Les chauffeurs de taxi ont appelé à plusieurs opérations escargots à travers la France pour alerter sur les nouvelles mesures tarifaires de la caisse d'assurance maladie. A Lyon, trois chauffeurs racontent leur attachement à cette mission qu'ils ne veulent pas "bâcler pour des raisons économiques".
Réunies dans le quartier de Gerland à Lyon, dans le 7e arrondissement, des dizaines de véhicules ont afflué dès six heures du matin. Comme dans de nombreuses villes à travers le pays, l'idée est de lancer une opération escargot jusqu'aux locaux de la CPAM du Rhône, à Villeurbanne.
La détermination est affichée, mais le ton de ce premier jour de mobilisation se veut raisonné : "C'est une colère maîtrisée", explique le président local de la fédération des taxis indépendants. Pour Abdelatif Grine :"il ne s'agit pas d'un bras de fer, mais d'un cri d'alarme pour ouvrir une discussion constructive". Comme lui, les chauffeurs qui ont rejoint l'opération escargot à l'appel de plusieurs syndicats sont préoccupés. L'un d'entre eux, originaire de Vénissieux, estime que "ça peut être la fin du taxi".
Des gens qui ont des cancers, on ne les transporte pas comme des marchandises
Bilal Bouammar, chauffeur de taxi à Lyon
Une telle inquiétude a été déclenchée par la publication au journal officiel en janvier 2024 de nouvelles mesures tarifaires de la CPAM. Une convention de la sécurité sociale annoncée sans négociation avec la profession prévoit notamment un changement de barème pour les transports sanitaires. En clair, les remises sur les tarifs de base pourraient ne plus être plafonnées et les taxis craignent une ubérisation des transports sanitaires.
Un travail entre le transport et le social
"Si demain on nous demande de baisser nos tarifs, on va devoir travailler 15 heures par jour, avec le stress, et les risques que ça représente. Quand on voit les infirmières et les infirmiers qui ne peuvent plus passer cinq minutes avec les patients, car sinon ils n'arrivent pas à avoir un salaire décent, on ne veut pas en arriver là !"
Mais au-delà de leur précarisation, dans chaque témoignage de chauffeur, la principale crainte, c'est d'en venir à sacrifier leurs relations avec les patients."Notre action va bien au-delà du transport", explique Bilal Bouammar, qui travaille en région lyonnaise. Son collègue, Abdelatif Grine ajoute :"On ne fait pas que transporter les gens d'un point A à un point B. On les aide à remonter chez eux, ils nous offrent parfois un café, ceux qui sont très seuls nous demandent de remplir des documents... Nous avons une action sociale, et nous sommes tous bénévoles pour cela".
Les professionnels pointent une injonction contradictoire :"On nous demande de répondre à la demande, mais on nous pénalise si on y répond correctement, ce double discours, il faut que ça s'arrête !" s'insurge Bilal Bouammar.
Des opérations escargots sont attendues dans presque tous les chefs-lieux de la région Auvergne Rhône-Alpes, a annoncé la préfecture de Région, appelant les automobilistes à anticiper leurs déplacements. Les artisans ont jusqu’au 31 janvier pour ratifier la nouvelle convention, sous peine de ne plus se faire rembourser les trajets.