la pandémie, des équipes de recherche sont mobilisées partout sur la planète pour comprendre et combattre le coronavirus. Dans cette course au savoir inédite, la science se doit de sortir vainqueur. Mais les intérêts sont aussi multiples.

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"Monter des études en un temps record est un vrai défi.  Les équipes sont fortement engagées sur ce terrain-là. On peut le dire, à ce stade on est très soutenus." C’est le professeur Jean-Christophe Richard, chef du service réanimation de l’hôpital de la Croix-Rousse qui s’exprime ainsi à l’occasion d’une conférence de presse, courant avril 2020.
Mettre en place des projets de recherche en pleine épidémie de Coronavirus, le défi est de taille. Mais la période est propice. Ici, on a lancé des études, sur les malades en réanimation, les médicaments anti-inflammatoires, la ventilation, etc… en moins de 15 jours contre plusieurs mois d’ordinaire.
 

Une avalanche de projets



Depuis début mars, les Hospices Civils de Lyon, dont fait partie l’établissement de la Croix-Rousse, travaillent tous azimut pour comprendre le Covid-19.
Lucilla Mansuy, directrice de la recherche clinique et de l’innovation explique "On anticipe pour faire face à l’avenir, et mettre en place dès aujourd’hui une prise en charge optimisée pour les patients infectés."

Pas moins de 85 projets ont été étudiés par un comité d’experts. Une véritable avalanche. 7 ont été classés prioritaires. 4 sont déjà actifs, financés sur fonds propres et grâce aux mécénats. Une telle rapidité, c’est du jamais vu.
 

Le risque de l’effet d’aubaine



De l’avis de Jean-Louis Touraine, immunologiste à l’hôpital Edouard Herriot de Lyon, les périodes d’épidémie sont propices à un foisonnement scientifique et thérapeutique. Ce médecin a été au cœur de la recherche sur les cellules souches dans les années 70, le Sida dans les années 80, le cancer ensuite. Il se rappelle du nombre de projets de recherche important lancés par des équipes, dont les travaux n’avaient pas forcément de lien avec la maladie à traiter.

Dans ce genre de situation, des chercheurs de spécialités très différentes demandent des crédits. Certaines équipes qui tirent la langue depuis des années et manquent de financements peuvent tirer profit de cet effet d’aubaine pour obtenir de l’argent. Vous seriez chercheur, vous vous demanderiez aussi : est-ce que je ne suis pas éligible à une étude Covid ?


Jean-Louis Touraine indique que d’ordinaire, 1 projet de recherche sur 10 est retenu. En période de Coronavirus, ce chiffre pourrait être de 1 sur 3 selon lui.
L’effervescence autour de la recherche sur le Covid-19, la vitesse à laquelle les équipes doivent réagir pour soumettre les projets pourraient donc être aussi source d’opportunisme. De dispersion de financements aussi. Ils sont nombreux pour le Covid-19 : français, européens, mécénats, sans compter les fondations qui multiplient leurs appels à projets auprès des scientifiques et lèvent des dons auprès du public. De quoi donner le vertige à une recherche d’ordinaire exsangue.
 

Une capacité à réagir dans l’urgence inédite


Une polémique à laquelle Manuel Rosa-Calatrava ne souscrit pas. Le directeur de recherche à l'Inserm et directeur adjoint de VirPath, laboratoire de virologie et pathologie humaine, basé à Lyon, est très engagé dans la recherche sur le Covid-19. Il a répondu à des appels à projets nationaux et européens avec succès.
Le scientifique préfère souligner les possibilités induites par cette période pandémique. "Pour la première fois, on peut observer une vraie mobilisation. Gouvernement, recherche publique, labos privés, fondations travaillent ensemble. C’est vrai pour la recherche appliquée thérapeutique et fondamentale." 
Pour lui, la crise sanitaire a permis cette synergie. Le laboratoire a ainsi été en capacité de répondre à l’urgence dès le mois de janvier.
 

« Il ne faut pas se leurrer. Chaque génération aura son épidémie. »


Mais en matière de recherche, la précipitation peut être aussi délétère que la lenteur. D’autant qu’en matière de Coronavirus, la lenteur n’est pas permise. Trouver la molécule qui soulage, le vaccin qui protège est un enjeu planétaire qui place une nation dans le peloton de tête de la recherche mondiale. Jean-Louis Touraine qui a vu passé le sida en 1981, le Sras en 2003, le H1N1 en 2009, Ebola en 2012, sans parler du Mers-Cov, un autre syndrome respiratoire, est persuadé que chaque génération aura son épidémie.

Dès lors, la course au savoir, au remède miracle, espéré par la terre entière, peut rapporter gros. Pour un hôpital comme celui de la Croix-Rousse engagé dans des projets multiples dont celui de Discovery (essai clinique européen portant sur différentes molécules et impliquant 3200 patients dont 800 en France), les retombées peuvent être fortes et visibles (bien que sa notoriété en termes d’infectiologie ne soit plus à faire).
 

Une innovation scientifique c’est une possibilité de recrutement intéressante, cela permet d’attirer des moyens financiers autres que la dotation de l’Etat. L’innovation intéresse les industriels, les labos qui investissent dans les équipes de recherche de l’établissement, décrypte Jean-Louis Touraine.


Car l’innovation donne avant tout de la visibilité, de la notoriété. L’aboutissement d’une recherche c’est aussi de la com’. Pour une ville comme Lyon qui dispose d’un écosystème scientifique et industriel important, l’enjeu est de taille.

"Nous avons une collaboration multidisciplinaire. A Lyon, on travaille tous dans le même sens" renchérit Manuel Rosa-Calatrava. De quoi se donner des ailes dans ce sprint planétaire hors du commun.
 

Florence Ader auditionnée au Sénat


Auditionnée par la commission des Affaires sociales du Sénat à Paris, mercredi 6 mai, l’infectiologue lyonnaise, Florence Ader, a déclaré "nous ne rencontrons pas de mauvaise volonté, nous rencontrons des difficultés réglementaires."
 
Piloté depuis Lyon et coordonné par l’Inserm, l’essai Discovery prévoyait d’inclure 3 200 patients atteints d’une forme grave du virus pris en charge à l’hôpital dans sept pays européens. Sur ce point Florence Ader a affirmé ce que le projet comptait "actuellement 740 patients" dans 30 hôpitaux, dont "un seul hors de France", à savoir au Luxembourg.

Si "le rythme des inclusions dans l’essai a considérablement ralenti en France" en raison de la baisse du nombre de nouveaux patients dans le cadre des mesures de confinement, le médecin du service des maladies infectieuses de l’hôpital de la Croix-Rousse (Rhône) a insisté sur le fait que la participation des autres pays dans le projet était essentielle afin d’obtenir des résultats significatifs.

"Nous ne sommes pas encore tout à fait au point sur l’harmonisation réglementaire. Ce n’est pas le fait de nos collègues européens", a expliqué Florence Ader ajoutant qu’aucun pays ne s’était retiré de l’essai. "Nous continuons les discussions pour harmoniser les protocoles et travailler tous ensemble" a-t-elle précisé.
 
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