Lyon :"Débrouillez-vous pour que ça serve à quelque chose !" Paralysée à cause d'une trottinette électrique, une nonagénaire demande à la justice de prendre la mesure du problème

Le 23 juin 2021 Mme Bouchet est renversée par une trottinette électrique en plein centre de Lyon, alors qu'elle traversait un passage piéton. Le conducteur doit répondre de ses actes devant la justice ce jeudi 5 mai.

Même dans une situation des plus anodines, en une fraction de seconde, une vie peut basculer. C'est ce que nous rappelle l'accident tragique de Mme Bouchet survenu l'été 2021.

Âgée de 96 ans au moment des faits, la victime avait encore toute son autonomie. Selon ses proches, elle sortait même du métro, place Bellecour, et se rendait dans un magasin lorsqu'en traversant la route (alors que le feu piéton était vert selon elle), une trottinette électrique l'a violemment percutée. 

L'accident a engendré une tétraplégie parésie incomplète de la retraitée, c'est à dire qu'elle a perdu l'usage de ses 4 membres, bien qu'elle soit encore capable de micromouvements. Une véritable tragédie pour cette femme qui a encore tous ses esprits, mais qui se retrouve alitée jusqu'à la fin de sa vie, et qui, à 96 ans, devrait subir des séances de kiné pour réacquérir des gestes du quotidien. Une épreuve aussi bien morale que physique pour la victime, placé sous traitement anti-dépresseur depuis son accident. 

Le conducteur de la trottinette face à la justice 

De son côté, le conducteur de la trottinette, un chef d'entreprise de 51 ans, a tout de suite reconnu les faits qui lui sont reprochés. Il répondra donc en "comparution avec reconnaissance préalable de culpabilité", de blessures involontaires ayant entraîné une Incapacité Totale de Travail (ITT) de plus de 3 mois. La peine maximale qu'il encourt est de 2 ans de prison, et 30 000 d'amendes. Toutefois la bonne foi du mise en cause et son absence de casier judiciaire laisse présager une sanction plus clémente. 

Ainsi il sera d'abord reçu par le procureur pour évoquer la sanction prévue. Celle-ci pourra ensuite être homologuée, ou non, par un juge, après consultation (non-contraignante) des représentants de la victime. En cas de non-homologation de la sanction, une audience classique aura lieu.  

Le fait qu'il ait brûlé un feu de signalisation n'a pas été retenu comme circonstance aggravante de "violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi", ce qui étonne l'avocate de la victime, Maître Druilhe.

Mais le mis en cause risque quand même gros. N'ayant pas contracté d'assurance spécifique alors même qu'elle est obligatoire pour tout véhicule terrestre à moteur, il devra rembourser au Fond de Garantie des Assurances Obligatoires (FGAO) le dédommagement accordé à la victime, qui peut atteindre plusieurs dizaines, voire centaines de milliers d'euros. 

"Débrouillez-vous pour que ça serve à quelque chose" 

La famille de la victime attend bien-sûr de ce jugement la reconnaissance de la responsabilité du mise en cause. Mais elle espère aussi que ce drame "alerte les usagers et les pouvoirs publics" sur la dangerosité de la trottinette électrique tel qu'elle est utilisée actuellement. "Débrouillez-vous pour que ça serve à quelque chose" aurait demandé la nonagénaire à ses filles, qui la représentent devant la justice.

Elles ont ainsi écrit au maire de Lyon, à leur député et même au ministère du transport, sans réponses pour l'heure. Ce jugement est alors leur dernière "chance" de faire parler des risques de ce nouveau moyen de transport. 

Les trottinettes électriques à l'origine d'accidents de plus en plus graves 

Car ce tragique accident est symbolique de la mauvaise adaptation de ce nouveau moyens de transport dans l'espace public. En 2019, ces trottinettes électriques ont littéralement envahi les trottoirs des grandes villes françaises, notamment via une multiplication des fournisseurs en libre service (Lime, Jump, Bird, Wind etc...). Des réglementations propres à chaque villes ont donc été mises en place.

En 2020 la métropole lyonnaise a limité le parc de trottinettes électriques à deux prestataires (Dott et Tier) pouvant en mettre 2 000 chacun à disposition dans les rues. On en compte donc au moins 4 000 à Lyon, sans même compter celles des particuliers. 

Or les conducteurs de ces engins électriques semblent avoir des comportements alarmants. Selon le baromètre AXA prévention 2021huit usagers sur dix roulent sur les trottoirs, 78% ont déjà téléphoné en conduisant, 49% ont pu conduire après avoir bu plus de deux verres d’alcool et 68% disent ne pas toujours mettre de casque.

Résultat : l'arrivée massive de ces véhicules dans l'espace public "coïncide" avec une nette augmentation du nombre de blessés par accident de la route dans les grandes villes.

5 blessés par jour 

Selon un étude du Journal du Dimanche, en 2021 sur la seule ville de Lyon, près de 2 000 personnes ont fini à l'hôpital (fracture, luxation, traumatisme etc...) suite à un accident impliquant une trottinette électrique, soit environ 5 blessés par jours !

Des accidents qui s'avèrent de plus en plus graves, et même de plus en plus mortels : selon les chiffres officiels de la Sécurité Routière : 22 personnes sont décédées en France suite à un accident de trottinette électrique en 2021 contre seulement 7 en 2020 et 10 en 2019. 

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