PFAS : "On allaite son enfant et on l'empoisonne !", un médecin de Vénétie, témoin des dégâts de la pollution de l'eau aux perfluorés

Il y a 6 mois, une enquête journalistique révélait la présence de "polluants éternels" dans l'air, le sol et l'eau. Une pollution au sud de Lyon. Aujourd'hui, des mères de familles s'interrogent sur les risques pour la santé. En Vénétie, dans le nord de l'Italie où la pollution est sans commune mesure, d'autres mères sont déjà passées par ces mêmes interrogations. Rencontre de l'autre côté des Alpes, avec un médecin de famille qui a constaté les effets de ce "polluant éternel".

Surnommés les "produits chimiques éternels", les PFAS sont un groupe de substances chimiques artificielles fabriquées et utilisées dans un large éventail de secteurs industriels (notamment textile, produits ménagers, lutte contre le feu, industrie automobile, transformation des aliments, construction, électronique). Ces substances peuvent passer inaperçues car elles n'ont "ni couleur, ni odeur, ni saveur".   

Il y a 6 mois, une enquête journalistique révélait la présence de PFAS dans l'air, le sol et l'eau au sud de Lyon, et notamment à Oullins et Pierre-Bénite. Après ces révélations, des mères de famille se sont très vite alarmées. Elles ont commencé à se poser des questions. "Peut-on continuer à consommer les légumes du jardin? Est-ce qu'il vaut mieux boire de l'eau minérale ? Et pour cuisiner ? Quels risques sur la santé ?". Les mêmes questions se sont posées de l'autre côté des Alpes, dans le nord de l'Italie. A une différence près : la pollution relevée en Vénétie est sans commune mesure avec celle qui frappe le sud de l'agglomération lyonnaise. En Italie, les valeurs relevées dans le sang et indiquant la présence de ce type de substances toxiques sont 100 et 300 fois supérieures aux valeurs découvertes dans l'eau en aval de Pierre-Bénite.

Zone rouge en Vénétie

En Vénétie, des habitants, victimes d'une contamination à grande échelle aux perfluorés, sont passés par les même interrogations. A une différence près : la Des comités ont même vu le jour, "les mères contre les PFAS"  ( "Mamme no PFAS").Très actives sur les réseaux sociaux, ces femmes se sont mobilisées, notamment auprès des pouvoirs publics. Plusieurs dizaines d'entre elles ont porté l'affaire en justice pour obtenir des réponses, à défaut d'obtenir réparation.

Car depuis plusieurs années la vie en Vénétie est bouleversée. La région est en proie à un scandale sanitaire sans précédent. Une "zone rouge" a même été délimitée par les autorités. Sur un territoire d'environ 700 km² qui comprend une vingtaine de communes, l'eau est polluée avec une substance qui appartient à la grande famille des perfluorés : le PFOA ou acide perfluorooctanoïque. 

La pollution s'étend sur un triangle compris entre Vérone, Vicence et Padoue. Toute cette zone géographique est alimentée en eau potable par l'une des plus grandes nappes phréatiques d'Europe, aujourd'hui contaminée.

La pollution aux perfluorés mesurée dans cette zone proviendrait de l'entreprise italienne Miteni située sur la commune de Trissino. Depuis les années 1960 et jusqu'à sa mise en faillite en novembre 2018, cette usine chimique aurait rejeté du PFOA dans la nature, contaminant ainsi les rivières, les fleuves, et jusqu'au robinet des habitants. 

On parle au bas mot près de 350 000 personnes contaminées. Mais pour le Docteur Elisa Dalla Benetta, médecin de famille installée sur la commune de Zimella, on est encore loin du compte. 

Comment ce médecin a pris conscience de cette contamination à grande échelle ?

"J'ai commencé à me rendre compte que quelque chose clochait 10 ou 12 ans avant de découvrir que nous vivions sur une terre contaminée par les PFAS (substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées). Diplômée de l'université de Padoue, je pensais être informée sur la prévalence des maladies dans la population. Et je me suis retrouvée en fait devant des niveaux de pathologies beaucoup plus importants."

Tout commence avec la découverte de nombreux cas d'infertilité, inexplicables :

"J'ai trouvé un taux d'infertilité masculine très haut. Ces personnes, jeunes, saines, qui travaillaient la terre qui mangeaient des produits ne provenant ni du McDo ni du supermarché, ces personnes vivant au grand air ... Et bien ces personnes ne parvenaient pas à avoir d'enfants. Après avoir procédé à des analyses du sperme, on découvrait une anomalie. Il n'y avait aucun spermatozoïde vivant, ou ceux qui étaient vivants étaient anormaux. Voir ces résultats d'analyse, c'était à pleurer."

