Revivre le dîner de 1961 en l'honneur des Kennedy, "ça ne peut pas être plus mythique", selon le chef étoilé Mathieu Viannay

Une vente aux enchères de menus historiques aura lieu dans quelques semaines. Parmi ces menus : celui du dîner Kennedy organisé à Versailles en 1961. Il a été resservi jeudi soir dans un célèbre restaurant doublement étoilé de Lyon. Aux commandes, Mathieu Viannay. La reproduction de ce dîner unique permet de mettre en scène la vente aux enchères.

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Une célèbre table étoilée lyonnaise a reconstitué ce jeudi soir le dîner de Gaulle - Kennedy, un banquet présidentiel historique, symbole de la diplomatie culinaire. Pourquoi ce repas ? Fin mai, à Paris, des milliers de menus patiemment collectionnés par le chef lyonnais Christophe Marguin seront vendus aux enchères par la maison Millon. Pour l'occasion, une reconstitution du dîner donné en l'honneur des Kennedy, à Versailles, le 1ᵉʳ juin 1961, a été organisée. La reproduction de ce menu permet de "mettre en valeur la collection du chef Marguin", explique Virginie Vernier, de la maison Millon.

"Menu Kennedy" : le goût de l'histoire

C'est le chef Mathieu Viannay, cuisinier de la Mère Brazier, qui a été chargé de reproduire ce menu présidentiel prestigieux préparé il y a plus de 60 ans. "C'est vraiment le repas historique, le général de Gaulle et Kennedy. Ça ne peut pas être plus mythique", précise le chef doublement étoilé. De quoi se mettre la pression pour ce repas unique ? "Il y a zéro risque. Il n'y a que du savoir-faire", explique-t-il en coulisses.

Bien entendu, ce menu de réception a été quelque peu adapté aux papilles. En salle, les convives sont conquis et ont l'impression de vivre un moment d'exception. "On revit un grand moment culinaire, gastronomique, mais aussi diplomatique. On sent bien qu'il y a autre chose que les plats et les vins présentés ce soir. On passe un très bon moment", explique un convive. "C'est un moment historique. On se replonge dans l'histoire", ajoute une autre. "C'est un petit morceau d'histoire, une assiette exceptionnelle avec un chef qui l'est aussi. Je me sens très privilégiée. On s'est préparé à l'idée de venir. Je ne crois pas que ce soit si éphémère que cela, ça devient une madeleine de Proust", assure une troisième invitée. Coût du menu : 250 euros, pour retrouver un petit goût d'histoire internationale.

Agapes à Versailles

Le 1ᵉʳ juin 1961, le château de Versailles recevait un hôte de marque : John Fitzgerald Kennedy, trente-cinquième président des États-Unis d'Amérique, et son épouse, Jacqueline "Jackie" Kennedy. À 20h, un dîner a été organisé dans la galerie des Glaces. Pour l'occasion, la Grande galerie avait été entièrement électrifiée et chauffée. Le dîner était aussi une démonstration des arts de la table à la française  : cristal de Baccarat, vaisselle de Sèvres et éléments du Grand Vermeil de Napoléon. Le repas avait rassemblé 178 invités.

Paradoxalement, ce dîner de gala était révélateur d'une certaine ascèse du locataire de l'Élysée. Il se composait de cinq plats classiques et d'un dessert : velouté Sultane, Timbale de sole Joinville, cœur de filet de Charolais Renaissance, chaud-froid de volaille, salade de romaine à l'estragon et parfait Viviane. Le tout accompagné de Riesling 1955, d'un Château Cheval Blanc de 1953, d'un Corton-Grancey de la même année et d'un champagne Lanson de 1952. Ni amuse-bouche ou hors d'œuvres compliqués. À l'opposé du menu servi en 1914 au roi d'Angleterre lors de sa visite officielle en France : il se composait de 17 plats.

Les plats servis dans la galerie des Glaces étaient préparés, à l'abri des regards curieux. Une cuisine a été improvisée dans la Cour des Cerfs. Un escalier reliant cette cuisine au lieu de réception permettait au personnel de monter et descendre en toute discrétion…

Ventes aux enchères

"C'est un plaisir. Pouvoir un jour faire découvrir ce menu à 50 clients ce soir, c'est génial", explique Christophe Marguin. "On a même reproduit aussi la couverture du menu", ajoute-t-il. Le chef des Toques Blanches collectionne les menus gastronomiques depuis 38 ans. Plus qu'une page gourmande, derrière chacun de ces bristols se cache une histoire ou un secret d'État. "C'est la France à travers tous ces menus. On a reçu tous les chefs d'États, tous les dictateurs et même les empereurs. Chaque menu raconte une histoire. Un repas, c'est souvent le moment où l'on négocie des choses", indique le chef lyonnais. Il s'en sépare aujourd'hui de peur de voir sa collection disparaître.

"Je préfère que des collectionneurs et des passionnés en acquièrent un ou deux ou dix. Que cette collection continue à vivre. Mon rêve, c'est qu'un collectionneur achète tous les lots", confie Christophe Marguin. C'est la maison Millon à Lyon qui organise la vente aux enchères des 4 600 menus du collectionneur : "C'est très varié : de Napoléon III à Emmanuel Macron. Jusqu'à la dernière visite de Charles III en septembre. On acquiert une page de l'histoire de France, de la gastronomie française et de la diplomatie", explique Virginie Vernier.  La vente aura lieu le 31 mai à Paris.

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