HISTOIRE. Jean Moulin, figure emblématique de la Résistance, est mort il y a 80 ans : retour sur une vie d’exception

Jean Moulin est mort il y a 80 ans. À Lyon, plusieurs rendez-vous ont ponctué l’anniversaire de sa disparition. Le Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation, présente l’exposition “Jean Moulin, les voies de la liberté” du 30 novembre au 26 mai 2024. L'occasion de porter un regard sur le parcours d’un héros.

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Le 19 décembre 1964 au Panthéon, la nation, par la voix vibrante d’André Malraux, rend hommage à Jean Moulin. “Entre ici Jean Moulin avec ton terrible cortège (…) entre avec le peuple né de l’ombre et disparu avec elle”.  

Il est devenu l’emblème de la République, lui qui n'avait jamais rêvé d'un destin national.

Un engagement sans faille au service de la République 

Jean Moulin naît le 20 juin 1899 à Béziers. Son père est professeur de lettres, radical-socialiste, franc-maçon. Dans la famille, l’intérêt pour la politique est vif. À l’école, il est un élève moyen, car dissipé, peu disposé à mener une vie rangée. Mais ce n’est pas un rebelle et il s’accommode d’une voie raisonnable. Le bac en poche, il étudie lettres et droit à Montpellier. Pour payer ses études, il entre dans l’administration préfectorale avec l’appui de son père. Il va y faire carrière : à 26 ans, il est sous-préfet à Albertville. Entré sans vocation, il se révèle talentueux et ambitieux, raconte l’historienne Bénédicte Vergez-Chaignon dans son livre “Jean Moulin, l’affranchi”. 

“Sa carrière témoigne d’une ambition à réussir au service de l’État, il fait ce qu’il faut pour progresser, ce qui explique qu’il ait été le plus jeune sous-préfet puis le plus jeune préfet de France (…) il a hérité de sa famille, un amour combattant de la République, synonyme pour lui de démocratie, droits de l’Homme et progrès.” 

 

Dans les années 1930, il est chef de cabinet de Pierre Cot au Ministère de l’air du Front Populaire et s’implique dans l’aide clandestine à l’Espagne républicaine. 

17 juin 1940, premier acte de Résistance : Jean Moulin est préfet à Chartres. Les Allemands lui demandent de signer un texte condamnant de prétendus massacres, commis par des tirailleurs sénégalais sur la population civile. Il refuse et est torturé pendant des heures. Plutôt mourir que céder, il se lacère la gorge et échappe à la mort par miracle. Quelques mois plus tard, Vichy relève de ses fonctions ce préfet de gauche. 

Des résistances à la Résistance

Jean Moulin se réfugie en zone sud sous l’identité de Joseph Mercier, professeur de droit et prend contact avec les premiers mouvements de Résistance. Août 1941, il rejoint Londres et rencontre le Général de Gaulle qui le charge d’une mission : assurer la liaison des trois principaux mouvements clandestins et créer une branche militaire sous les ordres du chef de la France libre : renseignement, entraide, sabotages.  

Stéphane Nivet, historien lyonnais, auteur de “Jean Moulin, l’inconnu de Lyon” parle de cet incroyable mois de janvier 1942.

 “Aujourd’hui, avec le recul de l’Histoire, on mesure la difficulté de sa tâche, l’intensité de son engagement : A Londres, il a appris à sauter en parachute. En janvier 1942, il est largué dans les Alpilles avec 2 compagnons, ils tombent dans un marais, marchent 10 km, puis il est à Montpellier, Lyon, dans le Var, à Marseille, un mois incroyable”. 

Sous le nom de Rex puis Max, il réussit à convaincre les chefs de Combat, Franc-tireur et Libération sud de rassembler leurs forces au sein de l’Armée secrète. Difficile et dangereux travail de contact et de coordination. 

“Il a mis presque un an et demi à construire le consensus, politique, pas simple, précise Stéphane Nivet, car cela allait de la droite très conservatrice aux communistes. Jean Moulin a fait preuve d’habileté, d’autorité et d’intelligence pour construire par étapes l’unification militaire et politique de la Résistance. Il a réussi à insérer tous les mouvements dans un processus de légitimation du chef de la France Libre. Plus qu’un préfet, il a été un diplomate.”

Délégué en France du Général de Gaulle, Jean Moulin préside le 27 mai 1943, en plein Paris occupé, le premier Conseil National de la Résistance, il n’a plus que quelques semaines à vivre. Le 21 juin, il est arrêté par la Gestapo, lors d’une réunion à Caluire. Klaus Barbie en personne participe aux séances de torture. Il meurt le 8 juillet dans un train lors de son transfert en Allemagne. 

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