"Et on en voit un, on en voit deux, on en voit trois ... et puis on aide le couple à faire le parcours d'adoption, le parcours de fécondation médicalement assistée".  C'est une routine qui démarre mais pour la jeune généraliste, le doute commence à poindre:

"J'ai un cahier dans lequel j'ai commencé à écrire les choses étranges que je voyais. Mais à l'époque je ne connaissais pas l'existence des PFAS. A la lettre A de mon cahier, j'indiquais azoospermie. Et peu à peu,  je notais les patients "bizarres" et je me disais "ceux-là, je vais me pencher sur leur cas, car ils ne devraient pas présenter cette pathologie."

Des patients atteints de troubles du métabolisme et d'inquiétantes coïncidences :

"J'ai commencé à constater des tumeurs de la thyroïde. Moi-même, j'ai eu une tumeur de la thyroïde. Et j'ai remarqué que toutes les femmes qui présentaient ce type de tumeur vivaient depuis 10 ans dans ce secteur géographique. Durant ces 10 années, elles avaient bu de l'eau du robinet. C'est le cas par exemple d'une patiente qui venait du centre de Vicenze et qui s'était installée à Zimella après son mariage. Au bout de 10 ans, elle a développé une tumeur à la thyroïde. Autre exemple : une patiente indienne, originaire du Kerala, est venue habiter au village. Et au bout de 10 ans, alors qu'elle ne mangeait que des produits du cru, elle a eu une tumeur à la thyroïde."

L'eau du robinet, pointée du doigt : 

"En ce qui me concerne, avant de me marier, j'ai toujours bu de l'eau minérale car mon père n'aimait pas le goût de l'eau du robinet. Mon mari, écologiste, opposé à tout ce plastique, disait : "non ! nous devons boire l'eau du robinet parce qu'elle est garantie par la commune et super-analysée "! Et bien après 10 ans, j'ai développé une tumeur à la thyroïde !"

Les premiers constats tombent au bout de 10 ans. Si c'est une période "très courte" selon la généraliste, il ne faut pas négliger ce facteur temps.

"Cette période de 10 ans a suffit pour transformer une Indienne Sikh - qui ne mange pas de produits confectionnés, qui n'a pas de cholestérol élevé, qui est mince et qui ne fume pas -  en une femme atteinte de dysfonctionnements du métabolisme, obèse. Une femme rencontrant des problèmes de tyroïde jusqu'à développer une tumeur. 

Fausses couches tardives, un autre indice troublant

"Ensuite, j'ai commencé à constater chez mes patientes des fausses couches tardives. Les grossesses étaient normales et de toute évidence se déroulaient sans accrocs. Cependant au 5e, 7e ou 8e mois  ... deux enfants sont mort-nés en fin de grossesse ! Ils étaient viables. Je suis allée les voir à la morgue. C'était des enfants magnifiques qui ressemblaient à des poupons, tout à fait sains en apparence. Des autopsies ont été pratiquées, aucune malformation n'a été trouvée et pourtant ils sont morts ! " s'exclame le médecin. 

Elle poursuit encore choquée plusieurs années après : " Assurer le suivi d'une femme enceinte, puis pleurer avec elle parce qu'elle doit enterrer son enfant au bout de 8 mois de grossesse... impossible d'oublier tout ça ! Alors j'ai continué à prendre des notes dans mon cahier. Mais en tant que mère, je suis aussi concernée. Cette histoire aussi m'est arrivée".

"Mon 4e enfant est au cimetière" 

Le médecin de Zimella n'a pas été épargnée non plus et évoque un drame personnel encore très douloureux  : "Mon 4e enfant est au cimetière, parce qu'à mon 5e mois de grossesse, une nuit, à l'improviste, j'ai accouché et c'était un garçon. Et je me suis aperçue le jour de l'enterrement, que tous ces enfants qui reposaient dans le même carré, étaient des garçons. Dans les 15 dernières années, on trouvait dans ce carré de cimetière des garçons, morts lors de grossesses très avancées. (...)

Elle est encore partagée entre révolte et incompréhension : "Ça ne devrait pas exister dans un pays où la mortalité infantile est très basse ! Nous ne sommes pas en Afrique, j'ai travaillé en Afrique. Ici, il ne devrait pas y avoir de tombes d'enfants, et pourtant ... il y en a au moins 5 ici. Ce fait aussi je l'ai noté dans mon cahier tout en me disant que ce n'est pas normal, mais que j'ignore pourquoi." 

