Élections en Turquie. Victimes d'agression lors du vote, les anti-Erdogan de Lyon veulent croire au changement

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan pourrait perdre le pouvoir à l'issue des élections présidentielles et législatives de ce 14 mai 2023. Territoires ancrés pro-Erdogan, Lyon et l'Auvergne Rhône-Alpes voient une minorité contestataire s'affirmer contre le pouvoir en place.

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Un vent de contestation souffle sur la Turquie. Pour la première fois, Recep Tayyip Erdogan, le président sortant et son parti de la justice et du développement (AKP), pourraient perdre le pouvoir à l'issue des élections présidentielles et législatives qui ont lieu dimanche 14 mai. La faute à son rival annoncé, Kemal Kiliçdaroglu du parti républicain du peuple (CHP), chef d'une coalition d'opposition, que les sondages donnent vainqueur. 

À Lyon, les électeurs se sont réunis à l'Union des affaires culturelles turco-islamiques de Lyon, à Décines (Rhône). Environ 70.000 Turcs de Lyon et d'AURA se sont exprimés dans les urnes, du 27 avril au 9 mai. C'est l'une des plus importantes diasporas de France. Et la plupart sont en faveur du pouvoir en place. En 2018, date des dernières élections, 86,7 % des Turcs de Lyon ont voté pour Erdogan, un record à l'étranger. "Lyon est une ville qui se démarque par une forte présence de la droite et extrême droite turques, explique Rémi Carcélès, chercheur en sciences politiques. Dans ma thèse, j'essaye de démontrer l'implantation à Lyon et ses environs, depuis 60 à 70 ans, de personnes issues des régions du centre de la Turquie, historiquement positionnées à droite de l'échiquier politique". 

Agressions à l'encontre d'anti-Erdogan

Pourtant, dans la capitale des Gaules, l'opposition à Erdogan, aussi infime soit-elle, est réelle. Tuna Altinel est universitaire. Représentant du parti de la gauche verte (YSP), le mathématicien dit avoir été victime d'agressions de militants pro-Erdogan, mardi 9 mai, dernier jour de vote en France.

"On nous a surpris à la sortie des votes qui se terminaient à 22 heures. Des gens qui criaient "Erdogan ! Erdogan !" s'en sont pris à nous. Des camarades ont été obligés de poser deux périodes totales d'ITT (Incapacité totale de travail) de cinq jours", relate Altintel. L'AKP, parti en place, est selon lui "extrêmement organisé" dans la région. Une société dans la société. "J'espère que ces élections pourront casser la puissance du parti. Si le pouvoir change de main, il y a de l'espoir que ce réseau politique, économique et social perde de son influence".

Même s'il perd, j'ai peur qu'il ne veuille pas quitter le pouvoir. J'ai encore de la famille qui habite en Turquie, et j'ai peur pour elle : économiquement, ça s'est dégradé sous (la présidence d') Erdogan."

Une personne kurde

"Même s'il (Recep Tayyip Erdogan) perd, j'ai peur qu'il ne veuille pas quitter le pouvoir, déclare par ailleurs une personne kurde interrogée par nos soins et qui a souhaité préserver son anonymat. J'ai encore de la famille qui habite en Turquie, et je suis inquiet pour elle : économiquement, ça s'est dégradé sous (la présidence d') Erdogan." En Turquie, les prix ont explosé ces dernières années, jusqu'à atteindre 85% d'inflation en octobre 2022. 

Par ailleurs, le CHP, le parti de Kemal Kiliçdaroglu, possède une antenne locale, témoin de la mouvance anti-Erdogan qui s'institutionnalise en Auvergne-Rhône-Alpes. 

La communauté kurde, historiquement hostile à Erdogan, voit aussi d'un bon œil l'élan de contestation auquel elle se joint volontiers. Coprésidente de l'association France-Kurdistan Rhône, Roseline Kisa, souligne la tension dans laquelle se sont déroulés les votes. "Les intimidations et les agressions étaient constantes. Le fait que ça se soit déroulé à l'Union des affaires culturelles turco-islamique montre la partialité du vote. Le climat a du mal à s'apaiser et on a une grande inquiétude sur le bon déroulement démocratique de l'élection", conclut-elle. 

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