Le monde de la culture a rejoint le mouvement de contestation contre la réforme des retraites voulue par le gouvernement. A Lyon, entre manifestation spontanée, occupation du musée des Beaux-Arts et annulations de concerts à l'Opéra, les professionnels de la culture font aussi entendre leur voix.

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Les manifestations et actions "coup de poing" se sont poursuivies ce week-end, notamment à Lyon, pour protester contre la réforme des retraites et l'utilisation de l'article 49.3 pour faire adopter le projet de loi. Les opposants veulent maintenir la pression alors que plusieurs motions de censure ont été déposées à l'Assemblée nationale. Les professionnels de la culture ont rejoint les rangs des protestataires et se rendent visibles.

La nuit au musée 

Ce dimanche 19 mars, un petit groupe d'artistes, auteurs, étudiants, musiciens, intermittents du spectacle et précaires réclamant notamment le retrait du projet de réforme des retraites, a investi le musée des Beaux-Arts de Lyon à l'approche de la fermeture des lieux, "pour ne pas gêner les visiteurs", a précisé John, musicien et un des porte-parole du collectif "Culture en lutte". "Il fallait que le monde de la culture se mobilise", ajoute-t-il.

Aussitôt à l'intérieur du musée, une banderole a été déployée depuis l'une des fenêtres de la façade du palais Saint-Pierre. Visible depuis la place des Terreaux, on pouvait lire "Tuer nos retraites : votre chef d'œuvre !"

Ils ont reçu la visite de Nathalie Perrin-Gilbert, adjointe à la culture à Lyon, à qui ils ont confié le soin de transmettre leurs revendications. "Ces artistes, auteurs, autrices, travailleurs précaires de la culture et intermittents, vont être impactés lourdement par la réforme des retraites, d'autant qu'ils sont touchés par une discontinuité de l'emploi", explique John. Ces opposants à la réforme des retraites redoutent une plus grande précarisation. C'est pourquoi leurs revendications concernent aussi la question de la réforme du régime général de l'assurance chômage et la réforme du RSA qui conditionne cette aide à un temps de travail. 

Le musée a été occupé la nuit dernière par des opposants au projet de réforme. Une vingtaine de personnes, triées sur le volet, a passé la nuit sur place, dans une annexe des salles d'exposition. Pas davantage, alors que près de 200 personnes se trouvaient à l'extérieur au moment de l'occupation des lieux. Le nombre d'occupants a été limité pour une question de sécurité et une occupation dans le respect des œuvres.

En raison de cette occupation, le musée est fermé au public ce lundi 20 mars. 

Quant aux protestataires, ils sont encore sur place, rue Paul Chenavard, et décideront de la suite à donner à cette action, "en fonction des retombées des différents ministères", a précisé John. Une conférence de presse est prévue à 14h par le collectif. 

Manifestation éclair en fanfare 

Dimanche, en fin d'après-midi, des intermittents du spectacle se sont mobilisés. Un cortège s'est formé sur la place des Terreaux, vers 19h30. Une fanfare était également présente pour donner le ton. Les manifestants ont pris le chemin des pentes de la Croix-Rousse pour une rapide manifestation. Pendant un temps, des manifestants ont joué au chat et à la souris avec les forces de l'ordre. Pas d'incident majeur, mais la police a toutefois fait usage de gaz lacrymogène vers 20h15, comme le raconte cette participante sur Twitter : "On a quand même réussi à être gazés alors que y a rien eu de violent". 

La manifestation s'est terminée avant 21h, le petit groupe s'est dispersé place Pradel.

Opéra de Lyon : trois spectacles annulés

Parallèlement à cette action au musée des Beaux-Arts, ce week-end, toutes les représentations de l’Opéra de Lyon ont été annulées à cause du mouvement social de lutte contre la réforme des retraites. Trois représentations étaient prévues ce week-end. Une assemblée générale, qui s'est tenue vendredi soir, a décidé de ces annulations. 

"Ce week-end tombaient toute les premières de spectacle. Ce n'est pas de gaieté de cœur qu'on a choisi ça. C'est difficile de faire le choix de bloquer une représentation", explique Charlotte Goupille-Lebret, régisseuse de production à l'Opéra de Lyon et déléguée CGT-Synptac. "Ne pas jouer nous met aussi en difficulté. Il faut aussi savoir que nous avons connu aussi des baisses de subventions", ajoute-t-elle. 

Les personnels de l'Opéra de Lyon, contrairement à l'Opéra de Paris, ne bénéficient pas d'un régime spécial. "Les salariés font des métiers très physiques - décorateurs, machinistes, constructeurs de décors, menuisiers, habilleuses... - deux ans de plus, c'est compliqué. D'autant qu'ils ne sont pas payés plus que le Smic", précise la représentante syndicale. "Les musiciens, danseurs, chanteurs font aussi des métiers physiques. Il faut de l'exigence pour maintenir la qualité artistique d'un opéra national. Cette réforme n'est pas compatible avec cette exigence", assure Charlotte Goupille-Lebret. 

Jusque-là, des messages étaient lus au public avant les représentations. Les personnels de l'Opéra ont décidé de passer à la vitesse supérieure et de maintenir la pression au moins jusqu'au jeudi 23 mars. L'Opéra de Lyon est fermé ce lundi mais une assemblée générale mardi après-midi décidera de la suite du mouvement. 

"Jusqu'au 23 mars, on agit !"

Le mouvement pourrait aujourd'hui s'étendre aux conservatoires de la région, à l'enseignement artistique à Lyon et Auvergne Rhône-Alpes.

Le syndicat Sampl-CGT SNAM a lancé, dans la nuit de dimanche à lundi, un appel à participer au mouvement lancé par l'Opéra de Lyon et l'ONL. 

ONL : un musicien sous les huées

Le 17 mars dernier, avant une représentation de l’Orchestre National de Lyon, un musicien a voulu exprimer son désaccord avec la réforme des retraites. Ce dernier a pris la parole, texte en main. Une initiative accueillie plutôt fraichement par le public. 

Le musicien a été copieusement hué et sifflé par les spectateurs alors qu'il décrivait la précarité des musiciens professionnels et la difficulté de son métier. Une internaute qui a assisté à la scène décrit "un moment sidérant".  "Le public s’indigne, immédiatement, sans savoir de quoi il va être question, haut et fort. Le discours n’a même pas commencé qu’on entend des « remboursés !! » vindicatifs." raconte-t-elle. "Je pourrais écrire encore des lignes entières pour décrire cette atmosphère hostile. Je suis sidérée. J’ai envie de pleurer."

"On est pas là pour ça" a crié un spectateur dans la salle. La scène s'est déroulée avant la représentation de Vassili Petrenko et de Renaud Capuçon. 

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