Lyon: la Maison de la Danse fête ses 40 ans, de l'utopie d'hier au patrimoine de demain

Elle fête ses 40 ans. Fondée par cinq chorégraphes audacieux, la Maison de la Danse fait aujourd'hui partie du patrimoine de Lyon. De la Biennale aux spectacles originaux qu'elle propose, en passant par ses projets avant-gardistes, elle rythme le quotidien des lyonnais. Retour sur son histoire.

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C'était le 17 juin 1980, dans la Salle des Fêtes de la Croix-Rousse. Ils sont venus inaugurer la nouvelle Maison de la Danse. Ce sont cinq chorégraphes, jeunes, audacieux et lyonnais. Claude Decaillot, Michel Hallet Eghayan, Lucien Mars, Hugo Verrecchia et Marie Zighéra viennent de fonder un lieu unique en France, à cette époque. Sa création est même annoncée et saluée par Yves Mourousi dans le Journal Télévisé de TF1.

Une expérience unique en France

"C'était un pari un peu fou", raconte Dominique Hervieu, l'actuelle directrice de la Maison. Celui de dédier exclusivement un lieu à un art encore peu représenté dans le paysage artistique français : la danse. Une idée audacieuse, soutenue par la Ville de Lyon, "qui s'appuyait sur ce que l'on a appelé le boom des années 1980, une espèce de vitalité créative, un moment de libération de la danse en France. Le pari était donc osé et en même temps il était totalement connecté à son époque, avec cet incroyable vent de folie que Guy Darmet a su capter".

Guy Darmet, c'est l'homme passionné, talentueux et ambitieux qui prend alors la direction de la Maison. Il y restera 32 ans. Sous son règne, l'institution dépasse les prévisions les plus optimistes. Le public accueille la première saison avec enthousiasme et intérêt. La réussite de la Maison est inattendue, son essor, très rapide. Bientôt, on a besoin de plus de place, de plus de monde. Il faut déménager.

En septembre 1992, les artistes de la Maison posent leurs valises dans le bâtiment que l'on connaît aujourd'hui. L’emblématique Théâtre du Huitième, construit à la fin des années 1960 par l’architecte Pierre Bourdeix. Là, ils trouvent une scène et une salle de 1100 places, un studio de 300 m2 et même un vidéo-bar-restaurant. Un édifice à leur mesure.

Démocratiser la danse : création de la Biennale

Depuis le début de l'aventure, la Maison n'a qu'une ambition : "montrer que la danse peut parler à tout le monde", explique Dominique Hervieu. "Il y a des stéréotypes qui courent sur la danse, qui lui prêtent une dimension élitiste, hermétique voire vieillotte". Guy Darmet a dit, "mais non, vous allez voir avec toutes ces danses du monde, ces chorégraphes qui travaillent avec des intellectuels, ces gens qui vous parlent du monde d'aujourd'hui, vous allez comprendre à quel point la danse réfléchit sur les problèmes et les questions de notre société actuelle".

Elever la danse au niveau de l'opéra, du théâtre et des arts considérés comme nobles. C'est une mission que Guy Darmet accomplit avec brio. Avec le même génie, il ambitionne de démocratiser la danse et d'aller vers le public. Vers les publics.

C'est dans cette perspective qu'il crée en 1984, la Biennale de la danse. Le Premier défilé célèbre les couleurs du Brésil en 1996 dans les rues de Lyon. C'est alors à la danse d'aller vers le public, et plus l'inverse. L'art s'offre, coloré, hétéroclite, esthétique, aux lyonnais. Depuis, le Défilé attire des milliers de danseurs du monde entier, des centaines de milliers de spectateurs. "Il y avait une adéquation entre une attente, une envie de libération et d'émancipation et la rencontre avec le public, qui avait envie de découvrir des choses inattendues, décoiffantes, des nouvelles esthétiques. Et ça a matché", analyse Dominique Hervieu.

L'accompagnement des artistes

Malgré quelques difficultés budgétaires en 1985, la Maison s'impose dans le paysage culturel national. Lieu de diffusion, de création, mais aussi de mémoire, l’institution innove avec la création en 1990 d’une vidéothèque internationale dédiée à la danse et consultable par le grand public. C'est encore une première en France. Vient ensuite le site internet numeridanse.tv, qui permet l’accès en ligne à toutes ses archives.

En 2011, Guy Darmet passe le flambeau à Dominique Hervieu. "Cette passation s'est faite de façon fluide, élégante, c'est une des forces de la Maison", se rappelle la chorégraphe.

Nous avions tous les deux le même goût pour le public et pour toutes les danses

La danseuse contemporaine va impulser une nouvelle dynamique dans la Maison, son ambition c'est de développer l'éducation artistique. En suscitant, notamment, l’intérêt des enfants et des adolescents des quartiers, en valorisant les pratiques amateurs intergénérationnelles. C'est l'essence même du projet Babel 8.3, premier spectacle participatif réunissant plus de 300 amateurs. "Nous souhaitions montrer que la danse pouvait avoir une dimension inclusive et solidaire, que l'art est un moment de rassemblement, au-delà des rigidités identitaires ou autres."

Dominique Hervieux souhaite également renforcer l'accompagnement des artistes, l'émergence de jeunes créateurs. Avec l'aide des collectivités locales, la Maison décide en 2018 de réhabiliter le Musée Guimet et d'en faire un lieu dédié principalement à la recherche chorégraphique : Les Ateliers de la danse sont nés.

La crise sanitaire

Pour fêter ses quarante ans, la Maison de la danse avait prévu une saison exceptionnelle. 36 compagnies devaient être accueillies. La crise sanitaire a évidemment bousculé le programme. Et plongé la Maison, comme toutes les autres institutions culturelles, dans la peur du lendemain : "C'est difficile, reconnaît la directrice, parce que la Maison de la Danse vit avec 60% de recettes propres, l'arrêt brutal de la billetterie fragilise forcément la maison."

Mais c'est aussi l'occasion de « réfléchir». "La Maison doit résister au virus, mais elle doit aussi se réinventer, pour être au diapason du Monde, avec toutes les questions qui se posent sur la solidarité, le soutien aux artistes", explique Dominique Hervieu. A la rentrée donc, pas de spectacles pour la Maison. La priorité, c'est de garder le contact avec les artistes. Ils pourront utiliser salles et studios pour se remettre au travail, et le public aura gratuitement accès à ces moments de création et de répétition. "On verra la Maison de la Danse autrement", s'enthousiasme sa directrice.

De l'utopie d'hier au patrimoine d'aujourd'hui

La Maison de la Danse, c'est donc l'histoire d'un succès. Celui de la rencontre entre un art et un public. Aujourd'hui, l'institution s'est imposée sur la scène nationale et internationale. Elle a fait prendre conscience aux Lyonnais que la danse faisait partie de leur ADN, de leur patrimoine. "Dans l'identité culturelle lyonnaise, la danse a une place de choix. Ce n'est pas le cas dans beaucoup de villes, loin de là. Cette spécificité lyonnaise est très liée à cette dimension d'inclusion, d'art chorégraphique populaire impulsé par la Maison", assure Dominique Hervieu.

Pour chaque saison, la Maison propose entre 30 et 40 spectacles, montés par des compagnies nationales et internationales et offre environ 200 représentations à plus de 150 000 spectateurs.

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