Tentative de féminicide au white-spirit : "Elle ne méritait pas ça", 17 ans de réclusion criminelle requis à l'encontre de l'ex-compagnon

Le 22 janvier 2022, un homme a aspergé d’alcool puis mis le feu à son ex-conjointe. La victime a miraculeusement survécu. Le procès de cette tentative de féminicide a débuté le 20 novembre devant les assises du Rhône, à Lyon. Les premiers mots de l'accusé, qui risque la perpétuité, ont été des excuses et des regrets. Ce jeudi après-midi, l'avocat général a requis 17 ans de réclusion criminelle.

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"C'est un miracle que Claudia soit toujours en vie. Ce jour-là, elle est passée à deux doigts d'être brûlée vive par son ex-compagnon. Ce miracle, c'est grâce à l'instinct de survie de Claudia," a déclaré l'avocat général ce jeudi après-midi. Ce dernier a requis une peine de 17 ans de réclusion criminelle, assortie d'un suivi socio-judiciaire à l'encontre de l'accusé. Alexandru N. est jugé pour tentative de meurtre sur son ex-compagne. Le magistrat a également réclamé une interdiction du territoire pour ce ressortissant roumain. L'avocat de la défense doit à présent plaider. Après deux jours de débats, le verdict est attendu dans la soirée.

"Perte de contrôle"

Des excuses et des regrets pour la victime, ses enfants et l'ensemble de la famille. Ce sont les premiers mots prononcés par Alexandru N. lorsqu'il a été interrogé au premier jour de son procès. "Il sait que ce qui s'est passé aura des conséquences pendant très longtemps", a assuré l'avocat de la défense, Me Romain Dussuel, un peu plus tôt dans la matinée.

Son client, âgé aujourd'hui de 39 ans, aurait perdu le contrôle. "Quand il dit qu'il ne se reconnaît pas, pour lui, il y a eu un phénomène de trou noir. Il s'est retrouvé absent à lui-même. Je pense que c'est une partie de ce qui lui est arrivé", explique Me Dussuel.

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Mon client a dit lors de la procédure : "J'ai perdu la tête". Je pense que c'est quelque chose qui est souvent dit dans les dossiers criminels aux Assises. ©France tv

Mais comment son client est-il arrivé à ce passage à l'acte ? Pourquoi cette perte de sang-froid ? C'est toujours difficilement explicable, selon l'avocat lyonnais. "C'est toujours un peu le mystère du passage à l'acte. De ce qui le motive alors qu'on a pu se retrouver dans une situation similaire et que finalement, on n'arrive plus à garder le contrôle et on perd les pieds," avance l'avocat de la défense.

Mon client a dit lors de la procédure : "J'ai perdu la tête". Je pense que c'est quelque chose qui est souvent dit dans les dossiers criminels aux Assises.

Me Romain Dussuel

Avocat de la défense

"Il est décrit par l'ensemble de son entourage comme quelqu'un de très bien, présent sur le territoire national depuis 2014, aucun casier judiciaire, aucun antécédent. Finalement, je crois que ce qui a dominé dans son entourage, c'est l'incompréhension totale", a expliqué l'avocat.

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Un geste incompréhensible pour l'entourage de l'accusé. Me Romain Dussuel, avocat de la défense. 21/11/24 ©France tv

Relation houleuse

Les disputes au sein du couple étaient nombreuses, presque quotidiennes, aux dires des témoins appelés à la barre mercredi. "Tout le monde dit que c'était une relation faite de hauts et de bas, chaotique, tumultueuse, avec de nombreux allers-retours des deux côtés", a indiqué l'avocat de la défense. Le couple se disputait souvent, Claudia reprochait à son compagnon sa consommation d'alcool et l'avait éconduit de son appartement. La jalousie de son compagnon était exacerbée par le passé de prostitution de son ex-compagne. Les experts psychologues ont présenté la victime comme une femme caractérielle, colérique, voire violente. Mais elle l'a dit à la barre, elle "ne méritait pas ça".

Dans son réquisitoire, l'avocat général n'a pas manqué de pointer du doigt cette "relation toxique" dans laquelle les deux protagonistes "se faisaient du mal", dans laquelle ils étaient "englués". L'accusé était "comme un volcan qui bouillonne. Il y avait des signes avant-coureurs", selon le magistrat.

"Un geste délibéré"

Alexandru N. a acheté deux bouteilles d'alcool à brûler. Bouteilles qui ont été ouvertes avant son entrée dans l'appartement et le geste fatal. Pour le magistrat, c'est un acte délibéré et prémédité. Dans son réquisitoire, il a également appuyé sur la méthode employée par l'accusé. L'usage du feu, "purificateur" et symbolique, n'est pas non plus anodin pour l'avocat général.

Ce 22 janvier 2022, Claudia était aspergée d'alcool à brûler par Alexandru N. son ex-compagnon. Ce dernier l'a incendiée à l'aide d'un briquet avant de quitter les lieux. La scène s'est déroulée dans l'appartement de la jeune femme. Cette dernière a alors eu le réflexe salvateur de se jeter sous la douche pour éteindre les flammes.

Le suspect, alcoolisé, s’est ensuite rendu de lui-même au commissariat du quartier. Durant l'enquête, l'homme a expliqué avoir vu noir, avoir voulu faire peur à la jeune femme, la blesser, mais pas la tuer. "S'il avait voulu lui faire peur, il n'aurait pas allumé le briquet", a insisté l'avocat général dans son réquisitoire.

Miraculée

"Le pouvoir létal" du produit était très haut, selon les experts. La trentenaire en a réchappé par miracle, mais au prix de graves brûlures et de souffrances. Claudia a été brûlée au second degré sur 15% du corps : son visage, son thorax et ses bras sont marqués à jamais. Ses cuisses portent des cicatrices des opérations et des greffes qu'elle a été obligée de subir.

Pour l'avocate de Claudia, aucune peine et aucun mot ne peuvent réparer ou exprimer les souffrances endurées par sa cliente. "C'est deux mois d'hospitalisation, de la souffrance tant visuelle que corporelle. Des souffrances esthétiques et psychologiques qui perdurent et qui vont perdurer après le verdict de la cour d'Assises", a indiqué Me Raphaëlle Hovasse.

Les enfants de Claudia, parties civiles, étaient présents dans l'appartement du 1ᵉʳ arrondissement de Lyon le jour des faits. L'accusé a reconnu sa jalousie et son alcoolisation au moment des faits, mais pas l'intention homicide. Il comparait durant deux jours pour répondre de "tentative de meurtre sur un conjoint", une circonstance aggravante pour laquelle l'accusé encourait la perpétuité. L'accusation a réclamé une peine de 17 années de réclusion criminelle. "Une sanction est indispensable. La victime ne méritait pas ça, quels que soient les actes commis. Elle ne méritait pas qu'on attente à sa vie", a conclu l'avocat général.

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