Rafle de Vénissieux du 26 août 1942 : un "trésor de guerre" photographique et historique refait surface

Ce vendredi 2 septembre, la ville de Vénissieux rend un double hommage : les 78 ans de sa Libération mais aussi les 80 ans de la grande rafle de 1 016 Juifs, qui s’est déroulée le 26 août 1942. Une historienne lyonnaise, spécialiste de cet épisode de l'histoire de la seconde guerre mondiale, a mis la main sur une série de photos inédites.

Il y a 80 ans - le 26 août 1942 - 1016 Juifs étrangers étaient arrêtés et rassemblés dans le camp de triage de Vénissieux. 108 enfants ont pu être exfiltrés de ce camp. L'historienne lyonnaise Valérie Portheret a travaillé près de 30 ans pour préserver la mémoire de cette tragédie, mettre des noms sur des visages, renouer le fil de la mémoire. 

Trésor de guerre et "vies fracassées"

"J'ai commencé mes recherches en 1993. Ma quête consistait à retrouver toutes les preuves de ce qui s'était passé, notamment concernant le sauvetage (des enfants)", explique l'historienne. En 2018, Valérie Portheret a mis la main sur un fonds documentaire exceptionnel : une série de 16 photographies du camp de Vénissieux. Des photos qui incarnent "des vies fracassées". Elles ont été prises par un ouvrier du site qui faisait partie d'un groupe de travailleurs indochinois assurant le service aux Juifs. Les photos ont été retrouvées récemment par sa famille et transmise à l'historienne.

Alors qu'elle pensait être arrivée au bout de l'histoire, ses recherches ont été relancées. "J'ai énormément travaillé d'après ces photos, en retournant dans les centres d'archives, en retrouvant des personnes avec l'aide de Serge Klarsfeld", raconte-t-elle.

Les photos ont été prises entre le 26 et le 28 août 1942. C'est vraiment au cours de ces journées que plus de 800 personnes vont recevoir, soit un ticket à la vie, soit un ticket à la mort.

Valérie Potheret

Historienne, chercheure, auteure

Ces photos qui sont un témoignage des rafles de juifs étrangers survenues en zone libre, à l'été 1942. "On est le 26 août, c'est l'arrivée des premiers convois de personnes arrêtées sur les 10 départements constitutifs de la région de Lyon". Les personnes arrêtées sont triées. Elles passent devant une commission de criblage. La plupart seront ensuite conduites à Drancy, puis à Auschwitz.

"Le souci de ce photographe présent au moment de l'arrivée des personnes arrêtées a vraiment été de les prendre sur des moments de vie", explique-t-elle. 

L'historienne est particulièrement émue par un cliché daté du 27 août 1942, montrant une levée de drapeau avec un couple d'amoureux au premier plan. "Devant cette levée de drapeau, des internés sont bloqués dans des cars. La plupart des gens qui se sont retrouvés au camp de Vénissieux étaient des Juifs étrangers qui avaient fui le 3e Reich, qui étaient arrivés en France, qui avaient été accueillis souvent par des belles personnes... Cette photo incarne aussi la trahison de ce gouvernement de Vichy qui a signé un pacte avec le diable pour se débarrasser de ceux qu'il nomme les indésirables"

Cette photo "saisissante" incarne aussi pour Valérie Portheret, "le respect et l'amour pour la France, pays des Droits de l'Homme".  Et sur ce jeune couple, elle s'interroge encore : "Je me demande ce qu'ils ont pu se dire, ce qu'ils ont pu se murmurer à l'oreille". L'historienne ignore le sort de ces deux jeunes gens. 

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Rafle de Vénissieux du 26 août 1942 : un "trésor de guerre" photographique et historique refait surface ©France tv

Pour d'autres, leur sort est connu. C'est le cas notamment de Mêla Backer et de sa mère Esther. Cette dernière a été identifiée sur les photos par sa fille. Mêla était très jeune lors de son arrivée au camp de Vénissieux. Elle fait partie des enfants sauvés de la déportation. La rescapée vit aujourd'hui en Israël et n'a jamais revu sa mère. Elle a encore en mémoire un souvenir poignant : "avant mon départ (du camp), ma mère a mis ses propres boucles d'oreilles à mes oreilles et m'a dit : ne les enlève jamais. C'était un acte d'amour pour moi. Je les porte toujours et je les soigne bien". Esther fait partie des 544 personnes envoyées à Drancy, une étape avant les camps d'extermination.

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