La restauration de la statue équestre de Louis XIV touche à sa fin. L'œuvre de Lemot est sur place, à l'abri des regards, derrière de hautes palissades de chantier. Le roi soleil doit encore bénéficier de travaux de finitions avant de retrouver son piédestal et d'être rendu aux Lyonnais.
C'est la dernière ligne droite du chantier de restauration pour la célèbre statue signée Lemot. "La patine de la statue a été nettoyée avec un abrasif végétal pour enlever la corrosion. On en est aux phases de finitions, de reprise en patine des zones réparées. On va ensuite procéder au cirage. C'est une couche de protection," explique Philippe Pagnon, spécialiste du patrimoine métallique. Le responsable du chantier de restauration de la statue de Louis XIV maîtrise parfaitement la question. Cet expert travaille pour la Fonderie de Coubertin. Il a déjà procédé à un autre chantier d'importance à Lyon, celui de la restauration de la fontaine Bartholi qui trône sur la place des Terreaux. Mais contrairement à celle-ci, la statue n'a jamais quitté Lyon.
Détails et finitions
Des sabots à la crinière, en passant par le vêtement royal, le tapis de selle, la cuirasse ou encore les harnachements, l'œuvre de bronze va retrouver son lustre. Patine et cire vont lui redonner toute leur splendeur aux multiples détails de cette statue équestre. Cette toilette de printemps est loin d'être un décapage. C'est au contraire un travail en douceur. Les restaurateurs préfèrent toutefois garder leurs secrets. Pour Clara Launay, apprentie dont c'est le premier chantier, le plus difficile est de s'approcher au maximum de la patine d'origine pour gommer les traces laissées lors des réparations du bronze. "Il faut faire attention à ne pas endommager l'ancienne patine. On utilise des oxydes métalliques pour faire du vert-de-gris pour se rapprocher au maximum de la patine d'origine", explique-t-elle.
Nécessaire restauration
Au préalable, les bronziers de la Fonderie de Coubertin ont bien évidemment réparé et colmaté les fissures. Mais les restaurateurs sont aussi intervenus sur les éléments invisibles. À savoir, sur le squelette en fer de la statue, notamment pour le nettoyer et le protéger de la corrosion. Une intervention qui a nécessité le déboulonnage de la statue... ou plutôt son descellement. Une manœuvre délicate qui a imposé des choix. "Des barres métalliques d'1 mètre 50 étaient scellées au plomb dans le marbre. Pour les dégager, il a fallu sacrifier une plaque de marbre qui était très endommagée. On a coupé les barres à 50 cm", explique Philippe Pagnon.
Les travaux sur cette gigantesque statue de 9 tonnes et de 5 mètres de hauteur s'imposaient pour plusieurs raisons. Exposée aux intempéries depuis deux siècles, l'œuvre de bronze avait subi les outrages du temps et présentait des signes de faiblesse. Une question de sécurité aussi. Certains n'hésitaient pas à grimper sur la statue et enfourcher l'imposant destrier royal.
Cavalier insolite
"On a dû intervenir sur les armatures métalliques. On les a traitées avec un produit antirouille", explique Victor Gourier. Faire descendre Louis XIV de son piédestal n'était donc pas suffisant pour cette intervention. Il fallait aussi le faire descendre de sa monture pour opérer. C'est grâce à une trappe située sur la croupe du cheval, "un trou d'homme", que sa majesté a pu être désolidarisée de son cheval. Cette trappe a permis aux restaurateurs d'accéder aux fixations placées à l'intérieur de l'équidé pour procéder à la séparation du cavalier et de sa monture. Une fois la partie supérieure de la statue équestre ôtée, un trou plus large permet un accès plus facile. Le flamboyant Bucéphale a pris l'allure d'un cheval de Troie.
Prochaine remise en selle
Aujourd'hui, la posture du roi, trônant sur son tréteau dans un coin du chantier, est désarçonnant. Si Louis XIV est encore dépourvu de ses atours et privé de destrier, ce n'est que pour quelques semaines. La restauration de la statue équestre de Lemot touche à sa fin et Victor, le jeune apprenti de la Fonderie de Coubertin, ne cache ni son admiration ni sa fierté : "Ce chantier, c'est enrichissant culturellement et techniquement. On se rend compte qu'il y a 200 ans, il y avait un savoir-faire impressionnant. Plus tard, je pourrais me dire, j'ai aidé à restaurer cette statue, je pourrais en parler à mes petits-enfants !".
Le monarque absolu va retrouver toute sa superbe. Pour le bonheur des Lyonnais, la statue équestre sera bientôt de retour à sa place, au centre de la place Bellecour. Une place privilégiée. Le souverain sera remis en selle début avril, avant de regagner définitivement son piédestal. Une autre entreprise travaille à la restauration de cet élément en marbre de Carrare. Une date est déjà annoncée : le 29 avril. Coût du chantier : 1,4 million. Une somme financée par la Métropole et la ville de Lyon pour voir à nouveau le roi soleil illuminer la place Bellecour.