"Mais qu'est-ce qu'il y a dans votre sous-sol?"

"Après avoir perdu mon enfant, je suis restée chez moi deux semaines. Ma remplaçante au cabinet était très jeune et venait d'un autre secteur. Elle a vu mes patients, mes relevés, mes notes et m'a questionné : "Mais Docteur, qu'est qu'il y a dans votre sous-sol ? Il y a trop de tumeurs du rein !"

Le docteur Dalla Benetta a la puce à l'oreille lorsqu'un couple de ses patients sont atteints de la même pathologie : "tous deux présentent une tumeur du rein. Pas de liens génétiques entre eux, mais ils ont mangé et bu la même chose !".

"Je comprends alors que quelque chose cloche et que je suis face à des pathologies environnementale ! Mais c'est en mai 2017 que j'ai fait le lien avec les PFAS, après avoir assisté à une conférence publique dans laquelle un médecin de l'environnement explique ce qu'étaient ces substances". Le médecin de famille tombe des nues.

Des études américaines alarmantes

Pour la généraliste, les conséquences, présentes et futures, de cette pollution en Vénétie, sont largement sous-estimées.

"J'ai appris qu'en Virginie occidentale, dans l'Ohio, un fleuve grand comme notre Pô, qu'une chose similaire s'était produite et avait touché 67 000 personnes. Nous, nous sommes 300 000 personnes mais il faut tenir compte de plusieurs facteurs :  la nappe phréatique qui se déplace d'un 1,3 km l'année, il y a aussi les boues d'épuration qui sont rejetées dans les champs, la vente de nos produits agricoles ... on arrive ainsi à 800 000 personnes ! Et la chose va empirer. Comme avec les cercles concentriques, quand on lance une pierre dans l'eau." 

La généraliste dénonce l'aveuglement des élus en Italie. "Cela faisait 2 ou 3 ans qu'on en parlaient dans la presse. Mais ce qui transparaissait, notamment chez les politiques, c'était : "il n'y a aucune criticité (toxicité), il n'y a rien de prouvé, nous n'avons pas de données ". 

"Comment il n'y a pas de preuves ? J'ai lu toutes les études concernant la Virginie occidentale et j'ai découvert que tout avait déjà été fait! Impossible pour nos dirigeants d'ignorer que de l'autre côté de l'océan, il existe des études ! Elles ont révélé qu'au moins 6 pathologies sont en lien avec les PFAS."

6 pathologies directement liées aux PFAS

Quelles sont ces six pathologies ? "Les 6 pathologies sont : l'hypertension durant la grossesse, les problème de thyroïde, d'hypercholestérolémie, de tumeur au rein, de tumeur du testicule et de rectocolite ulcéreuse (inflammation chronique de l'intestin)", énumère la généraliste. Six pathologies certifiées par des études menées outre-Atlantique. "Mais en ce qui nous concerne, a minima, nous avons des valeurs sanguines environ 50 fois supérieures à celles des habitants de la Virginie Occidentale !" 

"L'EFSA, l'organisme compétent en matière de sécurité alimentaire, a déclaré en 2018 en faisant une analyse des études mondiales, que ces pathologies ne sont pas seulement corrélées avec les PFAS, elles en sont les conséquences. Le lien n'est plus à prouver". 

Quels risques pour les femmes enceintes? 

Et le médecin prend en exemple l'hypertension qui peut survenir durant une grossesse, l'une des six pathologies relevées. Une pathologie synonyme de grossesse à risque. "Lorsqu'une femme qui n'a aucun problème cardio-vasculaire développe lors de sa grossesse une hypertension, cela peut alors causer des dommages mortels à l'enfant ! Mais ces dommages se font précocement, alors que l'hypertension n'est pas encore notable. Quand on se rend compte que la tension est élevée, dans les derniers mois, le fœtus a déjà eu son lot de problèmes. Et c'est là que la grossesse s'interrompt ou alors qu'il y a accouchement prématuré. Nous avons un taux important de naissances prématurées," conclut-elle sur ce point.

Perturbations tous azimuts et maladies auto-immunes

Outre l'hypercholestérolémie ou les avortements spontanés dans le dernier trimestre de grossesse, les perturbations liées au PFAS sont légion et elle cite pêlemêle : "On constate aussi un faible poids de naissance, une mauvaise réponse aux vaccinations (pas de développement d'anticorps) et un problème de conception. Nous avons des problèmes de fertilité masculine surtout, mais aussi de fertilité féminine. Des problèmes pour mener une grossesse à terme, des fausses couches tardives avec des deuils impossibles à surmonter. De nombreux patients se tournent vers la procréation médicalement assistée ou à l'adoption, ou à l'étranger, vers le don d'ovocyte". 

J'ai ici des patients avec un cholestérol élevé alors qu'ils sont Sikhs et végans ! Comment diable font-ils pour avoir un taux de cholestérol élevé ? Ils ne mangent ni saucisson, ni pancetta ou saucisses. Ces gens ont un bouleversement complet de leur métabolisme, à tel point qu'il produit des graisses qui ne font pas partie de leur régime alimentaire ! Et ils tombent malades  ! Des maladies qu'ils ne devraient pas avoir !"

Dc Docteur Elisa Dalla Benetta,

Médecin généraliste à Zimella

Et le tableau des pathologies est extrêmement noir, une liste qui semble interminable. "Il y a aussi des problèmes de maladies auto-immunes et des pathologies chroniques et inflammatoire comme des problèmes articulaires, le diabète, des problèmes de tyroïde, problème de peau ... autant de maladies auto-immunes", égrène le médecin.

Allaitement et culpabilité

Selon l'étude de 2018 menée par les experts de l'EFSA, les enfants sont le groupe de population le plus exposé aux PFAS. L'exposition pendant la grossesse et l'allaitement est le principal contributeur à l’apport en PFAS chez les nourrissons.

Pour le Docteur Dalla Benetta, si les femmes sont "avantagées par des mécanismes d'élimination physiologique", cet avantage lourd de conséquences. Elle explique : "j'ai allaité mes 5 enfants, pendant 5 ans et demi de ma vie, j'ai un pourcentage de PFAS très bas et mes enfants ont hérité des PFAS que je leur ai transmis ! 

Pour cette généraliste, également mère de famille, les femme doivent également vivre avec la culpabilité d'avoir fait des enfants, et de les avoir exposé à une contamination aux PFAS, via le placenta et le lait maternel.

On pense faire un geste naturel en allaitant son enfant et on l'empoisonne !

Dc Elisa Dalla Benetta

"C'est pour cela que l'ONU est intervenue et non l'OMS.  Parce que c'est une violation très grave des droits fondamentaux, au delà du droit à l'information. C'est le droit d'être certain de transmettre la vie en sécurité (...) L'observateur des Nation Unies qui a été envoyé chez nous en décembre a retenu dans son rapport une phrase prononcée par une mère : "J'ai empoisonné mon fils et je ne savais pas que j'étais en train de l'empoisonner". 

Contamination et effet cocktail? 

Dans ce secteur de Vénétie, le médecin évoque des taux de contamination dans le sang qui dépassent l'entendement. "On sait qu'il existe une contamination de fonds de quelques nanogrammes. Elle devrait être comprise entre 0 et 7 nanogrammes environ par millilitre de sang. Nous nous sommes à 50, 70, 100,  400 et même 1000 nanogrammes PFOA par millilitre de sang. C'est la substance qui a été la plus étudiée. Mais il n'y a pas vraiment d'études sur l'effet cocktail, sur la somme cumulé des PFAS"

Il doit y avoir on ne sais combien de centaines ou de  milliers de PFAS que nous ne sommes pas capables de mesurer mais qui existent. La famille des PFAS est très importante : 4000 - 7000 molécules, on en mesure 12.

Dc Elise Dalla Benetta

Substances chimiques dites à "molécules courtes" : plus dangereuses ! 

Le PFOA, fréquemment  mesurés en Vénétie,  est une molécule à chaîne longue. Les substances dites à "chaînes courtes" aurait peu à peu remplacé les vieux PFAS. Mais qu'est ce qui se cache derrière les mots ? Le docteur Dalla Benetta accuse : 

"En réalité, des études de chimie et de botanistes sur les cultures ou de bio-persistance dans l'environnement, ont mis en évidence que ces "molécules courtes" sont beaucoup plus dangereuses car elles voyagent plus rapidement. Elles sont plus "hydrosolubles". Elles vont plus facilement dans le cerveau, dans les poumons, les seins ... elles font des désastres (...).Elles pénètrent plus profondément dans les tissus". 

Le médecin évoque encore une fois son cas personnel : "je sais que j'ai peu de PFOA dans le sang mais je ne sais combien de nanogrammes d'autres chaines courtes sont présentes dans mes poumons, mon cerveau, mes reins, mon foie, mes seins. Car il y a des PFAS dans les tissus que seule une autopsie peut révéler. En Espagne, des autopsies de personnes peu exposées ont été réalisées et des PFAS ont été retrouvées pratiquement partout et même de manière assez conséquente, et même des PFAS à molécules courtes" . Elle assène : "Ne gobons pas de mensonges, en même temps que l'eau polluée."  

Ce sont des molécules qui vont interagir avec tous les systèmes du métabolisme :  le métabolisme du sucre, celui du gras, celui des hormones sexuelles, celui des hormones de la thyroïde. Je ne connais pas de système métabolique qui ne soit pas concernés par les PFAS.

Dc Elisa Dalla Benetta

Pour le Dc Dalla Benetta, ces agents toxiques paralysent le système. "Ces substances sont  tellement fortes et persistantes qu'une fois entrées dans un système, elles le paralysent, elles le pétrifient. La vie dans notre organisme peut se résumer par des ondes sinusoïdales. Toutes nos fonctions vitales (jour / nuit, productions hormonales, niveaux de glycémie et tension artérielle) doivent varier. C'est l'oscillation de la vie. Quand en revanche on introduit une molécule chimique anthropique, qui n'existe pas dans la nature, qui bloque tout et qui égalise tout. Alors c'est la mort. " 

Elle ajoute avec une pointe d'ironie : "Si les Egyptiens anciens étaient encore de ce monde, je suis sûre qu'ils auraient pu utiliser les PFAS pour faire des momies. Car je suis certaine qu'ils sont indestructibles. Le temps ne les affecte pas. "

Bénéfice risque

"Pourquoi, ces PFAS ont rendu l'industrie chimique richissime ?", s'interroge-t-elle. " Parce que ce sont des stabilisants ! Ils sont tant utilisés dans l'industrie pharmaceutique car ils rendent les molécules stables. On a une foule de médicaments fluorés qui bénéficient d'une immunité d'interdiction. Il y a des exceptions à une mise au ban de certaines substances, même de la part de l'UE. Et parmi ces exceptions, on trouve les médicaments fluorés et les dispositifs médicaux fluorés".

Elle ironise : "Quand tu es sur le point de mourir et que tu dois être intubé, lors d'une intervention chirurgicale ... on te pose des sondes et des cathéters. Mais ils sont bourrés de PFAS. Alors, ils te sauvent la vie ? Je n'en sais rien ! "

Les PFAS : une bombe à retardement ?

"En réalité, contrairement à ce qu'on veut nous faire croire, les conséquences ne sont pas forcément visibles à long terme," explique le médecin. Peut-on encore parler de long terme lorsque l'on constate à l'échelle de quelques années, "une hausse du cholestérol à l'origine de démence précoce, d'une mortalité cardio-vasculaire ou de l'obésité à l'origine du diabète..." s'interroge le médecin.

Des effets accélérés 

"Les effets se voient sur le moyen terme et même à court terme car chez ces enfants déjà contaminés par les PFAS au moment de leur conception, tout s'accélère. Le procédé est beaucoup plus rapide. On constate des troubles spécifiques de l'apprentissage, des troubles de la concentration et de la mémoire, des troubles moteurs très précoces. Certaines personnes déclarent une maladie de Parkinson à 55 ans et non à 75 ans ! ". Elle s'exclame : "J'ai un patient qui a 41 ans et qui a été diagnostiqué Parkinson, ce n'est pas normal. La démence sénile et la maladie d'Alzheimer à 60 ans et non à 88 ans ! Ce ne sont pas des effets à si longs termes !". 

Quelle solution ?

Le Docteur Dalla Benetta ne cache pas son pessimisme.

"Ce sont des effets que nous ne pourrons pas éliminer. Je pense qu'en quelques siècles on ne réussira pas à nettoyer la nappe phréatique. Nous avons une réserve d'eau douce grande comme le lac de Garde, la  deuxième plus grande d'Europe. Ce qui veut dire une quantité d'eau impressionnante. En période de pénurie hydrique, c'est un péché de l'avoir empoisonnée", explique-t-elle en pointant du doigt l'irresponsabilité écologique des pollueurs.

Le médecin ne voit pour l'heure aucune solution. "On ne pourra pas supprimer la pollution, elle est persistante. On n'a pas encore inventé la manière de dépolluer. Tout ce qu'on mange ou boit s'accumule dans notre corps, il n'y aucun moyen de l'éliminer, si ce n'est en allaitant, en faisant des enfants ou en donnant son sang.  Dommage pour ceux qui reçoivent une transfusion !"  

Page spéciale à suivre dans le 19/20 de France 3 Rhône-Alpes à suivre ce 20 octobre dès 19 heures.

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