Relaxé en première instance par le tribunal correctionnel de Bonneville en 2019, l'ancien directeur de l'école maternelle de Cornier, en Haute-Savoie, est de nouveau présenté à la justice pour des faits d'agressions sexuelles sur mineurs devant la cour d'appel de Chambéry.
"Je suis complètement innocent, ce n'est plus de la pollution, c'est de l'intoxication". Près de cinq ans après les faits qui lui sont reprochés, l'ancien directeur et enseignant de l'école maternelle de Cornier en Haute-Savoie maintient ses dénégations. Il réfute avoir agressé sexuellement ou exhibé son sexe à ses anciens élèves de maternelle entre 2015 et 2016.
"Je veux qu'on dise la vérité et que tout le monde reparte en paix" a déclaré à la barre l'enseignant de 53 ans, visiblement ébranlé par l'évocation de son parcours de vie depuis le début de l'affaire. La voix hésitante, il ajoute : "c'est très très dur d'être accusé à tort, surtout pour pédophilie".
Père de trois enfants, ce quinquagénaire aux cheveux grisonnants, comparaît libre. Il dit désormais "vivre au jour le jour", puisque "je suis sans emploi, car mon poste a été suspendu par le rectorat de Grenoble".
L'enseignant avait bénéficié d'un non-lieu en première instance, à l'issue de son procès devant le tribunal correctionnel de Bonneville en 2019. Les juges avaient justifié la relaxe par "l’absence de preuves matérielles". La défense avait elle mis en avant de graves problèmes dans l'audition et le recueil de la parole des enfants.
Quel poids pour la parole des enfants ?
Un an et demi après le jugement qui avait eu l'effet d'un coup de massue sur les parents des 19 élèves reconnus comme victimes par l'instruction, les familles, de leur côté, attendent de ce procès en appel que la parole de leurs enfants soit entendue et reconnue. Ils dénoncent "une injustice et un non-sens judiciaire synonyme de honte". "Depuis les faits, nous vivons quotidiennement au rythme de nos enfants, de leurs souffrances exprimées verbalement ou somatisées", disent-ils.
Maître Marie Grimaud, avocate de l'association Innocence en Danger, qui les représente, avait demandé au début de l'audience un renvoi du procès pour complément d'information, estimant que les "investigations avaient été lacunaires" dans la procédure d'instruction et dans l'enquête. La requête a été rejetée par la cour après délibération.
L'avocate estime par ailleurs qu'il faut relever "une aggravation des troubles" chez certains enfants, depuis leurs premières auditions. Un pédopsychiatre, qui sera entendu dans l'après-midi, a ainsi envoyé cinq signalements pour viols auprès du procureur de la République de Bonneville. La partie civile souhaite donc que la cour requalifie une partie des faits d'agressions sexuelles sur mineurs en viols.
Le procès doit durer deux jours devant la cour d’appel de Chambéry. Il devra surtout déterminer quel poids accorder à la parole d’enfants âgés de 2 à 4 ans au moment des faits. Une "crédibilité" de la parole des élèves qui était au centre des interventions à la barre ce mercredi après-midi.