Le cyberharcèlement est un délit. C'est la fréquence des propos et leur teneur insultante, obscène ou menaçante qui constitue le harcèlement. Les ateliers pour apprendre à faire face se multiplient. Regards croisés sur un phénomène qui pourrit la vie. Deux influenceuses ont décidé de prendre le contrepied.
Des propos insultants, obscènes ou menaçants sur internet. Mais aussi la propagation de rumeurs, intimidations, diffusion sur les réseaux sociaux d'images à caractère privé... Le cyberharcèlement a plusieurs visages. Il peut prendre la forme de commentaires, de vidéos, de montages d'images, de messages sur des forums...
Menaces de mort
Pour Laura, qui pratique la chasse, le cyberharcèlement fait partie de son quotidien. "Sur les réseaux sociaux, on a des menaces de mort, des menaces de s'en prendre au chien. C'est malheureux à dire, mais on en prend l'habitude", nous avait-elle confié lors de notre rencontre en décembre dernier. La jeune rhodanienne, qui a ouvert un compte sur Instagram, poste régulièrement des photos de sa passion pour la chasse : le gibier, son setter anglais. Elle est jeune, blonde, un physique avenant. Mais sa manière de promouvoir son loisir crispe et irrite. Au point parfois de déclencher la haine. "Cette passion, on sait que forcément ça ne plait pas à tout le monde, ça peut ne pas plaire à tout le monde... Je le comprends totalement, mais on fait avec (les menaces)", avait ajouté Laura, presque fataliste.
Quelle attitude adopte-t-elle face aux menaces et commentaires déplaisants répétés ? "On switche", expliquait-elle simplement, en joignant le geste à la parole. Un revers de main, comme pour passer à autre chose. "Soit, on bloque la personne. Soit, on supprime les commentaires négatifs sous la photo. Mais on fait avec" précisait-elle. La confidentialité et un semblant d'anonymat sont aujourd'hui la règle pour la jeune femme. Un paradoxe pour des influenceuses qui s'affichent sur les réseaux sociaux. Parfois une question de sécurité. "On montre le moins possible notre environnement privé pour éviter de recevoir des menaces chez soi", assure Laura. Le jour du tournage, la chasseuse avait ainsi préféré taire son lieu de résidence et ne pas dévoiler son patronyme.
Grossophobes et pervers
Elle ne reçoit pas de menaces de mort, mais Virginie préfère aussi faire preuve d'un minimum de discrétion sur les réseaux sociaux concernant sa vie privée. Et pour cause. "Il y a des fétichistes de femmes rondes. J'ai beaucoup de demandes de soumission (...) Des fois, ça me fait un peu peur. Je les bloque pour le moment", explique-t-elle tout en gardant le sourire.
Fan de mode, l'influenceuse curvy lyonnaise compte à ce jour plus de 66 000 followers sur Instagram et 410 000 tiktokeurs. Si la plupart la suivent assidument, la trentenaire à la pointe de la tendance ne reçoit pas seulement encouragements ou commentaires positifs. "En étant visible, il y a des gens qui nous aiment et d'autres pas. J'ai un peu de tout : de la grossophobie ordinaire, du harcèlement en ligne, des critiques et des pervers ! " énumère Virginie.
La jeune femme entend préserver son compte Instagram. "Je veux qu'il soit comme un magazine de mode, j'essaie de le travailler, qu'il soit beau et je n'ai pas envie d'y mettre un screen de fesses qu'on m'a envoyé" ! explique-t-elle en riant.
Alors, elle a trouvé une parade et créé un autre compte Instagram. Plus confidentiel, mais plus militant surtout. Elle rassemble un florilège de paroles de "haters". "J'ai créé cet autre compte pour qu'on voie ce que c'est d'être gros et visible dans la société. Sur ce compte, je répertorie toutes les demandes farfelues de pervers, mais aussi tous les messages grossophobes et insultants que je peux recevoir". Ad nauseam. Des propos choquants et orduriers. Mais l'objectif de Virginie est clair : dénoncer ce que peut vivre une femme ronde sur les réseaux. Elle est devenue "une militante" malgré elle.
"Actuellement, vous pouvez insulter une personne grosse sur les réseaux sociaux, ce sera de la liberté d'expression. Vous pouvez être grossophobe sur les réseaux, sans représailles", déplore la jeune femme qui n'entend pas cacher son physique plantureux. Aux internautes qui font de la grossophobie, elle répond simplement "ce sont eux qui projettent leurs complexes sur moi. Je n'ai pas de complexes".
Sur quoi se fonde le cyberharcèlement ?
- L'apparence physique (poids, taille, couleur ou type de cheveux),
- Le sexe, l'identité de genre (garçon jugé trop efféminé, fille jugée trop masculine, sexisme), orientation sexuelle ou supposée,
- Un handicap (physique, psychique ou mental),
- Un trouble de la communication qui affecte la parole (bégaiement/bredouillement),
- L'appartenance à un groupe social ou culturel particulier,
- Des centres d'intérêts différents.
Que risque un cyberharceleur ?
L'auteur d'un harcèlement en ligne risque 2 ans de prison et 30 000 euros d'amende. La peine maximale est portée à 3 ans de prison et 45 000 euros d'amende si la victime a moins de 15 ans.
Si l'auteur est mineur, les sanctions varient suivant si ce dernier a plus ou moins de 13 ans, et que la victime a plus ou moins de 15 ans. Dans tous les cas, ce sont les parents des auteurs mineurs, quel que soit leur âge, qui seront responsables civilement. Ce sont eux qui devront indemniser les parents de la victime.
Lorsque l'auteur mineur a plus de 13 ans et la victime plus de 15 ans : la peine maximale pour harcèlement sera d'un an de prison et 7 500 euros d'amende. Il risque jusqu'à 18 mois de prison et 7 500 euros si la victime a moins de 15 ans. Si l'auteur a moins de 13 ans, la sanction est prise en fonction de son âge et de sa situation.