"J'ai sorti un bébé, sa mère avait la tête et les jambes coupées" : 70 ans après, un rescapé de la catastrophe ferroviaire de Sérézin-du-Rhône se souvient

TEMOIGNAGE. Le 16 octobre 1953, au petit matin, un train de voyageur est percuté par une locomotive en gare de Sérézin-du-Rhône. Le drame fait onze morts et plusieurs dizaines de blessés. Mario Kouzoubachian avait 16 ans à l'époque et était l'un des passagers.

Ce samedi 14 octobre, une cinquantaine de personnes se sont réunies devant la gare de Sérézin-du-Rhône, au sud de Lyon. Un rassemblement organisé à l'occasion du 70e anniversaire de l'accident de train qui avait fait 11 morts et 48 blessés. 

Une catastrophe ferroviaire vécue par Mario Kouzoubachian le 16 octobre 1953. Âgé de 16 ans, il effectuait son trajet quotidien entre Chasse-sur-Rhône et Lyon, où il était formé chez les compagnons du devoir.

À 6h30, alors que son train est arrêté à la gare de Sérézin-du-Rhône, l'adolescent est éjecté de sa place. "J'étais assis dans le 3ᵉ wagon en partant de la queue, j'ai été projeté sur la banquette avant. J'avais une bosse et j'étais sonné, je ne savais pas ce qui s'était passé."

"J'ai entendu des pleurs"

Une locomotive venait de percuter le train de voyageur à pleine vitesse. " Ce jour-là, il y avait du brouillard, on ne voyait pas à un mètre", se rappelle l'octogénaire. Mario réussit à sortir du train et à rejoindre ses camarades. Une fois sur le quai, il découvre les dégâts. "Les deux wagons à l'arrière étaient soulevés par la locomotive. J'ai demandé une échelle au chef de gare, pour pouvoir monter dessus et aider les gens." Un acte que le rescapé qualifie aujourd'hui "d'instinctif".

"J'ai entendu des pleurs, il y avait un bébé de onze mois à l'intérieur. Sa mère avait la tête et les jambes coupées. J'ai sorti le bébé, ce n'était pas évident, autour de lui, les bras de sa mère étaient raides", décrit avec précision l'octogénaire. "Après, j'ai aidé deux autres personnes à sortir. Quand les pompiers sont arrivés, ils m'ont dit 'Descend mon gars, t'en as déjà assez fait'. J'étais couvert de sang quand je suis sorti."

Une scène d'horreur, que 70 ans après, Mario Kouzoubachian n'oublie pas. "J'ai l'impression que c'était hier. Les gens qui attendaient, les cadavres, les personnes démembrées, c'est comme ce qu'on voit dans les films. Jusqu'à la fin de ma vie, ça restera gravé dans ma tête." 

Devoir de mémoire

Alors depuis plusieurs années, l'octogénaire organise des commémorations, pour préserver le souvenir de cette catastrophe ferroviaire, qui aura fait 11 morts et plusieurs dizaines de blessés. "On a un devoir de mémoire, mais cette année, ce sera la dernière fois que je l'organise. J'ai 86 ans", rappelle-t-il. 

S'il n'a jamais oublié, Mario Kouzoubachian a continué de vivre. Une carrière dans le carrelage, trois enfants et cinq petits enfants, c'est d'une voix tranquille qu'il revient sur ce drame, raconté déjà tant de fois. "Je n'attends rien, assure-t-il un sourire dans la voix. À part la paix dans le monde."

Une cinquantaine de personnes se sont retrouvées pour cette commémoration devant la gare de Sérézin-du-Rhône, en présence de plusieurs officiels, dont la maire de la commune. Des fleurs ont été déposées à proximité des voies, dont une gerbe offerte par la SNCF. 

L'actualité "Culture" vous intéresse ? Continuez votre exploration et découvrez d'autres thématiques dans notre newsletter quotidienne.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
Auvergne-Rhône-Alpes
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité