À la veille de la rentrée, des enfants en situation de handicap sont confrontés à l'absence de solutions adaptées de scolarisation. Pour la 5ᵉ année consécutive, l’Unapei lance l’opération #jaipasecole pour dénoncer cette situation. Exemple à Saint-Fons, près de Lyon, avec le petit Kahil, âgé de sept ans.
"Kahil est sous gastrostomie, il faut une équipe médicale autour de lui. Il lui faut un IME, c'est la structure qui sera le plus adaptée pour lui, mais il n'y a pas de place. Il y a trop de demandes, pas assez de structures. La liste d'attente est conséquente" Kahil est un petit garçon lourdement handicapé. À sept ans, il n'a connu l'école que quelques heures par-ci par-là. Son développement, son éducation, sa motricité, c'est sa maman qui s'en charge.
L'enfant devrait intégrer un institut médico-éducatif (IME) pour bénéficier d'un accompagnement scolaire conjugué à la présence d'une équipe pluridisciplinaire. Mais faute de place, il est dirigé en milieu scolaire. À la rentrée, le petit garçon doit intégrer une classe inclusive pour enfants en situation de handicap. "On n'a pas encore testé. Est-ce que Kahil va vouloir faire la sieste là-bas ? Est-ce que Kahil va s'adapter ? Je n'en ai aucune idée." Iteb, soucieuse de l'épanouissement de son enfant, ne cache pas son inquiétude à l'approche de la rentrée.
Solutions inadaptées
Le cas de cet enfant est loin d'être un cas isolé. Pour l'Unapei et ses associations affiliées, dont fait partie l'Adapei 69, le manque de solution de scolarisation adaptée aux besoins de chaque enfant en situation de handicap est criant.
Sur son site, les messages de désarroi des familles sans solution éducative s'accumulent. Pour la 5ᵉ année consécutive, à l'occasion de la rentrée, le réseau Unapei a d'ailleurs lancé l’opération #jaipasecole. Sur la plateforme www.marentree.org, le réseau entend également rendre visible la réalité des enfants en invitant les familles à témoigner. Près de 900 témoignages sont déjà en ligne. L'objectif de l'opération : dénoncer " le scandale des enfants en situation de handicap qui n’auront toujours pas école." Le petit Kahil en est un exemple très représentatif.
"Il y a un décalage très important entre les propositions de solutions adaptées pour les enfants et pour les familles. Malheureusement, on pense qu'il (Kahil) va rester à domicile, avec des bouts de solutions qui ne peuvent pas être satisfaisantes pour son évolution, son éducation", avance Valérie Bérard, présidente de l'Adapei 69. "La place en IME est adaptée pour Kahil. En plus de l'enseignement, il y a tous les autres accompagnements qui peuvent lui permettre de bien grandir et d'évoluer (...). Un enfant doit être avec des copains et des gens de son âge", ajoute-t-elle.
Certaines familles ont des listes d'attente en IME de 5 ou 6 ans. Ce n'est pas supportable.
Valérie BérardPrésident Udapei 69
Valérie Bérard évoque une situation est "très tendue" dans le Rhône, "comme partout en France". "Il manque des places en IME. Même les classes Ulis, il y en a très peu. Les AESH ne sont pas forcément disponibles en nombre d'heures et dans le temps péri-scolaire", énumère-t-elle.
L'association rhodanienne tire la sonnette d'alarme, chiffres à l'appui : sur 499 enfants accompagnés au sein d’établissements spécialisés de l’Adapei 69, 13% ne bénéficient d’aucune heure de scolarisation, 37% ont entre zéro et six heures de scolarisation par semaine, 20% ont entre 6 et 12 heures et 23% seulement ont plus de 12 heures.
Une situation que l'Unapei dénonce depuis plusieurs décennies.
"J'ai besoin d'aide"
"On est maman, mais aussi aide-soignante, psychomotricienne, orthophoniste… on fait un peu tout ce que les équipes pluridisciplinaires nous ont appris", explique Iteb. C'est dans un parc de loisirs que Kahil a réalisé ses progrès en motricité. Un soulagement pour sa mère, mais elle a dû mettre sa carrière "entre parenthèses" pour se consacrer à son petit garçon. Aujourd'hui, elle fait un constat amer et plus que jamais demande de l'aide.
"Je reste sa maman, mais je n'ai pas les compétences d'un médecin (...) C'est l'amour de ma vie, je l'aime, c'est mon fils, mais je ne suis pas suffisante. Pour qu'il progresse, avec son potentiel, je ne suffis plus. J'ai besoin d'aide. On est en détresse, on a besoin d'aide. Il a sept ans, les années passent et le temps ne se rattrape pas", assure cette maman. Khalil ne suivra jamais une scolarité classique. Seule une place dans un institut éducatif adapté lui permettra de progresser, de faire un bout de chemin dans la vie . "Avoir une équipe médicale pluridisciplinaire qui accompagne Kahil au quotidien, je n'imagine même pas son évolution ! Je sais que c'est la seule chose qui puisse le sauver, lui permettre d'être indépendant", assure la maman.
L’Adapei 69 est l’association métropolitaine et départementale des parents et amis des personnes en situation de handicap : déficience intellectuelle, autisme, polyhandicap ou handicap psychique. Association loi 1901, elle accompagne plus de 2800 enfants et adultes au sein de 60 établissements et services spécialisés et soutient leurs proches depuis plus de 75 ans.